[Rae] FFVIII : Le feu et la glace
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je viens de me rendre compte que j' avais posté 2 fois le chapitre désoléééééée
Dernière modification par Rae le 15 déc. 2006 22:32, modifié 1 fois.
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histoire ACHEVEE
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CHAPITRE XX
Les pas s’ approchent, de plus en en plus rapidement, comme de partout à la fois. Merde, on dirait bien que nous sommes en train de nous faire encercler. Les garçons et moi nous nous mettons dos à dos, pour parer à toute attaque. Zack a repris son sang froid et se tient prêt, mais je le sens nerveux.
- Qu’ est-ce que c’ est ? demande-t-il. Des monstres ? Et y en a combien ??
Une ombre se faufile entre les arbres et ressort sur la faible lueur que laisse notre feu de camp d’ où nous nous trouvons. Environ deux mètres de hauteur, je dirais. Bipède. Plutôt costaud. Ce n’ est pas un homme, mais impossible d’ identifier la chose plus précisément.
- Ca va trop vite, dit Etan, d’ une voix tendue. Soit ils sont une dizaine, soit ils se déplacent très vite…
Des yeux luisent dans le noir en face de moi pendant une seconde à peine, puis disparaissent.
- On s’ est trop éloignés du camp, murmure Etan. Il faut se rapprocher du feu, on sera plus en sécurité, et au moins on y verra mieux.
Oui, si ces choses nous laissent passer…
Toujours en formation, nous avançons prudemment. Nous sentons toujours des présences autour de nous, mais rien n’ approche, comme si l’ ennemi se contentait de nous observer pour le moment. Nous regagnons le camp qui devait bien être aux dix mètres les plus longs à parcourir de notre vie, et nous nous postons dos au feu. Un simple coup d’ œil nous permet de constater que nos sacs ont été fouillés. Une des couvertures se retrouve en lambeaux, et toutes nos affaires, éparpillées sur le sol sur plusieurs mètres.
L’ avantage, si l’ on peut dire, c’ est que quoi que nos voleurs aient pu chercher, ils n’ ont à coup sûr rien trouvé puisque nous n’ avons absolument rien.
Plusieurs paires d’ yeux luisants continuent de réapparaître entre les arbres, mais sans approcher davantage. Quoi que ce soit, ça n’ a manifestement pas l’ intention d’ attaquer; mais, dans l’ incertitude, nous restons sur nos gardes, et même Zack ne s’ endort pas cette fois.
Lorsque le jour se lève, cinquante mille ans plus tard, nous n’ avons plus senti leur présence depuis un bon moment. Mais nous nous empressons quand même de remballer nos affaires et de détaler vers la sortie de la forêt. Arrivés à la lisière, nous nous arrêtons, soulagés. Les monstres qui vivent dans les bois attaquent la plupart du temps pour défendre leur territoire et n’en sortent pas une fois leur squatteur délogé.
- C’ était quoi, ça ? fait Zack, qui desserre les dents pour la première fois depuis des heures.
Nous avons tous des cernes larges comme des coquards sous les yeux, et je ne sens plus mes jambes. Se faire attaquer par des monstres de jour est une chose, mais de nuit, quand il est impossible de les identifier, de les dénombrer, et de les repérer précisément, c’ est un cauchemar; surtout si en plus on a un débutant avec soi à protéger. On s’ en est plutôt bien sortis, on est quittes pour une belle peur, mais c’ est la dernière fois que je passe la nuit dans une forêt.
Etan s’ assied et prend sa couverture.
- On ferait mieux d’ essayer de dormir quelques heures maintenant. On ne peut pas partir dans l’ état où on est. Quand il fera bien jour, on reprendra la route.
Et hop, ni une ni deux, il roule sa veste en boule, la glisse sous sa tête, nous tourne le dos et s’ endort. Zack et moi le considérons un instant, sidérés.
Je sens qu’ il aurait fallu continuer la discussion d’ hier soir mais je ne m’ en sens pas l’ énergie, surtout pas devant Zack, et franchement, je ne saurais pas quoi dire. Notre dispute d’ hier résonne toujours dans ma tête.
Etan.
Amoureux.
De moi.
Complètement surréaliste.
- Tu n’ as qu’ à dormir, toi, dit Zack, me tirant de mes pensées. Moi, impossible que je referme l’ œil tant qu’ on sera ici. Pas après cette nuit.
- On ne nous attaquera pas, je dis pour le rassurer, pas persuadée non plus de réussir à dormir après une telle nuit. Les monstres qui sont dans les forets se méfient du jour comme de la peste, ils ne mettent jamais les pieds à moins de deux mètres de la lisière. On ne risque rien ici.
- On est quand même encore trop près pour moi. Va dormir, je t’ assure, je monte la garde.
Puisqu’ il insiste... J’ attrape un des sacs, en retire la couverture la moins trouée et je m’ allonge, mais avec bien trop d’ idées en tête pour pouvoir réussir à dormir.
De toute façon, j’ ai à peine fermé les yeux que Zack se met à hurler:
- Là ! Encore les monstres ! Ils nous ont suivi !
Je me redresse, alarmée. Etan s’ est remis sur ses pieds en un éclair, son arme à la main. Nous regardons dans la direction de la forêt, que Zack nous montre du doigt. Plusieurs masses à moitié dissimulées par les arbres s’ avancent lentement vers nous, jusqu’ à sortir dans la lumière.
Une exclamation de stupeur m’ échappe, puis j’ éclate de rire.
Des chocobos !
Eberlué, Etan a abaissé son arme et regarde les animaux qui s’ approchent tranquillement.
- Qu’ est-ce qui se passe ? fait Zack en nous jetant des regards ahuris. Ils approchent !
- Ce ne sont que des chocobos. Ils sont absolument inoffensifs, j’ explique en me laissant tomber sur le dos, de soulagement.
- C’ est une forêt de chocobos… dit Etan qui n’ en revient pas. Ils devaient chercher de la nourriture. Ils ont été attirés par le bruit et le feu, évidemment...
- Des chocobos ? demande Zack, un sourcil levé.
Evidemment, il n’ en a certainement jamais entendu parler là où vivait. Moi même, je n’ en avais jamais vu en vrai jusqu’ ici, mais je sais que mon père en avait un il y a très longtemps. Quoiqu’ on ne puisse réellement parler de possession pour un chocobo. Les chocobos ne « sont » à personne ; ils acceptent ou non de vous mener où vous le voulez, et s’ ils vous apprécient, ils reviendront si vous les appelez. Je regrette de ne pas avoir de chocolégume sur moi…
Je me lève pour m’ approcher de Zack qui semble maintenant fasciné par nos nouveaux amis. Il y a en là cinq, dont un tout jeune, vu sa taille.
- Ils sont complètement inoffensifs, tant qu’ on ne les embête pas. Ce sont des animaux très vifs ; il faut se méfier de leur bec et de leurs griffes s’ ils sont en colère. Mais ils n’attaquent pas sauf s’ ils ont une raison de le faire. S’ ils sont aussi appréciés, c’ est parce qu’ ils sont très résistants et qu’ ils peuvent porter de très lourdes charges. Ceux-ci sont encore jeunes, on dirait, j’ ajoute en tendant le bras vers leur plumage jaune de celui qui se trouve le plus près de moi.
Le chocobo commence par reculer sa tête pour observer ma main en émettant un petit gazouillis, puis accepte de se laisser caresser.
- A d’ autres niveaux, ils peuvent même escalader des montagnes, nager, voler… je continue, essayant de me rappeler les quelques notions que je possède en la matière.
- Ouaaah…
Je retourne m’ asseoir, épuisée. Immensément soulagée, certes, mais épuisée tout de même. Quand je pense qu’ on a passé la nuit à angoisser à cause de ces stupides oiseaux… Zack, lui aussi rassuré pour le coup, tente de les approcher en leur tendant stupidement des touffes d’ herbe, que les pauvres bêtes ont tout de même le bon sens de refuser. Un des chocobos vient fourrer son bec dans le sac d’ Etan qui doit se hâter de le récupérer avant qu’ il n’ ait réduit en confettis ce qu’ il n’ a pas eu le temps de détruire hier soir. En fait, nous préférons tous les trois ranger nos sacs avant une nouvelle catastrophe. Et puisqu’ il nous paraît évident au bout d’ une heure qu’ ils n’ ont pas l’ intention de nous laisser terminer notre nuit en paix, nous finissons par renoncer à toute idée de repos et décidons de reprendre la route. Le voyage promet d’ être agréable, vu notre état, si nous devons être arrivés à l’ orphelinat avant ce soir…
- Mais qu’ est-ce qu’ on est bêtes ! je m’ exclame soudain.
Les garçons me regardent comme si mon cas était bien plus grave que ça.
- Quoi ?
- Les chocobos ! pourquoi partir à pied, puisqu’ on a un moyen de transport juste là ?
- Tu as des chocolégumes sur toi ? demande Etan.
- Euh… non, mais peut-être qu’ en leur proposant autre chose…
- L’ herbe, ça marche pas, dit Zack d’ un air dépité.
- Tu as déjà vu beaucoup de d’oiseaux herbivores ? maugréé Etan.
- Euh…
- Il doit bien y avoir un moyen, je soupire, désespérée.
Pas question que je me retape encore vingt kilomètres à pied sans avoir dormi de la nuit. C’ est de la faute de ces bestioles, après tout. Elles n’ ont qu’ à réparer.
Maintenant assez habitués à nous, les chocobos se laissent approcher sans problème. Mais de là à ce qu’ ils acceptent qu’ on les monte, c’ est une autre histoire. Même celui qui m’ a laissé le caresser fait un bond de deux mètres sur le côté quand je tente de me hisser sur son dos. Les garçons n’ ont pas plus de succès, et encore moins Zack qui s’ entête avec ses touffes d’ herbe. Au bout de plusieurs heures passées à leur courir après inutilement, nous comprenons que la seule chose que nous avons réussie à faire, c’ est perdre notre temps.
- Y’ en a marre ! je râle. J’ abandonne, ça sert à rien.
Je me laisse tomber par terre, complètement harassée et de mauvaise humeur.
- Tant pis, on y va à pied. Mais je suis encore plus fatiguée que tout à l’heure, je geins en me laissant tomber sur le dos dans l’ herbe, découragée.
Les chocobos, eux, continuent de me regarder de leur air éternellement surpris, la tête légèrement penchée, comme s’ ils n’ avaient pas compris ce que nous voulions. Et dire qu’ avant je trouvais ça attendrissant. Je parie que ça les amuse.
- Je crois que t’ as raison, fait Etan en appuyant ses mains sur ses genoux, à bout de souffle. On aurait déjà fait plusieurs kilomètres, à cette heure-ci ; on a perdu beaucoup trop de temps.
Moi et mes idées brillantes…
Nous ramassons nos affaires et nous remettons en route vers l’ ouest, maussades. L’ énervement me redonne de l’ énergie, et c’ est tant mieux ; nous avons du temps à rattraper : toujours pas d’ orphelinat en vue.
- On ne s’ est quand même pas trompés de direction ? je demande à Etan, sceptique.
- Il n’ y a pas cinquante voies possibles, répond-t-il en haussant les épaules. L’ orphelinat se trouve à l’ ouest de l’ île, tout au bout. Alors c’ est forcément par là.
Nous n’ avons toujours pas reparlé d’ hier soir et il agit comme si rien ne s’ était passé, alors que j’ ai l’ impression que quelqu’ un s’ amuse à jouer avec un marteau dans ma tête tellement je me pose des questions. Il marche à toute allure malgré la fatigue qu’ il doit éprouver tout comme nous, et avance, le visage fermé, muet. Je penserais avoir rêvé hier si nous n’ avions pas passé la nuit à veiller. Etan évite soigneusement mon regard, et je me vois mal aborder le sujet devant Zack.
Et puis... je ne sais toujours pas quoi penser.
Etan et moi…
Ce que ça m’ évoque, c’ est tout sauf de l’ amour. Les disputes à longueur de temps, des bagarres, même. Pour attirer mon attention ? C’ est n’ importe quoi... Bon, j’ ai toujours été la plus acharnée de nous deux, je le reconnais. C’ est moi qui commençais presque à chaque fois. Et pourquoi ? Malgré mes efforts, impossible de remonter jusqu’ au commencement de notre mésentente. Je me remémore les photos de Zack, Etan et moi, à Tréhignac, et mon rêve. Si, petits, nous étions amis, il a bien dû se passer quelque chose…
Est-ce qu’ il pourrait y avoir un lien avec le départ de Zack de la BGU ? Nous avions quoi… cinq-six ans, à ce moment, d’ après Maureen. Etan venait d’ arriver à la BGU après la mort de sa mère. Et on peut supposer que c’ est quelques semaines plus tard, peut-être même quelques jours seulement, que Zack et ses parents sont partis. A cause d’ une première trahison de Harl. Ça reste des suppositions, évidemment, mais ça se tient. Toute cette période reste totalement obscure pour moi. Mes parents ne m’ ont jamais parlé de Harl, Maureen, Zack, ni même de notre amitié avec Etan. Mais pourquoi ? Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?
Tout d’ un coup, je sens qu’ on me secoue par le bras.
- Regarde, me fait Zack en me désignant de menton la colline que nous venons de franchir.
Cinq silhouettes jaunes se détachent du ciel gris.
- J’ y crois pas, les chocobos nous ont suivi ?! je constate, les yeux écarquillés par la surprise.
- Ouais, et sur des kilomètres, incroyable, hein ? fait Zack, ravi.
- Si ça c’ est pas pour nous narguer, je bougonne.
En me retournant je croise le regard d’ Etan qui détourne le tête et se remet à observer nos poursuivants. Il va quand même falloir qu’ on parle. Je ne sais pas encore pour dire quoi, mais il va vraiment falloir qu’ on parle.
Le troupeau accélère et nous rattrape rapidement, se mettant à trottiner autour de nous, visiblement fiers d’ eux. Mais je ne peux pas m’ empêcher de sourire quand le plus jeune des chocobos vient poser sa tête contre ma main. Je le caresse et il se met à battre des ailes de contentement tout en gazouillant. Bess ne me croira jamais quand je lui dirait que j’ ai pu trouver un chocobo.
Nous avons compris le message, ils veulent bien nous escorter, mais pas davantage. Soit. C’ est plutôt drôle de les voir gambader autour de nous, et dieu sait que tout ce qui est drôle est le bienvenu en ce moment. Nous arrivons à un endroit où la terre se fait moins large, la mer gagnant du terrain sur l’ île. Les chocobos se sont mis à trotter joyeusement devant nous, les plumes ébouriffées par le vent comme pour nous ouvrir le passage. Si ce n’ était eux, l’ endroit semblerait complètement vide de vie. C’ est réconfortant de les avoir finalement.
- Un phare ! s’ exclame Zack en montrant un point devant nous.
Ce sol mot a pour effet de me réveiller sur le coup. Un phare ! oui, il y en avait bien un près de l’ orphelinat, à ma connaissance ! Nous touchons enfin au but ! Revigorés par cette bonne nouvelle, nous accélérons le pas.
L’ orphelinat… Son histoire, je la connais, comme tout le monde, plus ou moins, et plutôt moins même. C’ est là que mon père et celui d’ Etan, Selphie, Quistis, Irvine, Zell et tante Ellone ont grandi, avant que cette dernière ne soit obligée de partir pour se cacher. Un jour, une sorcière est arrivée à la recherche de quelqu’ un à qui transmettre ses pouvoirs, et pour protéger les enfants, c’ est Edéa qui les as pris. Mais à cause de ça c’ est elle qui est devenue maléfique, et les enfants qu’ elle élevait ne se sont retrouvés que bien des années plus tard, et pour l’ affronter.
Encore un endroit chargé d’ histoire… j’ ignore quel rôle exact il a joué dans les évènements auxquels mes parents ont pris part, mais cet orphelinat y est clairement associé et je trouve ça fascinant. Tout ce qui a trait à cette époque, mes parents semblaient vouloir l’ enfouir et ne plus jamais y repenser. Impossible de tirer quoi que ce soit d’ eux là dessus, ni même de quelque autre professeur que ce soit. Je sais ce que tout le monde sait, que les Seeds ont vaincu plusieurs sorcières qui menaçaient le monde. Mais quel lien avec cet endroit ? Y a-t-il eu des combats là où je me tiens en ce moment-même ? Et alors ? ça ne signifierait pas pour autant qu’ il soit maudit.
Nous parcourons un petit sentier pierreux en pente qui mène vers le bâtiment principal, laissant les chocobos derrière nous. Arrivés à quelques mètres de la porte – ou l’ endroit où elle s’ est vraisemblablement trouvée à une époque, vu le trou béant qui s’ y trouve – nous stoppons.
- On est vraiment au bon endroit ? je demande, dubitative.
Ce bâtiment présente l’ image même de la désolation. Les murs de pierre semblent prêts à tomber en poussière pour peu qu’ on s’ appuie un peu trop dessus, et la mousse, les mauvaises herbes et même de petits arbres ont pris possession des lieux, créant une véritable petite forêt vierge à l’ intérieur de la maison. Plusieurs murs se sont en partie effondrés, ainsi que le toit, par endroits ; et le vent passant par les ouvertures siffle d’ un air lugubre.
Je suis presque sûre que l’ orphelinat où mon père a grandi n’ a pas plus que cinquante ans. Il a du être bâti, quoi, peut-être une dizaine d’ années avant que mon père y soit, quand Cid et Edéa ont créé les Seeds. Et tout a été rénové il y a quelques années quand ils ont voulu rouvrir l’ orphelinat. Mais ces bâtiments devant nous sont aussi en ruines que s’ ils étaient millénaires.
- Ca ne peut quand même pas être ici ! je m’ exclame.
- Je ne vois pas ce que ça pourrait être d’ autre, dit Etan en se grattant la tête. On est arrivés au bout de l’ île il n’ y a rien d’ autre plus loin.
- Est-ce qu’ on rentre ? demande Zack.
- Ca ne coûte rien d’ y faire un tour, je soupire.
J’ enjambe un muret et je m’ engouffre à l’ intérieur. Malgré le fait que plusieurs murs se soient effondrés et que le vent frappe violemment en dehors du bâtiment, il règne une chaleur étouffante à l’ intérieur, et l’ humidité du lieu remonte désagréablement jusqu’ au nez. On ne pourra jamais rester dans un endroit pareil. Le toit menace de tomber à tout moment à en juger par les tuiles crissant sous nos pieds tandis que nous traversons la maison, et il y a à peine de la place pour poser le pied sur le sol. Les quelques meubles qui n’ ont pas été rongés par l’ humidité tiennent à peine debout. Des poupées de chiffons, des vêtements d’ enfants, des tasses, des assiettes brisées. Les objets du quotidien traînant sur le sol montrent que l’ endroit a été quitté dans une grande agitation. Qu’ est-ce qui a bien pu réellement pousser ces gens à partir, à abandonner l’ endroit, puis a penser l’ île ensorcelée ?
Alors que je marche de pièce en pièce à la recherche de quelque chose qui pourrait nous être utile, j’ ai à nouveau la conscience étouffante des évènements qui ont eu lieu ici. J’ ai l’ impression d’ entendre des pleurs, des cris. La solitude, la tristesse et la peur. Je peux dire ce que je voudrais, je sens bien que nous ne sommes pas n’ importe où.
Nous enjambons les tas de pierre, écartant les plantes qui ont envahit les chambres ; ça a dû être un très bel endroit autrefois : sous la mousse, on reconnaît encore ce qui a du être de jolies colonnes de pierre, et les sculptures des meubles sont toujours visibles, même s’ ils sont maintenant gonflés par l’ humidité. Le jardin à l’ extérieur, sans toutes ces mauvaises herbes et ces plantes grimpantes devait être ravissant lui aussi. Mais il nous faut bientôt nous rendre à l’ évidence : il n’ y a plus rien à tirer de cet endroit. Aucun moyen de communication, pas de nourriture ( on s’ en doutait, certes… ), pas de couvertures…
Les chocobos semblent s’ être évanouis dans la nature. Ils nous avaient accompagnés à peu près jusqu’ à l’ entrée du chemin puis étaient partis explorer les lieux. Il n’ y a plus la moindre trace d’ eux, ils ont du retourner à leur forêt.
Tandis que nous redescendons vers la plage, nos pas nous mènent vers le phare qui se trouve au bout de la jetée. Il est à peu près aussi en mauvais état que l’ orphelinat et ne semble plus tenir debout que par magie ; il n’ est probablement plus en état de marche depuis longtemps mais ça ne coûte rien de vérifier, il nous serait extrêmement utile si nous pouvions nous en servir pour avertir de notre présence. Maintenant, évidemment, savoir qui nous avertirions est une autre question…
La porte s’ ouvre plutôt facilement, mais une fois à l’ intérieur, l’ escalier de bois qui mène au sommet n’ a pas l’ air très stable. Comme je suis la plus légère de nous trois, nous décidons que je monterai vérifier s’ il y a moyen de faire fonctionner tout ça.
J’ arrive à me hisser malgré les marches manquantes, obligée parfois de prendre carrément appui sur les murs pour sauter jusqu’ aux marches suivantes, au risque de tout faire s’ écrouler. J’ arrive enfin au sommet et je marche avec prudence sur le sol branlant jusqu’ à l’ espèce d’ ampoule géante qui se trouve au centre de la petite pièce. Les vitres qui couvraient les ouvertures panoramiques de la salle ont toutes disparu, il ne reste plus que quelques éclats encore accrochés aux fenêtres, et les embruns remontent jusqu’ ici. L’ ampoule au centre de la pièce est brisée, elle aussi. Est-ce qu’ elle pourrait quand même fonctionner ? Comment est-ce qu’ on actionne ce truc ? Après avoir rapidement fouillé la pièce des yeux j’ aperçois une manette rouillée dans un coin. Je ne vois que ça.
- Alors, il y a quelque chose ? me crie Etan d’ en bas.
- Une manette ! je fais en essayant de l’ abaisser.
Elle refuse de bouger. Je réessaie en y mettant tout mon poids, mais rien à faire.
- Ca a l’ air coincé ! je crie a nouveau.
- J’ arrive, fait Etan.
Il me rejoint pour m’ aider, faisant horriblement craquer les escaliers au passage ; après plusieurs minutes d’ efforts conjugués, nous parvenons enfin à abaisser la manette. Mais le phare ne s’ allume toujours pas. Pas la moindre petite étincelle ou ronflement.
- Ca sert à rien, dit Etan. On ferait mieux de descendre d’ ici avant que ça s’ effondre. De toute façon l’ ampoule est cassée, et avec toute cette humidité, c’ est pas étonnant.
C’ était notre seul espoir de nous faire remarquer. Maintenant on fait quoi ? On attend tranquillement en comptant sur notre chance légendaire ?
- Hey, ça va ? demande Etan en se retournant vers moi en voyant que je ne bougeais pas.
- Oui, oui…
Il s’ arrête et revient vers moi.
- On trouvera une autre solution. Promis.
Si seulement, il pouvait arrêter d’ être aussi… rassurant, conciliant, attentionné… J’ arrive à peine à le regarder dans les yeux depuis hier, c’ est complètement stupide. On en a toujours pas reparlé, et j’ ai l’ impression qu’ il me regarde comme s’ il attendait que je dise quelque chose à propos de tout ça. Je sais que ce serait le moment d’ en reparler. Mais il n’ y a rien qui vient. C’ est toujours aussi flou. Ça fait presque mal.
- Viens, je t’ aide a descendre, dit-il finalement.
- C’ est pas la peine, je fais précipitamment en passant devant pour sauter les marches.
Il me suit en silence et nous rejoignons Zack.
- Alors ?
- Rien. Ça ne marche plus.
- Et même si c’ était le cas, on ne sait pas si ça aurait été une bonne idée de l’ utiliser, de toute façon, fait Etan, sûrement pour nous consoler.
- Ca aurait toujours été mieux que de rester ici à jouer les Robinson Crusoé, je rétorque malgré moi. Même si ce sont des ennemis qui aperçoivent la lumière, au moins ils amèneront des vaisseaux et on aura une chance de partir d’ ici ; dans le meilleur des cas, ça aurait été des alliés de la BGU.
- Sauf si les ennemis nous règlent notre compte avant que nous ne puissions tenter quoi que ce soit. De toute façon on n’ aura pas à se poser la question, tranche Etan en regardant vers le sommet du phare.
- Alors, qu’ est-ce qu’ on va faire ? demande Zack, à nouveau inquiet.
- Déjà, trouver un endroit où dormir, je dis en lui prenant le bras tout en souriant pour le rassurer.
Je passe également mon bras sous celui d’ Etan qui sursaute et je les tire vers la plage côté sud de l’ île, le seul endroit qui ne soit pas balayé par les rafales de vent, où nous avions laissé nos sacs. Ce n’ est pas le moment de s’ apitoyer, et inutile de faire paniquer Zack pour le moment en lui disant que nous n’ avons pas la moindre idée de ce qui va nous arriver. C’ est bien simple : nous ne pouvons rien faire de plus, ça ne dépend plus de nous. Nous sommes arrivés à l’ endroit où nous sommes le plus susceptibles d’ être découverts, mais si personne ne passe, nous ne pourrons certainement pas rentrer à la nage…
Nous sommes assis sur la plage, face à la mer, pour regarder le jour qui commence à décliner. Etan a allumé un petit feu autour duquel nous avons pris place, et Zack prépare des cannes à pêche avec des bois de bois et des fils qu’ il a réussi à trouver. Les étoiles apparaissent peu à peu au dessus de nous tandis que le ciel prend des teintes orangées. C’ est tout simplement magnifique.
Je n’ arrête pas de m’ imaginer ce qui a pu avoir lieu sur cette île. Si ça se trouve, Papa, Quistis, Zell et les autres jouaient ici-même dans le sable. Quelle enfance a pu avoir mon père dans cet orphelinat ? Et pourquoi Laguna n’ était-il pas là pour lui ? Et puis, pourquoi est-ce que j’ en suis à me poser de telles questions sur ma propre famille, c’ est dingue… J’ ai toujours détesté cette tendance qu’ ils avaient tous à élucider mes questions – tout à fait légitimes pourtant, il me semble – en m’ envoyant à une tache quelconque, en me proposant à un gâteau – quand ce n’ était pas un sermon sur le passé qu’ on doit laisser de côté pour se concentrer sur l’ avenir. Je suis sûre que ça aurait résolu beaucoup de nos problèmes actuels, pourtant. Cet endroit n’ est pas commun, je le sens bien. Il s’ est passé des choses importantes ici, j’ en ai la conviction, mais on a voulu me laisser en dehors de ça, et maintenant, on se retrouve coincés…
Zack laisse errer son regard sur la mer sans parvenir à chasser cet air anxieux de son visage. Pas besoin d’ être un grand génie pour comprendre la situation, il doit bien sentir qu’ on est dans une sacrée galère. Au moins, ce n’ est pas la nourriture qui manque : les poissons ont l’ air autrement meilleurs ici que ceux complètement rachitiques que nous parvenions à peine à attraper dans l’ ancienne cachette de Seifer. C’est plutôt une bonne nouvelle si on songe qu’ on risque d’ avoir à passer un bon moment ici… J’ aime cet endroit, en fait. Le calme, la sérénité, la beauté qui règnent ici sont tout simplement merveilleux… dommage que tout soit tellement délabré et que l’île soit aussi isolée.
Pouvoir juste fermer les yeux et penser ; j’ ai l’ impression que ça fait une éternité que ça ne m’ a plus été possible. Et je n’ en ai jamais eu autant besoin que maintenant. Ça fait plus de deux semaines que notre vie a complètement changé. Seize nuits passées dehors, livrés à nous mêmes, perdus, entourés d’ ennemis innombrables… et tout ce temps là, il n’ y a vraiment eu qu’ Etan et moi.
Etan.
Entre tout ce dont je me rappelle de ces dernières années avec lui, ce que j’ ai appris depuis que nous avons quitté la BGU, et ce qui s’ est passé la nuit dernière, je me demande comment il est possible d’ avoir autant vécu avec quelqu’ un sans vraiment le connaître. On a toujours été liés, par l’ histoire même de nos familles, c’ est indéniable. Et pourtant, ça a créé tellement de malentendus. Comment est-ce que j’ ai pu être comme tous les gens, à ne pas être capable de faire la différence entre la réalité et les superstitions ridicules, ces croyances entre une quelconque ressemblance entre Etan et son père, comme si le passé pouvait se reproduire à cause de ce simple lien, alors que je sais pertinemment que c’ est complètement ridicule ? comment est-ce que j’ ai pu croire des choses pareilles, moi aussi ?
Le sable crisse. C’ est Etan qui s’ approche et s’ assied à côté de moi, pendant que Zack, les pieds dans l’ eau, cherche notre dîner.
- Ecoute… hier soir, dans la forêt… j’ aurais pas dû te dire que… enfin, ce que je t’ ai dit. Je suis désolé. J’ ai pas dit ça pour… je voulais pas te mettre mal à l’ aise ou que ça complique les choses… Je sais bien que ça a du te paraître complètement dingue, et je regrette de te l’ avoir dit. J’ ai tout gaché, je sais. Mais…
Il se gratte la tête, ne sachant plus comment continuer. Eva, dit quelque chose… trouve quelque chose…
- Bon, on devrait peut-être aller aider Zack, dit Etan en se relevant. Sinon on est pas près de…
- Attends, je fais presque malgré moi en le rattrapant par le bras pour l’ obliger à rester.
***
- Moi, je peux te le dire, pourquoi il est parti, ton Zack, fit le garçon avec un sourire mauvais.
La petite fille leva ses yeux pleins de larmes vers lui. Elle était assise, seule, dans la cour des petits, et un plus grand s’ était approchée d’ elle pour lui faire face.
- Qu’ est-ce que tu racontes ?
- C’ est à cause du nouveau, le fils de Seifer Almasy, affirma le garçon en croisant les bras. T’ as pas compris ? il arrive, et tout d’ un coup, Zack et son papa et sa maman doivent partir. C’ est à cause du fils du traître. Mon papa savait que ça arriverait, il avait dit qu’ il y aurait plein de problèmes à cause de lui et voilà. Le fils du traître va tout faire pour se débarrasser de tout le monde ici, comme son papa.
- Tu dis n’ importe quoi, cria la petite fille. Etan, il est pas…
- Et bientôt, il voudra prendre TA place.
- Quoi ?
- Il se débarrasse d’ abord de Zack, continua le garçon avec une lenteur délibérée. C’ était ton meilleur copain, non ? il était tout seul et hop, il prend sa place. Il n’ a plus de parents ? Ben la prochaine fois, c’ est TA place qu’ il prendra. Regarde, tu le vois avec ton papa, là-bas ?
La gorge sèche, la petite tourna la tête vers le couloir au fond de la cour où on voyait de directeur de la BGU et le petit Etan marcher côte à côte et discuter.
- T’ as vu ? Il a plus de papa alors il va prendre le tien. Et après, quand il fera comme son vrai papa : il essaiera de tuer le tien, puis tout le monde à la BGU. On le sait tous, mais ton papa veut écouter personne et un jour…
Perdue, la petite fille ne pouvait détacher ses yeux de son père et du petit garçon blond qui marchaient plus loin. Depuis quand son père ne l’ avait-il plus emmenée se promener en la tenant ainsi par la main ? depuis qu’ Etan était arrivé à la BGU, c’ était vrai qu’ il paraissait plus renfermé, plus distant et qu’ il passait beaucoup de temps avec lui. Sa mère était nerveuse, et la petite s’ apercevait bien que les conversations cessaient dès qu’ elle arrivait. Mais ça ne pouvait tout même pas être vrai…
- Tu verras quand tes parents voudront plus de toi… avait perfidement conclu le garçon le garçon en s’ éloignant.
***
Je me redresse en sursaut, avec l’ impression de manquer d’ air, comme si je sortais ma tête de l’ eau. Blanc comme un linge, Etan me tient par le bras pour m’ empêcher de tomber en avant tandis que je tente de retrouver mon souffle.
- Qu’ est-ce qui s’ est passé ?? qu’ est-ce qui t’ arrive ? Eva ??
Haletante, je porte la main à mon visage et je me rends compte que mes joues ruissellent de larmes.
- Eva ??
- Ca va, ça va, je souffle machinalement.
Au même moment, une vague de nausée me submerge et je dois m’ éloigner.
- Tu en es sûre ? demande Etan en me rejoignant après que j’ ai fini de cracher mes boyaux.
- Non…
- Qu’ est-ce qui s’ est passé ?
Il me prend le bras pour m’ aider à me relever et nous retournons à la lumière.
- Je sais pas… j’ ai eu… une espèce de flash.
- Une vision ?
- Non, pas une vision. Pourquoi est-ce que tu penses que ce serait ça ? faudrait que je sois une sorcière…
- J’ en sais rien, tu me parles de flashs…
- Ce n’ était pas une « vision » !
Il me regarde l’ air inquiet.
- Quand tu m’ as attrapé le bras et que tu as sursauté, ça m’ a fait penser à Kassandra quand elle a des visions, même si ce n’ est pas aussi violent pour elle.
- Je te répète que…
- Ne t’ énerve pas ! je te dis ce que j’ ai vu, tu as réagi comme Kassandra… et puis, ta mère en était une, de sorcière ; en quoi est-ce que ce serait si extraordinaire qu’ elle t’ ait transmis une partie de ses pouvoirs ? Pour ce qu’ on en sait… Eva, il y a les rêves que tu fais, tu ne peux pas nier que…
Deux larmes coulent à nouveau malgré moi et je sens mon sang se glacer. Mes rêves qui ressemblaient tellement à une réminiscence du passé… et ces impressions quand je touchais des objets à l’ histoire particulière… Et s’ il avait raison ?
- Mais ma mère n’ a jamais eu aucune sorte de vision…
Etan hausse les épaules.
- Je t’ explique juste que c’ est une possibilité… C’ est un truc dont je voulais te parler quand on était chez Harl et Maureen mais on avait été interrompus à ce moment. Le rêve que tu as fait ce jour là… ça s’ apparentait pas mal à une prémonition, il me semble.
- C’ est impossible… je proteste faiblement.
Etan jette un coup d’ œil vers Zack qui ne s’ est rendu compte de rien, toujours concentré sur sa ligne.
- Qu’ est-ce que tu as vu?
- J’ ai fait… une sorte de rêve…
Ce n’ était pas un rêve. C’ était un souvenir, encore une fois, je le sais bien. Ni une hallucination, le fruit de mon imagination, ni un rêve. J’ ai la conviction que ça s’ est vraiment produit. Et c’ est la réponse à mes questions. Voilà pourquoi je ne me rappelle pas la raison pour laquelle je le détestais. Parce que c’ était une idée de petite fille manipulée. Cette fois les larmes me submergent.
- Ecoute, c’est pas grave si tu es une so… s’ affole Etan.
- Je suis désolée… je hoquète.
- Quoi ? demande-t-il, perdu.
- Tout est-ce de ma faute… ça a toujours été ma faute.
- Mais qu’ est-ce que tu racontes ? écoute, calme toi… Qu’ est-ce que tu as vu ?
Réticente, je lui raconte ce que j’ ai vu. A partir de là, les conclusions ne sont pas bien difficiles à tirer… C’ est lui-même qui affirme depuis le début que ce sont des visions que j’ ai, et qu’ il faut les prendre au sérieux.
Il passe sa main dans mon dos pour me réconforter.
- Ecoute, c’ est pas grave. C’ est du passé, te mets pas dans un état pareil…
Le bruit a fini par attirer l’ attention de Zack qui nous rejoint en courant.
- Qu’ est-ce qui ne va pas. Il s’ est passé quelque chose ? demande-t-il, inquiet.
- Non, c’ est rien… je fais en essayant de me calmer.
- C’ est juste que… euh… un problème qu’ on vient de régler. Ça va mieux maintenant.
Zack a l’ air rassuré. Heureusement qu’ il n’ insiste pas, je me vois mal aborder mon nouvel état de sorcière devant qui que ce soit. Moi-même je ne me l’ explique pas. Depuis que nous avons été obligés de quitter la BGU, j’ ai eu plusieurs petites visions, mais ça n’ avait rien à voir avec ce qui s’ est passé tout à l’ heure. Est-ce que ça pourrait dû au lien de cet endroit avec les sorcières ? ça aurait réveillé cette part de moi ?
Je m’ aperçois alors que la nuit est tout à fait tombée, et que pendant que nous discutions, Zack a pêché plusieurs gros poissons qu’ il se met en devoir de nous préparer. Pour détendre l’ atmosphère, les garçons discutent de tout et n’ importe quoi et racontent des bêtises plus grosses qu’ eux, je finis même par rire. Aucun d’ entre nous n’ a la moindre envie de dormir. Outre le fait que nous risquons d’ avoir à passer un bon moment ici où nous n’ aurons rien de mieux à faire, Etan a l’ air véritablement plus léger, et dans un sens, moi aussi. Nous savons enfin ce qui s’ est passé. Même si c’ était une raison stupide, même si ça n’ arrange rien de la connaître. Même si ça me tue d’ avoir compris que c’ était ma faute, parce que, petite et perdue, je m’ étais laissée entraîner par les autres à cause de mes peurs. Ça aurait rendu tellement de choses différentes si je n’ avais pas été aussi stupide…
Tout à coup, un éclair fend le ciel, nous projetant en pleine lumière et nous aveuglant momentanément. Nous protégeant les yeux, nous essayons de repérer la source de lumière.
- L… le phare ! balbutie Zack en se tournant vers Etan et moi quand la lumière se déplace lentement. Je… je croyais qu’ il ne fonctionnait pas ?
- C’ était bien le cas, fait Etan, les sourcils froncés.
Nous nous relevons d’ un bond et nous courons vers le phare. C’ est bien de là que vient la lumière, il n’ y a aucun doute.
- L’ ampoule était cassée, et la seule manette qui aurait pu l’ actionner n’ a rien déclenché… c’ est complètement dingue, fait Etan en se grattant la tête. Et il aurait fallu que quelqu’ un l’ actionne et il n’ y a que nous.
- C’ est peut - être automatisé et ça ne marche que de nuit ? suggère Zack.
- Il va faire jour dans moins d’ une heure, ça n’ a aucun sens, je réplique en regardant le ciel qui s’ éclaircit légèrement. Même s’ il était programmé – et encore en état d’ assurer ce programme – il aurait été allumé toute la nuit, pas seulement alors qu’ il est sur le point de faire jour.
Soudain, une grande sirène se fait entendre, nous figeant sur place.
- C’ était quoi ? demande inutilement Zack, les yeux exorbités.
- Ca venait de là je crois, répond Etan en se tournant vers la mer.
Le soleil se lève dans notre dos et le paysage face à nous est d’ un noir d’ encre, mélangeant la mer et le ciel. Impossible de distinguer quoi que ce soit, tant que la lumière du phare n’ arrive pas jusque là.
- Peut-être qu’ on a… juste rêvé… hasarde Zack.
Non. Il y a quelque chose qui bouge devant. J’ aperçois une sorte de miroitement qui disparaît de temps à autre et semble se déplacer.
- Dis pas de b… commence Etan en s’ approchant de l’ eau.
- Attendez, je vois quelque chose ! je crie.
Et, sans prévenir, la mer, qui se trouvait une seconde plus tôt à cinq mètres de nous vient nous battre les chevilles.
- Quelque chose approche… je réalise, glacée jusqu’ à la moelle.
- On recule ! hurle Etan. VITE !
Au même moment, un rayon du phare vient éclairer de plein fouet la mer. La vision que nous avons alors nous cloue sur place.
Un bateau !
Un bateau gigantesque approche de la plage, juste en face de nous.
Ou plus précisément : droit sur nous.
Pétrifiée, je n’ arrive pas à en détacher mes yeux alors qu’ il continue d’ avancer. Etan m’ attrape le bras pour me traîner en arrière tandis que des vaisseaux traversent le ciel et lâchent des salves de lasers dans notre direction. Stupéfaite, je bute sur un rocher en marchant à reculons et Etan trébuche dans le sable, entraîné par ma chute. Les vaisseaux s’ approchent. Les yeux fermés j’ attends le choc mais le bouclier de Sheba apparaît au dessus de nos têtes, nous protégeant des tirs. Etan en profite pour m’ aider à me relever et nous mettons à courir comme des dératés à la suite de Zack.
- On ne sera pas à l’ abri là-dedans, crie Zack tandis que nous nous ruons vers le bâtiment.
- Je sais, répond Etan, mais on sera cachés au moins.
- Merde, mais c’ est qui cette fois ?? je hurle pour couvrir les bruits de déflagrations provenant de la plage.
- Tu veux peut-être te proposer pour aller demander ?
Nous courons à en perdre haleine pour traverser l’ orphelinat et en ,le rattrapant, nous manquons de heurter de plein fouet Zack, figé face à l’ autre coté de l’ océan.
- C’ est pas le moment d’ admi…
Je reste bouche bée en apercevant ce qu’ était en train de fixer Zack.
La BGU.
Ma main agrippe la manche d’ Etan.
- Dis-moi que j’ ai pas une hallucination, je murmure, n’ osant pas y croire.
- Si c’ est le cas, on est deux, répond-t-il d’ une voix tout juste audible.
Ils sont là ! Ils nous ont trouvés !
- On est encerclés, marmonne Zack. On est fichus…
- Non, Zack, fantastique ! je ris, hystérique. C’ est notre fac !
- Votre quoi ? demande Zack, ahuri. Ça, c’est une fac ?? Vous voulez dire… Ce vaisseau, là ?
Au même moment, un tir atterrit tout près et fait voler en éclat un des murs qui se trouvait à notre droite.
- On va remettre les explications à plus tard, si ça vous dérange pas, tousse Etan.
- Ca venait d’ où ? demande Zack en chassant le nuage de poussière qui nous a envahi.
- On s’ en fout ! je crois que c’est pas une si bonne idée que ça de rester cachés, finalement, dit Etan. Il faut qu’ ils nous voient ; la BGU, je veux dire.
Nous courons sur la plage en direction de la fac en faisant de grands signes des bras et en hurlant.
Il n’ y a pas la moindre chance pour qu’ ils nous repèrent de là-haut.
Les vaisseaux continuent à passer en sifflant au dessus de nos têtes et se dirigent vers la BGU en la prenant pour cible ; en les observant plus attentivement maintenant que le jour est levé, je me rends compte qu’ ils portent les couleurs d’ Esthar.
Evidemment. Zukerdint disait vrai : même si nous l’ avons détruit lui, il n’ est pas tout Esthar. On dirait qu’ on a réussi à se retrouver en plein milieu d’ une bataille entre la BGU et eux sans le faire exprès.
- Il faut quand même faire quelque chose, on peut pas rester là, dit Zack d’ une voix angoissée. On sera coincés entre les deux pendant qu’ ils vont se taper dessus si ils ne se rendent pas compte qu’ on est là.
Des grincements provenant de la plage que nous avons quittée nous parviennent. Nous courons faire le tour de la maison voir ce qui s’ y passe. Le bateau est arrivé tout près de la plage et on dirait qu’ il s’ apprête à lâcher les soldats. C’ est une bonne nouvelle. Au moins, on peut se défendre contre des ennemis qui se battent sur le plancher des vaches, le problème, c’ est les vaisseaux qui les accompagnent pour les couvrir.
Tout à coup Etan se raidit à côté de moi et se redresse d’ un bond. Je dois le rattraper par sa veste pour l’ empêcher de courir dans leur direction.
- Mais t’ es dingue, qu’ est-ce qu’ il te prend ?? je hurle.
- Ma gunblade ! je l’ ai oubliée, elle est restée sur la plage !
- Tu rigoles j’ espère ?!
- Je dois y aller !
- Ce n’ est qu’ un bout de ferraille, Etan !! Revient sur terre, c’ est du suicide ! Les soldats y sont probablement déjà !
- Je ne peux pas la laisser, c’ était celle de mon père!
Celle de son père. Bien entendu. J’ aurais du me douter d’ un truc du genre. C’ est pas vrai… Comme si on avait pas assez de problèmes !
Il est comme fou. Quoi que je dise, ça ne l’ empêchera pas d’ essayer d’ aller chercher sa stupide gunblade, et il se fera tuer pour essayer de la reprendre. Je comprends mieux pourquoi il y tient autant, mais à quoi ça l’ avancera s’ il se fait réduire en charpie avant de l’ avoir récupérée ? il n’ a pas le moindre moyen de se défendre sans elle : pas de magie, un G-Force inutilisable, et des talents aux combat à mains nues magnifiquement inutiles face à une compagnie de soldats armés de blasters longue portée.
- Je vais y aller, je grogne.
- Non, pas question Eva, c’ est mon…
- Si tu y vas, je devrais te suivre pour te protéger, que tu le veuilles ou non ; alors si j’ y vais toute seule, ça reviendra au même et tu resteras avec Zack.
- C’ est trop dangereux, et si jamais ils…
- Et toi, tu comptais faire comment, au juste ?? je m’ énerve. Tu la veux oui ou non, ton arme ?
- Il est hors de question que tu y ailles.
- C’ est à prendre ou à laisser mon vieux, parce que je te garantis que tu n’ iras pas non plus ! On peut aussi tous rester ici et laisser l’ arme là où elle est !
- C’ était celle de mon père, je peux pas, Eva, comprends-moi…
- Ah, mais je comprends parfaitement ! et je pense toujours que ça ne vaut pas le coup que tu te fasses réduire en bouillie pour ça alors qu’ on aura besoin de toi quand les soldats arriveront. Alors maintenant j’ y vais parce que plus je perds de temps à discuter de ça avec toi, plus les soldats ont le temps de s’ approcher de nous.
- Eva…
- Pose tes fesses là et ferme-la ! Moi, j’ ai mon G-Force, pour me défendre. Ils ne me verront même pas. De toute façon j’ ai toujours été plus rapide que toi, je serai vite de retour.
Et avant qu’ ils n’ aient pu ajouter quoi que ce soit, je m’ éclipse et cours en direction de la plage. Y’ avait bien longtemps que j’ avais pas fait quelque chose d’ aussi insensé…
***
note de l’ auteur :
Je sais : tout ce temps là et même pas fichue de finir son histoire ! ça devait être le dernier chapitre, mais il m’ a fallu me rendre à l’ évidence : même en enlevant tout ce qui me paraissait le moins utile, il y avait toujours beaucoup trop de choses. Il y aura donc un chapitre XXI!
Comme vous avez pu le constater j’ ai eu énormément de problèmes pour ce chapitre ; beaucoup de blabla ( et encore, j’ en ai enlevé un paquet ! notamment une 2e petite scène avec les chocobos qui devaient réapparaître et les suivre jusqu’ à l’ orphelinat mais ça n’ apportait rien de plus à l’ histoire alors zouh, à la corbeille les chocobos) ; beaucoup de questionnements d’ Eva, aussi, et pourtant là encore j’ ai sacrément raccourci, mais surtout parce que je voulais pas que ça devienne trop mélo et que c’ était bien parti pour ! l’ horreur… au départ, j’ avais prévu qu’ Eva serait partie s’ isoler pour réfléchir au « problème Etan » jusqu’ à ce que celui-ci vienne la chercher ; mais au final, j’ arrivais pas à lui faire avoir de réflexion claire et ça piétinait beaucoup trop alors j’ ai modifié. J’ ai tenté d’ apporter une petite solution à la question qu’ elle se posait, à savoir : pourquoi elle le détestait autant depuis toujours ; j’ avais essayé de montrer plus ou moins ça depuis le début mais cette fois on en est sûrs ! en relisant, je trouve que c’ est abordé de manière maladroite, mais j’ espère que ça prendra plus son sens au chapitre suivant ( qui cette fois sera vraiment le dernier ! lol ).
Donc voilà, Eva est une sorcière ! Ha haaaaaa… Forcément, les rêves que j’ ai inclus de temps en temps, ils n’ étaient pas là pour faire beau, c’ étaient de vraies indications, pour commencer à montrer ce pouvoir qu’ elle a ; Eva est jeune, ça se manifeste juste par les rêves ( en tout cas pour le moment, qui sait… héhé :p ) d’ évènements passés. Voilà, je crois que c’ est tout pour aujourd’ hui ! Il me reste encore un bon bout à écrire pour le chapitre final, ça risque de pas mal bouger ! ^^
Je vous souhaite de bonnes fêtes un peu en avance, et encore merci pour votre patience ( en même temps, si vous voulez la suite, on peut pas dire que vous ayez vraiment le choix, je sais… gomeeeeeen ) ; n’ hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé du chapitre !
Les pas s’ approchent, de plus en en plus rapidement, comme de partout à la fois. Merde, on dirait bien que nous sommes en train de nous faire encercler. Les garçons et moi nous nous mettons dos à dos, pour parer à toute attaque. Zack a repris son sang froid et se tient prêt, mais je le sens nerveux.
- Qu’ est-ce que c’ est ? demande-t-il. Des monstres ? Et y en a combien ??
Une ombre se faufile entre les arbres et ressort sur la faible lueur que laisse notre feu de camp d’ où nous nous trouvons. Environ deux mètres de hauteur, je dirais. Bipède. Plutôt costaud. Ce n’ est pas un homme, mais impossible d’ identifier la chose plus précisément.
- Ca va trop vite, dit Etan, d’ une voix tendue. Soit ils sont une dizaine, soit ils se déplacent très vite…
Des yeux luisent dans le noir en face de moi pendant une seconde à peine, puis disparaissent.
- On s’ est trop éloignés du camp, murmure Etan. Il faut se rapprocher du feu, on sera plus en sécurité, et au moins on y verra mieux.
Oui, si ces choses nous laissent passer…
Toujours en formation, nous avançons prudemment. Nous sentons toujours des présences autour de nous, mais rien n’ approche, comme si l’ ennemi se contentait de nous observer pour le moment. Nous regagnons le camp qui devait bien être aux dix mètres les plus longs à parcourir de notre vie, et nous nous postons dos au feu. Un simple coup d’ œil nous permet de constater que nos sacs ont été fouillés. Une des couvertures se retrouve en lambeaux, et toutes nos affaires, éparpillées sur le sol sur plusieurs mètres.
L’ avantage, si l’ on peut dire, c’ est que quoi que nos voleurs aient pu chercher, ils n’ ont à coup sûr rien trouvé puisque nous n’ avons absolument rien.
Plusieurs paires d’ yeux luisants continuent de réapparaître entre les arbres, mais sans approcher davantage. Quoi que ce soit, ça n’ a manifestement pas l’ intention d’ attaquer; mais, dans l’ incertitude, nous restons sur nos gardes, et même Zack ne s’ endort pas cette fois.
Lorsque le jour se lève, cinquante mille ans plus tard, nous n’ avons plus senti leur présence depuis un bon moment. Mais nous nous empressons quand même de remballer nos affaires et de détaler vers la sortie de la forêt. Arrivés à la lisière, nous nous arrêtons, soulagés. Les monstres qui vivent dans les bois attaquent la plupart du temps pour défendre leur territoire et n’en sortent pas une fois leur squatteur délogé.
- C’ était quoi, ça ? fait Zack, qui desserre les dents pour la première fois depuis des heures.
Nous avons tous des cernes larges comme des coquards sous les yeux, et je ne sens plus mes jambes. Se faire attaquer par des monstres de jour est une chose, mais de nuit, quand il est impossible de les identifier, de les dénombrer, et de les repérer précisément, c’ est un cauchemar; surtout si en plus on a un débutant avec soi à protéger. On s’ en est plutôt bien sortis, on est quittes pour une belle peur, mais c’ est la dernière fois que je passe la nuit dans une forêt.
Etan s’ assied et prend sa couverture.
- On ferait mieux d’ essayer de dormir quelques heures maintenant. On ne peut pas partir dans l’ état où on est. Quand il fera bien jour, on reprendra la route.
Et hop, ni une ni deux, il roule sa veste en boule, la glisse sous sa tête, nous tourne le dos et s’ endort. Zack et moi le considérons un instant, sidérés.
Je sens qu’ il aurait fallu continuer la discussion d’ hier soir mais je ne m’ en sens pas l’ énergie, surtout pas devant Zack, et franchement, je ne saurais pas quoi dire. Notre dispute d’ hier résonne toujours dans ma tête.
Etan.
Amoureux.
De moi.
Complètement surréaliste.
- Tu n’ as qu’ à dormir, toi, dit Zack, me tirant de mes pensées. Moi, impossible que je referme l’ œil tant qu’ on sera ici. Pas après cette nuit.
- On ne nous attaquera pas, je dis pour le rassurer, pas persuadée non plus de réussir à dormir après une telle nuit. Les monstres qui sont dans les forets se méfient du jour comme de la peste, ils ne mettent jamais les pieds à moins de deux mètres de la lisière. On ne risque rien ici.
- On est quand même encore trop près pour moi. Va dormir, je t’ assure, je monte la garde.
Puisqu’ il insiste... J’ attrape un des sacs, en retire la couverture la moins trouée et je m’ allonge, mais avec bien trop d’ idées en tête pour pouvoir réussir à dormir.
De toute façon, j’ ai à peine fermé les yeux que Zack se met à hurler:
- Là ! Encore les monstres ! Ils nous ont suivi !
Je me redresse, alarmée. Etan s’ est remis sur ses pieds en un éclair, son arme à la main. Nous regardons dans la direction de la forêt, que Zack nous montre du doigt. Plusieurs masses à moitié dissimulées par les arbres s’ avancent lentement vers nous, jusqu’ à sortir dans la lumière.
Une exclamation de stupeur m’ échappe, puis j’ éclate de rire.
Des chocobos !
Eberlué, Etan a abaissé son arme et regarde les animaux qui s’ approchent tranquillement.
- Qu’ est-ce qui se passe ? fait Zack en nous jetant des regards ahuris. Ils approchent !
- Ce ne sont que des chocobos. Ils sont absolument inoffensifs, j’ explique en me laissant tomber sur le dos, de soulagement.
- C’ est une forêt de chocobos… dit Etan qui n’ en revient pas. Ils devaient chercher de la nourriture. Ils ont été attirés par le bruit et le feu, évidemment...
- Des chocobos ? demande Zack, un sourcil levé.
Evidemment, il n’ en a certainement jamais entendu parler là où vivait. Moi même, je n’ en avais jamais vu en vrai jusqu’ ici, mais je sais que mon père en avait un il y a très longtemps. Quoiqu’ on ne puisse réellement parler de possession pour un chocobo. Les chocobos ne « sont » à personne ; ils acceptent ou non de vous mener où vous le voulez, et s’ ils vous apprécient, ils reviendront si vous les appelez. Je regrette de ne pas avoir de chocolégume sur moi…
Je me lève pour m’ approcher de Zack qui semble maintenant fasciné par nos nouveaux amis. Il y a en là cinq, dont un tout jeune, vu sa taille.
- Ils sont complètement inoffensifs, tant qu’ on ne les embête pas. Ce sont des animaux très vifs ; il faut se méfier de leur bec et de leurs griffes s’ ils sont en colère. Mais ils n’attaquent pas sauf s’ ils ont une raison de le faire. S’ ils sont aussi appréciés, c’ est parce qu’ ils sont très résistants et qu’ ils peuvent porter de très lourdes charges. Ceux-ci sont encore jeunes, on dirait, j’ ajoute en tendant le bras vers leur plumage jaune de celui qui se trouve le plus près de moi.
Le chocobo commence par reculer sa tête pour observer ma main en émettant un petit gazouillis, puis accepte de se laisser caresser.
- A d’ autres niveaux, ils peuvent même escalader des montagnes, nager, voler… je continue, essayant de me rappeler les quelques notions que je possède en la matière.
- Ouaaah…
Je retourne m’ asseoir, épuisée. Immensément soulagée, certes, mais épuisée tout de même. Quand je pense qu’ on a passé la nuit à angoisser à cause de ces stupides oiseaux… Zack, lui aussi rassuré pour le coup, tente de les approcher en leur tendant stupidement des touffes d’ herbe, que les pauvres bêtes ont tout de même le bon sens de refuser. Un des chocobos vient fourrer son bec dans le sac d’ Etan qui doit se hâter de le récupérer avant qu’ il n’ ait réduit en confettis ce qu’ il n’ a pas eu le temps de détruire hier soir. En fait, nous préférons tous les trois ranger nos sacs avant une nouvelle catastrophe. Et puisqu’ il nous paraît évident au bout d’ une heure qu’ ils n’ ont pas l’ intention de nous laisser terminer notre nuit en paix, nous finissons par renoncer à toute idée de repos et décidons de reprendre la route. Le voyage promet d’ être agréable, vu notre état, si nous devons être arrivés à l’ orphelinat avant ce soir…
- Mais qu’ est-ce qu’ on est bêtes ! je m’ exclame soudain.
Les garçons me regardent comme si mon cas était bien plus grave que ça.
- Quoi ?
- Les chocobos ! pourquoi partir à pied, puisqu’ on a un moyen de transport juste là ?
- Tu as des chocolégumes sur toi ? demande Etan.
- Euh… non, mais peut-être qu’ en leur proposant autre chose…
- L’ herbe, ça marche pas, dit Zack d’ un air dépité.
- Tu as déjà vu beaucoup de d’oiseaux herbivores ? maugréé Etan.
- Euh…
- Il doit bien y avoir un moyen, je soupire, désespérée.
Pas question que je me retape encore vingt kilomètres à pied sans avoir dormi de la nuit. C’ est de la faute de ces bestioles, après tout. Elles n’ ont qu’ à réparer.
Maintenant assez habitués à nous, les chocobos se laissent approcher sans problème. Mais de là à ce qu’ ils acceptent qu’ on les monte, c’ est une autre histoire. Même celui qui m’ a laissé le caresser fait un bond de deux mètres sur le côté quand je tente de me hisser sur son dos. Les garçons n’ ont pas plus de succès, et encore moins Zack qui s’ entête avec ses touffes d’ herbe. Au bout de plusieurs heures passées à leur courir après inutilement, nous comprenons que la seule chose que nous avons réussie à faire, c’ est perdre notre temps.
- Y’ en a marre ! je râle. J’ abandonne, ça sert à rien.
Je me laisse tomber par terre, complètement harassée et de mauvaise humeur.
- Tant pis, on y va à pied. Mais je suis encore plus fatiguée que tout à l’heure, je geins en me laissant tomber sur le dos dans l’ herbe, découragée.
Les chocobos, eux, continuent de me regarder de leur air éternellement surpris, la tête légèrement penchée, comme s’ ils n’ avaient pas compris ce que nous voulions. Et dire qu’ avant je trouvais ça attendrissant. Je parie que ça les amuse.
- Je crois que t’ as raison, fait Etan en appuyant ses mains sur ses genoux, à bout de souffle. On aurait déjà fait plusieurs kilomètres, à cette heure-ci ; on a perdu beaucoup trop de temps.
Moi et mes idées brillantes…
Nous ramassons nos affaires et nous remettons en route vers l’ ouest, maussades. L’ énervement me redonne de l’ énergie, et c’ est tant mieux ; nous avons du temps à rattraper : toujours pas d’ orphelinat en vue.
- On ne s’ est quand même pas trompés de direction ? je demande à Etan, sceptique.
- Il n’ y a pas cinquante voies possibles, répond-t-il en haussant les épaules. L’ orphelinat se trouve à l’ ouest de l’ île, tout au bout. Alors c’ est forcément par là.
Nous n’ avons toujours pas reparlé d’ hier soir et il agit comme si rien ne s’ était passé, alors que j’ ai l’ impression que quelqu’ un s’ amuse à jouer avec un marteau dans ma tête tellement je me pose des questions. Il marche à toute allure malgré la fatigue qu’ il doit éprouver tout comme nous, et avance, le visage fermé, muet. Je penserais avoir rêvé hier si nous n’ avions pas passé la nuit à veiller. Etan évite soigneusement mon regard, et je me vois mal aborder le sujet devant Zack.
Et puis... je ne sais toujours pas quoi penser.
Etan et moi…
Ce que ça m’ évoque, c’ est tout sauf de l’ amour. Les disputes à longueur de temps, des bagarres, même. Pour attirer mon attention ? C’ est n’ importe quoi... Bon, j’ ai toujours été la plus acharnée de nous deux, je le reconnais. C’ est moi qui commençais presque à chaque fois. Et pourquoi ? Malgré mes efforts, impossible de remonter jusqu’ au commencement de notre mésentente. Je me remémore les photos de Zack, Etan et moi, à Tréhignac, et mon rêve. Si, petits, nous étions amis, il a bien dû se passer quelque chose…
Est-ce qu’ il pourrait y avoir un lien avec le départ de Zack de la BGU ? Nous avions quoi… cinq-six ans, à ce moment, d’ après Maureen. Etan venait d’ arriver à la BGU après la mort de sa mère. Et on peut supposer que c’ est quelques semaines plus tard, peut-être même quelques jours seulement, que Zack et ses parents sont partis. A cause d’ une première trahison de Harl. Ça reste des suppositions, évidemment, mais ça se tient. Toute cette période reste totalement obscure pour moi. Mes parents ne m’ ont jamais parlé de Harl, Maureen, Zack, ni même de notre amitié avec Etan. Mais pourquoi ? Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?
Tout d’ un coup, je sens qu’ on me secoue par le bras.
- Regarde, me fait Zack en me désignant de menton la colline que nous venons de franchir.
Cinq silhouettes jaunes se détachent du ciel gris.
- J’ y crois pas, les chocobos nous ont suivi ?! je constate, les yeux écarquillés par la surprise.
- Ouais, et sur des kilomètres, incroyable, hein ? fait Zack, ravi.
- Si ça c’ est pas pour nous narguer, je bougonne.
En me retournant je croise le regard d’ Etan qui détourne le tête et se remet à observer nos poursuivants. Il va quand même falloir qu’ on parle. Je ne sais pas encore pour dire quoi, mais il va vraiment falloir qu’ on parle.
Le troupeau accélère et nous rattrape rapidement, se mettant à trottiner autour de nous, visiblement fiers d’ eux. Mais je ne peux pas m’ empêcher de sourire quand le plus jeune des chocobos vient poser sa tête contre ma main. Je le caresse et il se met à battre des ailes de contentement tout en gazouillant. Bess ne me croira jamais quand je lui dirait que j’ ai pu trouver un chocobo.
Nous avons compris le message, ils veulent bien nous escorter, mais pas davantage. Soit. C’ est plutôt drôle de les voir gambader autour de nous, et dieu sait que tout ce qui est drôle est le bienvenu en ce moment. Nous arrivons à un endroit où la terre se fait moins large, la mer gagnant du terrain sur l’ île. Les chocobos se sont mis à trotter joyeusement devant nous, les plumes ébouriffées par le vent comme pour nous ouvrir le passage. Si ce n’ était eux, l’ endroit semblerait complètement vide de vie. C’ est réconfortant de les avoir finalement.
- Un phare ! s’ exclame Zack en montrant un point devant nous.
Ce sol mot a pour effet de me réveiller sur le coup. Un phare ! oui, il y en avait bien un près de l’ orphelinat, à ma connaissance ! Nous touchons enfin au but ! Revigorés par cette bonne nouvelle, nous accélérons le pas.
L’ orphelinat… Son histoire, je la connais, comme tout le monde, plus ou moins, et plutôt moins même. C’ est là que mon père et celui d’ Etan, Selphie, Quistis, Irvine, Zell et tante Ellone ont grandi, avant que cette dernière ne soit obligée de partir pour se cacher. Un jour, une sorcière est arrivée à la recherche de quelqu’ un à qui transmettre ses pouvoirs, et pour protéger les enfants, c’ est Edéa qui les as pris. Mais à cause de ça c’ est elle qui est devenue maléfique, et les enfants qu’ elle élevait ne se sont retrouvés que bien des années plus tard, et pour l’ affronter.
Encore un endroit chargé d’ histoire… j’ ignore quel rôle exact il a joué dans les évènements auxquels mes parents ont pris part, mais cet orphelinat y est clairement associé et je trouve ça fascinant. Tout ce qui a trait à cette époque, mes parents semblaient vouloir l’ enfouir et ne plus jamais y repenser. Impossible de tirer quoi que ce soit d’ eux là dessus, ni même de quelque autre professeur que ce soit. Je sais ce que tout le monde sait, que les Seeds ont vaincu plusieurs sorcières qui menaçaient le monde. Mais quel lien avec cet endroit ? Y a-t-il eu des combats là où je me tiens en ce moment-même ? Et alors ? ça ne signifierait pas pour autant qu’ il soit maudit.
Nous parcourons un petit sentier pierreux en pente qui mène vers le bâtiment principal, laissant les chocobos derrière nous. Arrivés à quelques mètres de la porte – ou l’ endroit où elle s’ est vraisemblablement trouvée à une époque, vu le trou béant qui s’ y trouve – nous stoppons.
- On est vraiment au bon endroit ? je demande, dubitative.
Ce bâtiment présente l’ image même de la désolation. Les murs de pierre semblent prêts à tomber en poussière pour peu qu’ on s’ appuie un peu trop dessus, et la mousse, les mauvaises herbes et même de petits arbres ont pris possession des lieux, créant une véritable petite forêt vierge à l’ intérieur de la maison. Plusieurs murs se sont en partie effondrés, ainsi que le toit, par endroits ; et le vent passant par les ouvertures siffle d’ un air lugubre.
Je suis presque sûre que l’ orphelinat où mon père a grandi n’ a pas plus que cinquante ans. Il a du être bâti, quoi, peut-être une dizaine d’ années avant que mon père y soit, quand Cid et Edéa ont créé les Seeds. Et tout a été rénové il y a quelques années quand ils ont voulu rouvrir l’ orphelinat. Mais ces bâtiments devant nous sont aussi en ruines que s’ ils étaient millénaires.
- Ca ne peut quand même pas être ici ! je m’ exclame.
- Je ne vois pas ce que ça pourrait être d’ autre, dit Etan en se grattant la tête. On est arrivés au bout de l’ île il n’ y a rien d’ autre plus loin.
- Est-ce qu’ on rentre ? demande Zack.
- Ca ne coûte rien d’ y faire un tour, je soupire.
J’ enjambe un muret et je m’ engouffre à l’ intérieur. Malgré le fait que plusieurs murs se soient effondrés et que le vent frappe violemment en dehors du bâtiment, il règne une chaleur étouffante à l’ intérieur, et l’ humidité du lieu remonte désagréablement jusqu’ au nez. On ne pourra jamais rester dans un endroit pareil. Le toit menace de tomber à tout moment à en juger par les tuiles crissant sous nos pieds tandis que nous traversons la maison, et il y a à peine de la place pour poser le pied sur le sol. Les quelques meubles qui n’ ont pas été rongés par l’ humidité tiennent à peine debout. Des poupées de chiffons, des vêtements d’ enfants, des tasses, des assiettes brisées. Les objets du quotidien traînant sur le sol montrent que l’ endroit a été quitté dans une grande agitation. Qu’ est-ce qui a bien pu réellement pousser ces gens à partir, à abandonner l’ endroit, puis a penser l’ île ensorcelée ?
Alors que je marche de pièce en pièce à la recherche de quelque chose qui pourrait nous être utile, j’ ai à nouveau la conscience étouffante des évènements qui ont eu lieu ici. J’ ai l’ impression d’ entendre des pleurs, des cris. La solitude, la tristesse et la peur. Je peux dire ce que je voudrais, je sens bien que nous ne sommes pas n’ importe où.
Nous enjambons les tas de pierre, écartant les plantes qui ont envahit les chambres ; ça a dû être un très bel endroit autrefois : sous la mousse, on reconnaît encore ce qui a du être de jolies colonnes de pierre, et les sculptures des meubles sont toujours visibles, même s’ ils sont maintenant gonflés par l’ humidité. Le jardin à l’ extérieur, sans toutes ces mauvaises herbes et ces plantes grimpantes devait être ravissant lui aussi. Mais il nous faut bientôt nous rendre à l’ évidence : il n’ y a plus rien à tirer de cet endroit. Aucun moyen de communication, pas de nourriture ( on s’ en doutait, certes… ), pas de couvertures…
Les chocobos semblent s’ être évanouis dans la nature. Ils nous avaient accompagnés à peu près jusqu’ à l’ entrée du chemin puis étaient partis explorer les lieux. Il n’ y a plus la moindre trace d’ eux, ils ont du retourner à leur forêt.
Tandis que nous redescendons vers la plage, nos pas nous mènent vers le phare qui se trouve au bout de la jetée. Il est à peu près aussi en mauvais état que l’ orphelinat et ne semble plus tenir debout que par magie ; il n’ est probablement plus en état de marche depuis longtemps mais ça ne coûte rien de vérifier, il nous serait extrêmement utile si nous pouvions nous en servir pour avertir de notre présence. Maintenant, évidemment, savoir qui nous avertirions est une autre question…
La porte s’ ouvre plutôt facilement, mais une fois à l’ intérieur, l’ escalier de bois qui mène au sommet n’ a pas l’ air très stable. Comme je suis la plus légère de nous trois, nous décidons que je monterai vérifier s’ il y a moyen de faire fonctionner tout ça.
J’ arrive à me hisser malgré les marches manquantes, obligée parfois de prendre carrément appui sur les murs pour sauter jusqu’ aux marches suivantes, au risque de tout faire s’ écrouler. J’ arrive enfin au sommet et je marche avec prudence sur le sol branlant jusqu’ à l’ espèce d’ ampoule géante qui se trouve au centre de la petite pièce. Les vitres qui couvraient les ouvertures panoramiques de la salle ont toutes disparu, il ne reste plus que quelques éclats encore accrochés aux fenêtres, et les embruns remontent jusqu’ ici. L’ ampoule au centre de la pièce est brisée, elle aussi. Est-ce qu’ elle pourrait quand même fonctionner ? Comment est-ce qu’ on actionne ce truc ? Après avoir rapidement fouillé la pièce des yeux j’ aperçois une manette rouillée dans un coin. Je ne vois que ça.
- Alors, il y a quelque chose ? me crie Etan d’ en bas.
- Une manette ! je fais en essayant de l’ abaisser.
Elle refuse de bouger. Je réessaie en y mettant tout mon poids, mais rien à faire.
- Ca a l’ air coincé ! je crie a nouveau.
- J’ arrive, fait Etan.
Il me rejoint pour m’ aider, faisant horriblement craquer les escaliers au passage ; après plusieurs minutes d’ efforts conjugués, nous parvenons enfin à abaisser la manette. Mais le phare ne s’ allume toujours pas. Pas la moindre petite étincelle ou ronflement.
- Ca sert à rien, dit Etan. On ferait mieux de descendre d’ ici avant que ça s’ effondre. De toute façon l’ ampoule est cassée, et avec toute cette humidité, c’ est pas étonnant.
C’ était notre seul espoir de nous faire remarquer. Maintenant on fait quoi ? On attend tranquillement en comptant sur notre chance légendaire ?
- Hey, ça va ? demande Etan en se retournant vers moi en voyant que je ne bougeais pas.
- Oui, oui…
Il s’ arrête et revient vers moi.
- On trouvera une autre solution. Promis.
Si seulement, il pouvait arrêter d’ être aussi… rassurant, conciliant, attentionné… J’ arrive à peine à le regarder dans les yeux depuis hier, c’ est complètement stupide. On en a toujours pas reparlé, et j’ ai l’ impression qu’ il me regarde comme s’ il attendait que je dise quelque chose à propos de tout ça. Je sais que ce serait le moment d’ en reparler. Mais il n’ y a rien qui vient. C’ est toujours aussi flou. Ça fait presque mal.
- Viens, je t’ aide a descendre, dit-il finalement.
- C’ est pas la peine, je fais précipitamment en passant devant pour sauter les marches.
Il me suit en silence et nous rejoignons Zack.
- Alors ?
- Rien. Ça ne marche plus.
- Et même si c’ était le cas, on ne sait pas si ça aurait été une bonne idée de l’ utiliser, de toute façon, fait Etan, sûrement pour nous consoler.
- Ca aurait toujours été mieux que de rester ici à jouer les Robinson Crusoé, je rétorque malgré moi. Même si ce sont des ennemis qui aperçoivent la lumière, au moins ils amèneront des vaisseaux et on aura une chance de partir d’ ici ; dans le meilleur des cas, ça aurait été des alliés de la BGU.
- Sauf si les ennemis nous règlent notre compte avant que nous ne puissions tenter quoi que ce soit. De toute façon on n’ aura pas à se poser la question, tranche Etan en regardant vers le sommet du phare.
- Alors, qu’ est-ce qu’ on va faire ? demande Zack, à nouveau inquiet.
- Déjà, trouver un endroit où dormir, je dis en lui prenant le bras tout en souriant pour le rassurer.
Je passe également mon bras sous celui d’ Etan qui sursaute et je les tire vers la plage côté sud de l’ île, le seul endroit qui ne soit pas balayé par les rafales de vent, où nous avions laissé nos sacs. Ce n’ est pas le moment de s’ apitoyer, et inutile de faire paniquer Zack pour le moment en lui disant que nous n’ avons pas la moindre idée de ce qui va nous arriver. C’ est bien simple : nous ne pouvons rien faire de plus, ça ne dépend plus de nous. Nous sommes arrivés à l’ endroit où nous sommes le plus susceptibles d’ être découverts, mais si personne ne passe, nous ne pourrons certainement pas rentrer à la nage…
Nous sommes assis sur la plage, face à la mer, pour regarder le jour qui commence à décliner. Etan a allumé un petit feu autour duquel nous avons pris place, et Zack prépare des cannes à pêche avec des bois de bois et des fils qu’ il a réussi à trouver. Les étoiles apparaissent peu à peu au dessus de nous tandis que le ciel prend des teintes orangées. C’ est tout simplement magnifique.
Je n’ arrête pas de m’ imaginer ce qui a pu avoir lieu sur cette île. Si ça se trouve, Papa, Quistis, Zell et les autres jouaient ici-même dans le sable. Quelle enfance a pu avoir mon père dans cet orphelinat ? Et pourquoi Laguna n’ était-il pas là pour lui ? Et puis, pourquoi est-ce que j’ en suis à me poser de telles questions sur ma propre famille, c’ est dingue… J’ ai toujours détesté cette tendance qu’ ils avaient tous à élucider mes questions – tout à fait légitimes pourtant, il me semble – en m’ envoyant à une tache quelconque, en me proposant à un gâteau – quand ce n’ était pas un sermon sur le passé qu’ on doit laisser de côté pour se concentrer sur l’ avenir. Je suis sûre que ça aurait résolu beaucoup de nos problèmes actuels, pourtant. Cet endroit n’ est pas commun, je le sens bien. Il s’ est passé des choses importantes ici, j’ en ai la conviction, mais on a voulu me laisser en dehors de ça, et maintenant, on se retrouve coincés…
Zack laisse errer son regard sur la mer sans parvenir à chasser cet air anxieux de son visage. Pas besoin d’ être un grand génie pour comprendre la situation, il doit bien sentir qu’ on est dans une sacrée galère. Au moins, ce n’ est pas la nourriture qui manque : les poissons ont l’ air autrement meilleurs ici que ceux complètement rachitiques que nous parvenions à peine à attraper dans l’ ancienne cachette de Seifer. C’est plutôt une bonne nouvelle si on songe qu’ on risque d’ avoir à passer un bon moment ici… J’ aime cet endroit, en fait. Le calme, la sérénité, la beauté qui règnent ici sont tout simplement merveilleux… dommage que tout soit tellement délabré et que l’île soit aussi isolée.
Pouvoir juste fermer les yeux et penser ; j’ ai l’ impression que ça fait une éternité que ça ne m’ a plus été possible. Et je n’ en ai jamais eu autant besoin que maintenant. Ça fait plus de deux semaines que notre vie a complètement changé. Seize nuits passées dehors, livrés à nous mêmes, perdus, entourés d’ ennemis innombrables… et tout ce temps là, il n’ y a vraiment eu qu’ Etan et moi.
Etan.
Entre tout ce dont je me rappelle de ces dernières années avec lui, ce que j’ ai appris depuis que nous avons quitté la BGU, et ce qui s’ est passé la nuit dernière, je me demande comment il est possible d’ avoir autant vécu avec quelqu’ un sans vraiment le connaître. On a toujours été liés, par l’ histoire même de nos familles, c’ est indéniable. Et pourtant, ça a créé tellement de malentendus. Comment est-ce que j’ ai pu être comme tous les gens, à ne pas être capable de faire la différence entre la réalité et les superstitions ridicules, ces croyances entre une quelconque ressemblance entre Etan et son père, comme si le passé pouvait se reproduire à cause de ce simple lien, alors que je sais pertinemment que c’ est complètement ridicule ? comment est-ce que j’ ai pu croire des choses pareilles, moi aussi ?
Le sable crisse. C’ est Etan qui s’ approche et s’ assied à côté de moi, pendant que Zack, les pieds dans l’ eau, cherche notre dîner.
- Ecoute… hier soir, dans la forêt… j’ aurais pas dû te dire que… enfin, ce que je t’ ai dit. Je suis désolé. J’ ai pas dit ça pour… je voulais pas te mettre mal à l’ aise ou que ça complique les choses… Je sais bien que ça a du te paraître complètement dingue, et je regrette de te l’ avoir dit. J’ ai tout gaché, je sais. Mais…
Il se gratte la tête, ne sachant plus comment continuer. Eva, dit quelque chose… trouve quelque chose…
- Bon, on devrait peut-être aller aider Zack, dit Etan en se relevant. Sinon on est pas près de…
- Attends, je fais presque malgré moi en le rattrapant par le bras pour l’ obliger à rester.
***
- Moi, je peux te le dire, pourquoi il est parti, ton Zack, fit le garçon avec un sourire mauvais.
La petite fille leva ses yeux pleins de larmes vers lui. Elle était assise, seule, dans la cour des petits, et un plus grand s’ était approchée d’ elle pour lui faire face.
- Qu’ est-ce que tu racontes ?
- C’ est à cause du nouveau, le fils de Seifer Almasy, affirma le garçon en croisant les bras. T’ as pas compris ? il arrive, et tout d’ un coup, Zack et son papa et sa maman doivent partir. C’ est à cause du fils du traître. Mon papa savait que ça arriverait, il avait dit qu’ il y aurait plein de problèmes à cause de lui et voilà. Le fils du traître va tout faire pour se débarrasser de tout le monde ici, comme son papa.
- Tu dis n’ importe quoi, cria la petite fille. Etan, il est pas…
- Et bientôt, il voudra prendre TA place.
- Quoi ?
- Il se débarrasse d’ abord de Zack, continua le garçon avec une lenteur délibérée. C’ était ton meilleur copain, non ? il était tout seul et hop, il prend sa place. Il n’ a plus de parents ? Ben la prochaine fois, c’ est TA place qu’ il prendra. Regarde, tu le vois avec ton papa, là-bas ?
La gorge sèche, la petite tourna la tête vers le couloir au fond de la cour où on voyait de directeur de la BGU et le petit Etan marcher côte à côte et discuter.
- T’ as vu ? Il a plus de papa alors il va prendre le tien. Et après, quand il fera comme son vrai papa : il essaiera de tuer le tien, puis tout le monde à la BGU. On le sait tous, mais ton papa veut écouter personne et un jour…
Perdue, la petite fille ne pouvait détacher ses yeux de son père et du petit garçon blond qui marchaient plus loin. Depuis quand son père ne l’ avait-il plus emmenée se promener en la tenant ainsi par la main ? depuis qu’ Etan était arrivé à la BGU, c’ était vrai qu’ il paraissait plus renfermé, plus distant et qu’ il passait beaucoup de temps avec lui. Sa mère était nerveuse, et la petite s’ apercevait bien que les conversations cessaient dès qu’ elle arrivait. Mais ça ne pouvait tout même pas être vrai…
- Tu verras quand tes parents voudront plus de toi… avait perfidement conclu le garçon le garçon en s’ éloignant.
***
Je me redresse en sursaut, avec l’ impression de manquer d’ air, comme si je sortais ma tête de l’ eau. Blanc comme un linge, Etan me tient par le bras pour m’ empêcher de tomber en avant tandis que je tente de retrouver mon souffle.
- Qu’ est-ce qui s’ est passé ?? qu’ est-ce qui t’ arrive ? Eva ??
Haletante, je porte la main à mon visage et je me rends compte que mes joues ruissellent de larmes.
- Eva ??
- Ca va, ça va, je souffle machinalement.
Au même moment, une vague de nausée me submerge et je dois m’ éloigner.
- Tu en es sûre ? demande Etan en me rejoignant après que j’ ai fini de cracher mes boyaux.
- Non…
- Qu’ est-ce qui s’ est passé ?
Il me prend le bras pour m’ aider à me relever et nous retournons à la lumière.
- Je sais pas… j’ ai eu… une espèce de flash.
- Une vision ?
- Non, pas une vision. Pourquoi est-ce que tu penses que ce serait ça ? faudrait que je sois une sorcière…
- J’ en sais rien, tu me parles de flashs…
- Ce n’ était pas une « vision » !
Il me regarde l’ air inquiet.
- Quand tu m’ as attrapé le bras et que tu as sursauté, ça m’ a fait penser à Kassandra quand elle a des visions, même si ce n’ est pas aussi violent pour elle.
- Je te répète que…
- Ne t’ énerve pas ! je te dis ce que j’ ai vu, tu as réagi comme Kassandra… et puis, ta mère en était une, de sorcière ; en quoi est-ce que ce serait si extraordinaire qu’ elle t’ ait transmis une partie de ses pouvoirs ? Pour ce qu’ on en sait… Eva, il y a les rêves que tu fais, tu ne peux pas nier que…
Deux larmes coulent à nouveau malgré moi et je sens mon sang se glacer. Mes rêves qui ressemblaient tellement à une réminiscence du passé… et ces impressions quand je touchais des objets à l’ histoire particulière… Et s’ il avait raison ?
- Mais ma mère n’ a jamais eu aucune sorte de vision…
Etan hausse les épaules.
- Je t’ explique juste que c’ est une possibilité… C’ est un truc dont je voulais te parler quand on était chez Harl et Maureen mais on avait été interrompus à ce moment. Le rêve que tu as fait ce jour là… ça s’ apparentait pas mal à une prémonition, il me semble.
- C’ est impossible… je proteste faiblement.
Etan jette un coup d’ œil vers Zack qui ne s’ est rendu compte de rien, toujours concentré sur sa ligne.
- Qu’ est-ce que tu as vu?
- J’ ai fait… une sorte de rêve…
Ce n’ était pas un rêve. C’ était un souvenir, encore une fois, je le sais bien. Ni une hallucination, le fruit de mon imagination, ni un rêve. J’ ai la conviction que ça s’ est vraiment produit. Et c’ est la réponse à mes questions. Voilà pourquoi je ne me rappelle pas la raison pour laquelle je le détestais. Parce que c’ était une idée de petite fille manipulée. Cette fois les larmes me submergent.
- Ecoute, c’est pas grave si tu es une so… s’ affole Etan.
- Je suis désolée… je hoquète.
- Quoi ? demande-t-il, perdu.
- Tout est-ce de ma faute… ça a toujours été ma faute.
- Mais qu’ est-ce que tu racontes ? écoute, calme toi… Qu’ est-ce que tu as vu ?
Réticente, je lui raconte ce que j’ ai vu. A partir de là, les conclusions ne sont pas bien difficiles à tirer… C’ est lui-même qui affirme depuis le début que ce sont des visions que j’ ai, et qu’ il faut les prendre au sérieux.
Il passe sa main dans mon dos pour me réconforter.
- Ecoute, c’ est pas grave. C’ est du passé, te mets pas dans un état pareil…
Le bruit a fini par attirer l’ attention de Zack qui nous rejoint en courant.
- Qu’ est-ce qui ne va pas. Il s’ est passé quelque chose ? demande-t-il, inquiet.
- Non, c’ est rien… je fais en essayant de me calmer.
- C’ est juste que… euh… un problème qu’ on vient de régler. Ça va mieux maintenant.
Zack a l’ air rassuré. Heureusement qu’ il n’ insiste pas, je me vois mal aborder mon nouvel état de sorcière devant qui que ce soit. Moi-même je ne me l’ explique pas. Depuis que nous avons été obligés de quitter la BGU, j’ ai eu plusieurs petites visions, mais ça n’ avait rien à voir avec ce qui s’ est passé tout à l’ heure. Est-ce que ça pourrait dû au lien de cet endroit avec les sorcières ? ça aurait réveillé cette part de moi ?
Je m’ aperçois alors que la nuit est tout à fait tombée, et que pendant que nous discutions, Zack a pêché plusieurs gros poissons qu’ il se met en devoir de nous préparer. Pour détendre l’ atmosphère, les garçons discutent de tout et n’ importe quoi et racontent des bêtises plus grosses qu’ eux, je finis même par rire. Aucun d’ entre nous n’ a la moindre envie de dormir. Outre le fait que nous risquons d’ avoir à passer un bon moment ici où nous n’ aurons rien de mieux à faire, Etan a l’ air véritablement plus léger, et dans un sens, moi aussi. Nous savons enfin ce qui s’ est passé. Même si c’ était une raison stupide, même si ça n’ arrange rien de la connaître. Même si ça me tue d’ avoir compris que c’ était ma faute, parce que, petite et perdue, je m’ étais laissée entraîner par les autres à cause de mes peurs. Ça aurait rendu tellement de choses différentes si je n’ avais pas été aussi stupide…
Tout à coup, un éclair fend le ciel, nous projetant en pleine lumière et nous aveuglant momentanément. Nous protégeant les yeux, nous essayons de repérer la source de lumière.
- L… le phare ! balbutie Zack en se tournant vers Etan et moi quand la lumière se déplace lentement. Je… je croyais qu’ il ne fonctionnait pas ?
- C’ était bien le cas, fait Etan, les sourcils froncés.
Nous nous relevons d’ un bond et nous courons vers le phare. C’ est bien de là que vient la lumière, il n’ y a aucun doute.
- L’ ampoule était cassée, et la seule manette qui aurait pu l’ actionner n’ a rien déclenché… c’ est complètement dingue, fait Etan en se grattant la tête. Et il aurait fallu que quelqu’ un l’ actionne et il n’ y a que nous.
- C’ est peut - être automatisé et ça ne marche que de nuit ? suggère Zack.
- Il va faire jour dans moins d’ une heure, ça n’ a aucun sens, je réplique en regardant le ciel qui s’ éclaircit légèrement. Même s’ il était programmé – et encore en état d’ assurer ce programme – il aurait été allumé toute la nuit, pas seulement alors qu’ il est sur le point de faire jour.
Soudain, une grande sirène se fait entendre, nous figeant sur place.
- C’ était quoi ? demande inutilement Zack, les yeux exorbités.
- Ca venait de là je crois, répond Etan en se tournant vers la mer.
Le soleil se lève dans notre dos et le paysage face à nous est d’ un noir d’ encre, mélangeant la mer et le ciel. Impossible de distinguer quoi que ce soit, tant que la lumière du phare n’ arrive pas jusque là.
- Peut-être qu’ on a… juste rêvé… hasarde Zack.
Non. Il y a quelque chose qui bouge devant. J’ aperçois une sorte de miroitement qui disparaît de temps à autre et semble se déplacer.
- Dis pas de b… commence Etan en s’ approchant de l’ eau.
- Attendez, je vois quelque chose ! je crie.
Et, sans prévenir, la mer, qui se trouvait une seconde plus tôt à cinq mètres de nous vient nous battre les chevilles.
- Quelque chose approche… je réalise, glacée jusqu’ à la moelle.
- On recule ! hurle Etan. VITE !
Au même moment, un rayon du phare vient éclairer de plein fouet la mer. La vision que nous avons alors nous cloue sur place.
Un bateau !
Un bateau gigantesque approche de la plage, juste en face de nous.
Ou plus précisément : droit sur nous.
Pétrifiée, je n’ arrive pas à en détacher mes yeux alors qu’ il continue d’ avancer. Etan m’ attrape le bras pour me traîner en arrière tandis que des vaisseaux traversent le ciel et lâchent des salves de lasers dans notre direction. Stupéfaite, je bute sur un rocher en marchant à reculons et Etan trébuche dans le sable, entraîné par ma chute. Les vaisseaux s’ approchent. Les yeux fermés j’ attends le choc mais le bouclier de Sheba apparaît au dessus de nos têtes, nous protégeant des tirs. Etan en profite pour m’ aider à me relever et nous mettons à courir comme des dératés à la suite de Zack.
- On ne sera pas à l’ abri là-dedans, crie Zack tandis que nous nous ruons vers le bâtiment.
- Je sais, répond Etan, mais on sera cachés au moins.
- Merde, mais c’ est qui cette fois ?? je hurle pour couvrir les bruits de déflagrations provenant de la plage.
- Tu veux peut-être te proposer pour aller demander ?
Nous courons à en perdre haleine pour traverser l’ orphelinat et en ,le rattrapant, nous manquons de heurter de plein fouet Zack, figé face à l’ autre coté de l’ océan.
- C’ est pas le moment d’ admi…
Je reste bouche bée en apercevant ce qu’ était en train de fixer Zack.
La BGU.
Ma main agrippe la manche d’ Etan.
- Dis-moi que j’ ai pas une hallucination, je murmure, n’ osant pas y croire.
- Si c’ est le cas, on est deux, répond-t-il d’ une voix tout juste audible.
Ils sont là ! Ils nous ont trouvés !
- On est encerclés, marmonne Zack. On est fichus…
- Non, Zack, fantastique ! je ris, hystérique. C’ est notre fac !
- Votre quoi ? demande Zack, ahuri. Ça, c’est une fac ?? Vous voulez dire… Ce vaisseau, là ?
Au même moment, un tir atterrit tout près et fait voler en éclat un des murs qui se trouvait à notre droite.
- On va remettre les explications à plus tard, si ça vous dérange pas, tousse Etan.
- Ca venait d’ où ? demande Zack en chassant le nuage de poussière qui nous a envahi.
- On s’ en fout ! je crois que c’est pas une si bonne idée que ça de rester cachés, finalement, dit Etan. Il faut qu’ ils nous voient ; la BGU, je veux dire.
Nous courons sur la plage en direction de la fac en faisant de grands signes des bras et en hurlant.
Il n’ y a pas la moindre chance pour qu’ ils nous repèrent de là-haut.
Les vaisseaux continuent à passer en sifflant au dessus de nos têtes et se dirigent vers la BGU en la prenant pour cible ; en les observant plus attentivement maintenant que le jour est levé, je me rends compte qu’ ils portent les couleurs d’ Esthar.
Evidemment. Zukerdint disait vrai : même si nous l’ avons détruit lui, il n’ est pas tout Esthar. On dirait qu’ on a réussi à se retrouver en plein milieu d’ une bataille entre la BGU et eux sans le faire exprès.
- Il faut quand même faire quelque chose, on peut pas rester là, dit Zack d’ une voix angoissée. On sera coincés entre les deux pendant qu’ ils vont se taper dessus si ils ne se rendent pas compte qu’ on est là.
Des grincements provenant de la plage que nous avons quittée nous parviennent. Nous courons faire le tour de la maison voir ce qui s’ y passe. Le bateau est arrivé tout près de la plage et on dirait qu’ il s’ apprête à lâcher les soldats. C’ est une bonne nouvelle. Au moins, on peut se défendre contre des ennemis qui se battent sur le plancher des vaches, le problème, c’ est les vaisseaux qui les accompagnent pour les couvrir.
Tout à coup Etan se raidit à côté de moi et se redresse d’ un bond. Je dois le rattraper par sa veste pour l’ empêcher de courir dans leur direction.
- Mais t’ es dingue, qu’ est-ce qu’ il te prend ?? je hurle.
- Ma gunblade ! je l’ ai oubliée, elle est restée sur la plage !
- Tu rigoles j’ espère ?!
- Je dois y aller !
- Ce n’ est qu’ un bout de ferraille, Etan !! Revient sur terre, c’ est du suicide ! Les soldats y sont probablement déjà !
- Je ne peux pas la laisser, c’ était celle de mon père!
Celle de son père. Bien entendu. J’ aurais du me douter d’ un truc du genre. C’ est pas vrai… Comme si on avait pas assez de problèmes !
Il est comme fou. Quoi que je dise, ça ne l’ empêchera pas d’ essayer d’ aller chercher sa stupide gunblade, et il se fera tuer pour essayer de la reprendre. Je comprends mieux pourquoi il y tient autant, mais à quoi ça l’ avancera s’ il se fait réduire en charpie avant de l’ avoir récupérée ? il n’ a pas le moindre moyen de se défendre sans elle : pas de magie, un G-Force inutilisable, et des talents aux combat à mains nues magnifiquement inutiles face à une compagnie de soldats armés de blasters longue portée.
- Je vais y aller, je grogne.
- Non, pas question Eva, c’ est mon…
- Si tu y vas, je devrais te suivre pour te protéger, que tu le veuilles ou non ; alors si j’ y vais toute seule, ça reviendra au même et tu resteras avec Zack.
- C’ est trop dangereux, et si jamais ils…
- Et toi, tu comptais faire comment, au juste ?? je m’ énerve. Tu la veux oui ou non, ton arme ?
- Il est hors de question que tu y ailles.
- C’ est à prendre ou à laisser mon vieux, parce que je te garantis que tu n’ iras pas non plus ! On peut aussi tous rester ici et laisser l’ arme là où elle est !
- C’ était celle de mon père, je peux pas, Eva, comprends-moi…
- Ah, mais je comprends parfaitement ! et je pense toujours que ça ne vaut pas le coup que tu te fasses réduire en bouillie pour ça alors qu’ on aura besoin de toi quand les soldats arriveront. Alors maintenant j’ y vais parce que plus je perds de temps à discuter de ça avec toi, plus les soldats ont le temps de s’ approcher de nous.
- Eva…
- Pose tes fesses là et ferme-la ! Moi, j’ ai mon G-Force, pour me défendre. Ils ne me verront même pas. De toute façon j’ ai toujours été plus rapide que toi, je serai vite de retour.
Et avant qu’ ils n’ aient pu ajouter quoi que ce soit, je m’ éclipse et cours en direction de la plage. Y’ avait bien longtemps que j’ avais pas fait quelque chose d’ aussi insensé…
***
note de l’ auteur :
Je sais : tout ce temps là et même pas fichue de finir son histoire ! ça devait être le dernier chapitre, mais il m’ a fallu me rendre à l’ évidence : même en enlevant tout ce qui me paraissait le moins utile, il y avait toujours beaucoup trop de choses. Il y aura donc un chapitre XXI!
Comme vous avez pu le constater j’ ai eu énormément de problèmes pour ce chapitre ; beaucoup de blabla ( et encore, j’ en ai enlevé un paquet ! notamment une 2e petite scène avec les chocobos qui devaient réapparaître et les suivre jusqu’ à l’ orphelinat mais ça n’ apportait rien de plus à l’ histoire alors zouh, à la corbeille les chocobos) ; beaucoup de questionnements d’ Eva, aussi, et pourtant là encore j’ ai sacrément raccourci, mais surtout parce que je voulais pas que ça devienne trop mélo et que c’ était bien parti pour ! l’ horreur… au départ, j’ avais prévu qu’ Eva serait partie s’ isoler pour réfléchir au « problème Etan » jusqu’ à ce que celui-ci vienne la chercher ; mais au final, j’ arrivais pas à lui faire avoir de réflexion claire et ça piétinait beaucoup trop alors j’ ai modifié. J’ ai tenté d’ apporter une petite solution à la question qu’ elle se posait, à savoir : pourquoi elle le détestait autant depuis toujours ; j’ avais essayé de montrer plus ou moins ça depuis le début mais cette fois on en est sûrs ! en relisant, je trouve que c’ est abordé de manière maladroite, mais j’ espère que ça prendra plus son sens au chapitre suivant ( qui cette fois sera vraiment le dernier ! lol ).
Donc voilà, Eva est une sorcière ! Ha haaaaaa… Forcément, les rêves que j’ ai inclus de temps en temps, ils n’ étaient pas là pour faire beau, c’ étaient de vraies indications, pour commencer à montrer ce pouvoir qu’ elle a ; Eva est jeune, ça se manifeste juste par les rêves ( en tout cas pour le moment, qui sait… héhé :p ) d’ évènements passés. Voilà, je crois que c’ est tout pour aujourd’ hui ! Il me reste encore un bon bout à écrire pour le chapitre final, ça risque de pas mal bouger ! ^^
Je vous souhaite de bonnes fêtes un peu en avance, et encore merci pour votre patience ( en même temps, si vous voulez la suite, on peut pas dire que vous ayez vraiment le choix, je sais… gomeeeeeen ) ; n’ hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé du chapitre !
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Tu fais de moi la fille la plus heureuse ce matin ! J'ai adoré ce chapitre. Le suspens autour des chocobos était vraiment génial ! Puis par la suite, l'arrivée à l'orphelinat et l'attaque de la BGU et des esthariens est rééllement sublime ! Toutes mes félicitations pour ce chapitre tant attendu !
Je suis (pratiquement) sure que Eva va se rendre compte qu'elle aussi aime Etan et que peut-être à la fin, dans un élan de joie va l'embrasser sans rééllement sans rendre compte, non ?
Toujours des petites erreurs, par exemple, lors du flash back d'Eva tu mets deux fois le graçon, il y en d'auytres mais c'est celle qui m'a le plus frappé. Mais ces petites erreurs ne sont pas bien grave car le tout reste compréhensible facilement.
Je suis (pratiquement) sure que Eva va se rendre compte qu'elle aussi aime Etan et que peut-être à la fin, dans un élan de joie va l'embrasser sans rééllement sans rendre compte, non ?
Toujours des petites erreurs, par exemple, lors du flash back d'Eva tu mets deux fois le graçon, il y en d'auytres mais c'est celle qui m'a le plus frappé. Mais ces petites erreurs ne sont pas bien grave car le tout reste compréhensible facilement.
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Ah !!!!!!!!!!!!
Mais c'est horrible ça ! Tu nous fait encore attendre avant le dénouement final ? Bouhouhou ! Snif...snif...
Bon trêve de plaisenterie, parlons de ce 20ème chapitre.
Bah comme tu l'a dit pas mal de blabla, mais bon il est nécessaire. C'était sûr qu'Eva était une sorcière (bah après tout sa mère en est une...).
Je trouve que tu as bien géré l'origine de la haine d'Eva pour Etan...même si le "méchant garçon" aurait pu être un groupe plutôt.
Sinon comment va réagir Eva pour les nouveaux sentiments d'Etan (y a pas vraiment de réponse dans ce chapitre...) ? Disons que pour le moment ils ont une relation beaucoup plus fraternelle qu'autre chose...
Enfin sinon pas mal l'apparition subite de la BGU lol.
Juste une chose tout de même, la notion du temps est assez peu représentée durant la dernière nuit sur la plage. On a l'impression que lorsque Etan et Eva discute (puis le "flash" d'Eva), il vient "juste" de faire nuit (aux alentours de 23h00 quoi...). Puis d'un coup on nous annonce que le soleil va se levé...c'est un peu bizarre...
Voila à part ça ben toujours un peu les mêmes erreurs que ce que j'avais dit......mais on s'en fout parce que vraiment, qu'est-ce qu'on se régale !
Mais c'est horrible ça ! Tu nous fait encore attendre avant le dénouement final ? Bouhouhou ! Snif...snif...
Bon trêve de plaisenterie, parlons de ce 20ème chapitre.
Bah comme tu l'a dit pas mal de blabla, mais bon il est nécessaire. C'était sûr qu'Eva était une sorcière (bah après tout sa mère en est une...).
Je trouve que tu as bien géré l'origine de la haine d'Eva pour Etan...même si le "méchant garçon" aurait pu être un groupe plutôt.
Sinon comment va réagir Eva pour les nouveaux sentiments d'Etan (y a pas vraiment de réponse dans ce chapitre...) ? Disons que pour le moment ils ont une relation beaucoup plus fraternelle qu'autre chose...
Enfin sinon pas mal l'apparition subite de la BGU lol.
Juste une chose tout de même, la notion du temps est assez peu représentée durant la dernière nuit sur la plage. On a l'impression que lorsque Etan et Eva discute (puis le "flash" d'Eva), il vient "juste" de faire nuit (aux alentours de 23h00 quoi...). Puis d'un coup on nous annonce que le soleil va se levé...c'est un peu bizarre...
Voila à part ça ben toujours un peu les mêmes erreurs que ce que j'avais dit......mais on s'en fout parce que vraiment, qu'est-ce qu'on se régale !
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merci pour les erreurs que tu as signalées; je corrigerai dès que possible ^^ désolée, j' ai beau me relire, y' a rien à faire !Toujours des petites erreurs, par exemple, lors du flash back d'Eva tu mets deux fois le graçon, il y en d'auytres mais c'est celle qui m'a le plus frappé. Mais ces petites erreurs ne sont pas bien grave car le tout reste compréhensible facilement.
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Bah comme tu l'a dit pas mal de blabla, mais bon il est nécessaire. C'était sûr qu'Eva était une sorcière (bah après tout sa mère en est une...).
Je trouve que tu as bien géré l'origine de la haine d'Eva pour Etan...même si le "méchant garçon" aurait pu être un groupe plutôt.
Sinon comment va réagir Eva pour les nouveaux sentiments d'Etan (y a pas vraiment de réponse dans ce chapitre...) ? Disons que pour le moment ils ont une relation beaucoup plus fraternelle qu'autre chose...
Enfin sinon pas mal l'apparition subite de la BGU lol.
Juste une chose tout de même, la notion du temps est assez peu représentée durant la dernière nuit sur la plage. On a l'impression que lorsque Etan et Eva discute (puis le "flash" d'Eva), il vient "juste" de faire nuit (aux alentours de 23h00 quoi...). Puis d'un coup on nous annonce que le soleil va se levé...c'est un peu bizarre...
alors, tu te doutais qu' Eva étais une sorcière :p cool
concernant le " méchant " garçon, j' ai essayé de montrer que si c' était qu' un seul garçon qui lui parlait à ce moment-là, c' était ce que tout le monde pensait : dans les rêves précédents, y' avait tout un groupe d' enfants, et celui-ci répète ce qu' il a entendu dire par son père...
alors oui, y' a le problème de la notion du temps XD en relisant je vois que c' est pas du tout bien géré lol je trouverai un moyen de corriger aussi ; en fait, dans ma tête, Eva passe toute la nuit à y réfléchir, mais ce qui pose problème c' est le fait que Zack pêche à côté... pendant des heures... lol faudra revoir ça donc en tout cas merci pour les commentaires ^^
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Mais on adore ta fic c'est pour ça qu'on mets des comms.
Non, mais c'est vrai que tu fais quelques petites erreurs, mais de petites riquiquis qui n'ont pratiquement aucune importance par rapprot à l'attention que nous mettons, nous, tes fans, à lire ta fic !
_________________
On n'est pas sur un blog ! c_c
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J'ai le coeur qui bat la chamade!! y a pas t'es trop douée pour les histoires! ^^ moi comme la co*** que je suis je croyais que c'etait ondine qui attaqué... Etan et Eva vont faire un beau couple c'est sur!
t'es quand meme pas gentille de nous laisser sur notre faim!! ... A quand le dernier chapitre si attendu?....
t'es quand meme pas gentille de nous laisser sur notre faim!! ... A quand le dernier chapitre si attendu?....
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Et bien... que dire ?
YES! lol je suis vraiment ravie par ce chapitre ! Le "blabla" comme tu l'appelles me parait tout à fait justifié et les personnages sont toujours aussi géniaux (j'adore le coté "doux comme un agneau" d'étan, ca lui va bien !lol) et j'attend donc le prochain (et dernier cette fois ?) chapitre avec impatience !
Kissouille
Ho et bonne année !
YES! lol je suis vraiment ravie par ce chapitre ! Le "blabla" comme tu l'appelles me parait tout à fait justifié et les personnages sont toujours aussi géniaux (j'adore le coté "doux comme un agneau" d'étan, ca lui va bien !lol) et j'attend donc le prochain (et dernier cette fois ?) chapitre avec impatience !
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Le feu et la glace
Salut !!!
Je viens de lire ta fic, elle est trop bien. J'en avais déja lu une bonne partie sur fanfiction.net, et comme j'attendais la suite avec impatience, je l'ai recherché, et je l'ai trouvé ici, où, à ma grande joie, j'ai pu lire plusieurs nouveaux chapitres . J'aime trop la réaction d'Eva face aux sentiments qu'Etan éprouve, la pauvre elle est complètement déboussolée. J'espère qu'elle se rendra compte, qu'elle l'aime et qu'ils vivront ensembles et heureux pour toujours, comme Linoa et Squall lol (et oui, j'adore les contes de fée...). Quant aux erreurs relevées précédement, je ne m'en étais même pas rendu compte, comme quoi, si l'histoire est bien écrite et que l'intrigue est cool, tout passe !!! Sur ce, je t'envoies plein de bisous et je te souhaite bonne chance pour la suite, qui, je l'espère, ne va pas mettre trop de temps à arriver.
Je viens de lire ta fic, elle est trop bien. J'en avais déja lu une bonne partie sur fanfiction.net, et comme j'attendais la suite avec impatience, je l'ai recherché, et je l'ai trouvé ici, où, à ma grande joie, j'ai pu lire plusieurs nouveaux chapitres . J'aime trop la réaction d'Eva face aux sentiments qu'Etan éprouve, la pauvre elle est complètement déboussolée. J'espère qu'elle se rendra compte, qu'elle l'aime et qu'ils vivront ensembles et heureux pour toujours, comme Linoa et Squall lol (et oui, j'adore les contes de fée...). Quant aux erreurs relevées précédement, je ne m'en étais même pas rendu compte, comme quoi, si l'histoire est bien écrite et que l'intrigue est cool, tout passe !!! Sur ce, je t'envoies plein de bisous et je te souhaite bonne chance pour la suite, qui, je l'espère, ne va pas mettre trop de temps à arriver.
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Bon, j'avoue, je n'ai pas encore tout lu. Mais cela faisait longtemps que je voulais pousser ma geulante pour une chose.
Quand Rae vas-tu terminer ton histoire ? Problème de connexions ? Plus envie ? Démotivée, en manque d'inspirations ?
J'ignore tout cela. Mais si comme je l'ai lu dans les derniers post tu es au dernier chapitre pourquoi laisser tout ces gens qui t'ont soutenu et qui eux veulent savoir où cela se termine ?
Allez courage, finit ce que tu as commencé.
Quand Rae vas-tu terminer ton histoire ? Problème de connexions ? Plus envie ? Démotivée, en manque d'inspirations ?
J'ignore tout cela. Mais si comme je l'ai lu dans les derniers post tu es au dernier chapitre pourquoi laisser tout ces gens qui t'ont soutenu et qui eux veulent savoir où cela se termine ?
Allez courage, finit ce que tu as commencé.
Ce que je veux c'est une histoire universelle.
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Hé bé ^^
J'aime toujours autant ta fic, de l'action, des personnages complets mais pas parfaits, avec leurs defauts, une bonne description =)
J'ai vu qu'on te disait que tu faisais de trop petites phrases mais bon faut pas oublier que c'est Eva, une jeune femme qui raconte l'histoire. Il ne faut pas non plus en faire trop ^^;
Moi fan inconditionnelle, je dis : "Ne changes rien s'il te plait !"
Enfin déclaration d'Etan ! ^^ Ila tout balancé d'une traite j'adore ! lol ^^
Maintenant esperons qu'Eva y reponde positivement =P
han et je pensais pas que c'était l'avant dernier chapitre, moi qui pensait pouvoir lire encore longtemps cette merveilleuse fic ! ^^
Mais bon je vois que ça fait 1 an qu'il n'y a pas de suite Aie Aie :s
La suite est pour quand ? :p
J'aime toujours autant ta fic, de l'action, des personnages complets mais pas parfaits, avec leurs defauts, une bonne description =)
J'ai vu qu'on te disait que tu faisais de trop petites phrases mais bon faut pas oublier que c'est Eva, une jeune femme qui raconte l'histoire. Il ne faut pas non plus en faire trop ^^;
Moi fan inconditionnelle, je dis : "Ne changes rien s'il te plait !"
Enfin déclaration d'Etan ! ^^ Ila tout balancé d'une traite j'adore ! lol ^^
Maintenant esperons qu'Eva y reponde positivement =P
han et je pensais pas que c'était l'avant dernier chapitre, moi qui pensait pouvoir lire encore longtemps cette merveilleuse fic ! ^^
Mais bon je vois que ça fait 1 an qu'il n'y a pas de suite Aie Aie :s
La suite est pour quand ? :p
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CHAPITRE XXI
Je traverse la maison à toute allure en sens inverse, m’engouffrant par les ouvertures béantes des murs, enjambant meubles brisés et pierres écroulées, pour me diriger à nouveau vers la plage. Je ralentis en passant ce qui devait être la porte d’ entrée pour arriver sur le seuil qui surplombe la plage ; puis j’ avance, accroupie, jusqu’ au muret de pierre délimitant le chemin d’accès au bâtiment, pour observer discrètement où en sont les intrus.
Leurs canots quittent tout juste l' immense bateau noir, et des vaisseaux- mouches décollent lentement des étages supérieurs, sans doute pour se diriger vers l’endroit où la BGU s’ apprête à accoster; j’ai peut-être une chance d’arriver à la plage avant les canots, et les vaisseaux auront certainement – espérons! - plus important à s’ occuper que moi, mais ce sera serré. La plage est environ trois mètres plus bas de l’ endroit où je me trouve ; quinze si j' emprunte le chemin de pierre qui oblige à faire le tour. Alors maintenant, elle est où sa foutue gunblade?
Merde. Cent mètres plus loin, au beau milieu de la plage. Impossible que les soldats ne me voient pas si j’ y vais. Je ferme les yeux et inspire un bon coup pour contenir mon exaspération. Mais bon sang pourquoi est-ce que cet abruti n’a pas pensé à la prendre avant??
Ce n’est pas exactement comme si je pouvais me permettre de prendre le temps de la réflexion. Je saute rapidement le muret et descends en rampant parmi les herbes desséchées. J’ atteins la plage avec du sable plein les yeux et le nez, mais sans m’ être encore fait repérer. Encore un coup d’ œil vers le bateau. Les canots approchent dangereusement de la plage.
Je bondis alors en direction de l’ arme et, aussitôt, cris et tirs de blasters se mettent à pleuvoir depuis les embarcations. La bulle protectrice de Sheba apparaît et les repousse sans problème, me permettant de continuer ma course dans le sable. Les soldats débarquent en hurlant et se ruent vers moi alors que j’ atteins enfin la gunblade. Mince, ça pèse une tonne! je voyais pas ça aussi lourd, mais je me rends compte qu’ il me faut forcer au maximum sur mon dos pour ne serait-ce que la soulever… j’ arrive néanmoins à pivoter et à la soulever au moment où l’ un des soldats abat sa lame sur moi ; je pare le coup de justesse, mais la gunblade retombe vite dans le sable et s’ y enfonce lourdement. J’ arriverai jamais à me battre avec ce truc! j’ envoie un glacier pour réduire en poussière mon assaillant le plus proche, et les autres reculent un moment, sur leurs gardes. Mais soyons réalistes, ce n’ est pas comme ça que je réussirai à les retenir, surtout avec un tel handicap sur les bras. Je fais un nouvel essai pour me servir de la gunblade, et, dans un magnifique mouvement de rotation hélicoïdal totalement aléatoire, je finis tout de même par envoyer deux Esthariens à cinq mètres. Puis je lance deux nouveaux glaciers, et, décidant que mon stupide acte d’ héroïsme digne des plus grandes missions-suicides jamais élaborées s’ arrêtera là pour le moment - de nouvelles barques viennent de toucher terre. Je passe ma tête dans la lanière pour porter la gunblade en bandoulière dans son fourreau, et je me carapate direction l’ orphelinat.
La course dans le sable n’ a jamais été mon sport favori ; ça se confirme quand je me retrouve à pédaler dans la semoule avec sur le dos la gunblade qui doit bien faire la moitié de mon poids – en exagérant un tantinet, je vous l' accorde. Je manque de déraper à plusieurs reprises en tentant d’ accélérer, et les soldats commencent à gagner du terrain. Sheba, qui s’ occupait d’ éloigner les vaisseaux, redescend à ce moment pour venir à mon aide et lance une mini tornade dévastatrice dans leur direction. Certains soldats se retrouvent à aterrir à des centaines de mètres de là, dans la mer.
J’ arrive complètement à bout de souffle au chemin de pierre que je gravis avec grande peine et je saute dans la maison ; un petit coup d’ œil en arrière me permet de voir que les soldats sont en train de se dépêtrer dans le sable devenu mouvant avec les trombes d’ eau que Sheba a déversées. Je décide de la rappeler : inutile qu’ elle continue à s’ épuiser pour le moment, je risque d’ avoir grand besoin d’ elle plus tard.
Quand j’ atteins l’ autre bout de la maison pour rejoindre les garçons où je les avais laissés, je me trouve au milieu d’ un cirque inimaginable. Atterrée, je réalise que, tout à notre terreur en reconnaissant le bateau ennemi qui fonçait sur nous, nous n’ avions pas imaginé une seconde qu’ il pouvait y en avoir un autre arrivant par un autre côté : j’ aperçois, à travers les arbres qui avaient d’ abord du nous masquer sa présence, un bateau d’ à peu près les même dimensions que le premier que nous avons vu sur la plage sud. Et les soldats esthariens qui me font face, ne pouvant certainement pas provenir du bateau que j’ ai laissé derrière moi, ne peuvent venir que de là.
Un sursaut de panique me prend. Où sont les garçons ? impossible de repérer contre qui se battent exactement les soldats esthariens dans cette pagaille, et pas sûr qu’ eux-mêmes ne soient pas en train de s’entretuer. Je reste stupidement sur le pas de la porte pour essayer de repérer Etan et Zack au milieu des tirs, des cris et des scènes de combat. Est-ce qu’ ils ont été attrapés ? Tués… ?
Au moment où je commence à réaliser qu’ on va quand même finir par remarquer ma présence si je ne me bouge pas, une masse énorme vient violemment me percuter sur le côté. Atterrissant sur le dos, le souffle coupé par la violence de l’ impact et le poids du corps – et de surcroît gênée par celui de la gunblade contre laquelle je me trouve écrabouillée - je me débats avec énergie pour me débarrasser de mon assaillant, quand je réalise qu’il y a en réalité deux : Etan qui vient de m’ atterrir dessus et, sur son dos, avec un bras passé autour de son cou - vraisemblablement dans le but de l’ étouffer - un soldat d’ Esthar. Etan a déjà le visage rougi par la lutte, ses mains sur l’ avant bras de son adversaire pour tenter de se dégager, et il écarquille les yeux en reconnaissant mon visage à cinq centimètres du sien. Il tente de me dire quelque chose, mais l’ ennemi profite de sa déconcentration pour resserrer son étreinte. Frappée d’ épouvante, et à moitié suffoquée moi-même par le poids des deux hommes, je m’ agrippe également au bras du soldat pour lui faire relâcher sa prise, mais sans grand succès. En désespoir de cause, je laisse mes bras retomber sur le sol et me mets à tâtonner frénétiquement à la recherche d’ un objet solide ; ma main se referme sur une pierre lisse; sans plus réfléchir, je la saisis et m’ en sers pour cogner contre la tête casquée de l’ agresseur - en faisant de mon mieux pour éviter celle d’ Etan. Mais évidemment, protégé comme il l’ est, ma riposte le dérange à peu près autant que l’ attaque effrénée d’ un moucheron mal luné. Frustrée de ne pas être plus efficace, et effrayée par le ton violacé que prend le visage d’ Ethan à quelques centimètres du mien, j’ agrippe fortement le casque de l’ ennemi et entreprend de le détacher - chose malaisée étant donnée ma position inconfortable - mais cela suffit à faire réagir le soldat : il comprend à mon tâtonnement aux endroits stratégiques du casque que je sais où se trouvent les attaches et les sécurités ; et que même si elles ne sont pas évidentes à défaire dans une pareille situation, il n’ en faudra pas beaucoup plus pour que j’y parvienne.
Dans un sursaut de rage désespérée, mes mains descendent sous le casque et arrachent la gaine protégeant le cou du soldat – une des rares faiblesses de l’ uniforme que je ne me féliciterai jamais assez de bien connaître - et je me mets à l’ y frapper en réunissant toute l’ énergie qu’ il me reste. Et bientôt, pour se protéger de mes coups - certes lancés à l’ aveuglette, étant gênée par Ethan entre nous deux, mais tout de même dangereux - il se voit obligé de s’ effacer jusqu’ où mes mains ne l’ atteindront pas, et donc de desserrer son emprise sur Ethan. Celui-ci, juste le temps de reprendre son souffle, se redresse et fait basculer son assaillant sur le côté, me libérant enfin.
Je peux à mon tour respirer normalement, mais j’ ai l’ impression d’ avoir été piétinée par un troupeau de T-Rex et la poussière me fait tousser. Au même moment, Zack, le visage couvert de sang, arrive et aide Etan à venir à bout du soldat, non sans mal. Puis en soutenant Etan qui éprouve quelques difficultés à se déplacer, il le ramène de mon côté, à l’ intérieur de la maison. Ils se laissent tomber sur le sol, Etan à quatre pattes à côté de moi. Son cou porte les marques de strangulation ; ça doit lui faire un mal de chien. Nous restons stupidement à nous regarder, lui haletant à quatre pattes dans la poussière, Zack assis et la tête dans les mains, et moi allongée, la respiration reprenant lentement son rythme normal après ce sursaut d’ adrénaline, encore à moitié sonnée et couverte de terre.
- Tu…t… t’ en as mis du temps ! souffle Etan d’ un ton qu’ il essaie de rendre ridiculement détaché mais où perce du soulagement.
Je lui envoie un regard noir pour la forme et tente de me redresser, sans succès. J’ avais presque oublié la gunblade. Je passe la lanière par-dessus ma tête, et Zack, qui s’ est remis sur ses pieds d’ un bond me tend sa main pour m’ aider à me relever. Etan se redresse et s’ appuie contre un des murs.
- Désolé… pour tout à l’ heure là avec le… je… il m’ a sauté dessus, j’ ai pas pu t’ éviter, fait-il.
Je me contente de ramasser sa gunblade pour la lui lancer, et elle atterrit sans douceur contre son torse.
- Je…je sais pas comment te remercier… balbutie Etan en refermant ses bras sur le fourreau.
- Ne la perd plus jamais !
Je me penche prudemment vers l’ extérieur de la maison pour observer l’ ennemi. Vu d’ ici, ils sont peut être une bonne soixantaine à venir du vaisseau ; sans doute bien davantage en admettant que d’ autres soient en train de nous attendre près du point d’ atterrissage de la BGU. Il serait peut-être temps d’ établir une tactique un peu plus élaborée que celle - ma préférée, mais sans doute pas la plus fiable - consistant à foncer dans le tas, qui, soyons réalistes, aurait peu de chance de fonctionner face à un ennemi en tel surnombre ; surtout que, maintenant que j’ y songe, il y a encore ceux qui me poursuivaient sur la plage sud qui ne vont pas tarder à arriver. Ayant convenu dès lors que rester sur place n’ était définitivement pas une bonne idée, nous décidons de sortir de la maison par l’ est, nous éloignant ainsi des deux navires ennemis à la fois. Il nous sera plus facile d’ atteindre la BGU en contournant l’ ennemi plutôt que de passer au travers... Assis contre le mur extérieur de la maison, les voix des soldats nous atteignant de manière plus diffuse. Nous vérifions que nous sommes prêts à nous élancer.
- Est-ce que ça a été difficile ? demande Zack, l’ air inquiet, en désignant du menton la gunblade, après avoir fixé un moment mes blessures plus impressionnantes que sérieuses.
Une vraie promenade de santé! Il a de ces questions, je vous jure…
- J’ ai dit que je ramènerais la gunblade, la voilà, je me contente de marmonner en haussant les épaules avant de finir d’ essuyer le sang sur ma jambe.
Et comment est-ce que la situation se présente ? Demande-t-il encore, à mon avis plus par nervosité que parce qu' il tient réellement à savoir.
Mal, je réponds, peut-être trop abruptement. Les soldats ont débarqué, ils ne vont plus tarder; et ils ont des vaisseaux, au cas où tu ne les aurais pas aperçus ; Sheba n’ en est pas venue à bout, ils sont probablement du côté de la BGU maintenant, mais ils peuvent revenir n’ importe quand. Alors avec ceux là en plus, je finis en montrant d’ un signe de la tête les soldats auxquels nous venons d’ échapper, je pense que globalement, on peut dire que ça se présente mal.
- Combien, les soldats ? demande-t-il en se passant la main sur son visage blême.
- Je suis pas restée pour compter, je fais, agacée par ses questions à répétition dont les réponses douloureusement évidentes me rendent nerveuse. Beaucoup.
Qu’ il y en ai dix ou dix mille, ce sera toujours trop, dans notre état de fatigue. Tout ce qu’ on peut se permettre comme objectif à peu près réalisable, c’ est d’ atteindre la BGU en un morceau ; on va laisser les combats aux Seeds dans la mesure du possible, car de nous trois, seul Etan est correctement armé et nous sommes déjà épuisés.
- On ne peut tout de même pas rester là indéfiniment, dit Etan, comme s’ il pensait apporter là une révélation transcendante.
- Toute suggestion sera accueillie avec plaisir, je grogne.
C’ est navrant, c’ est pitoyable, et ça tombe vraiment mal pour nous, mais j’ ai beau réfléchir, mon cerveau embrouillé par la nervosité, la peur et l’ excitation des combats se trouve totalement incapable de mettre au point un plan un tant soit peu élaboré ; impossible d’ aller au-delà de l’ idée de courir comme des dératés jusqu’ au bout de la plage pour rejoindre la BGU. En priant très fort pour réussir à éviter et les soldats, et les vaisseaux ennemis. Niveau stratégie, on a vu mieux ; mais voyons les choses en face : à nous trois contre deux bateaux ennemis avec leurs soldats et vaisseaux armés, il ne reste pas tellement de solutions... Difficile à partir d’ ici de trouver un chemin sûr jusqu’ à la BGU – à supposer qu’ il y en ait, d’ ailleurs, car avec leur vaisseaux planant au dessus de la plage, pas un centimètre carré ne leur échappera. Zack finit de nettoyer en vitesse les blessures au visage d’ Ethan et nous décidons de reprendre la route direction la BGU.
Mais nous avons perdu trop de temps. Au moment même où nous nous levons, des Esthariens bondissent de la maison et se jettent sur nous, leurs sabres brandis, sans que nous les ayons entendus arriver. Nous reculons précipitamment pour les esquiver et les empêcher de nous encercler contre le mur. Zack et moi repoussons à l’ intérieur la première vague grâce à des Glaciers pendant qu’ Etan s’ occupe de ceux qui ont réussi à se faufiler sur le côté, pour nous assurer une ouverture. Mais ils sont tout de même trop nombreux pour nous trois, je dois vite faire appel à Sheba. Etan a réussi à désarmer plusieurs soldats pour que nous puissions finir de nous en occuper à main nues pendant qu’ il se charge des autres. La magie n’ est pas inépuisable, et sans arme je me sens complètement handicapée. Ces soldats n’ ont apparemment pas la moindre notion de combat à la loyale; utiliser leurs fusils ou leurs sabres face à des adversaires désarmés ne leur pose pas de problème de conscience. Sheba ne peut pas non plus être partout à la fois pour nous protéger, et Zack est vite dépassé. Il est maintenant capable d’ envoyer correctement des sorts, certes, mais il n’ a jamais eu à se battre et aurait été vite réduit en miettes si Etan ne le protégeait pas
- Eva, derrière toi ! crie Zack.
J’ ai tout juste le temps de me retourner et de sauter sur le côté pour esquiver un tir. Je roule sur le sol et, toujours accroupie, en m’ appuyant sur mes mains pour garder l’ équilibre, je lance ma jambe dans les cheville du soldat qui tombe en arrière en laissant son blaster retomber. Je m’ empresse de le récupérer pour me débarrasser de mon adversaire, puis je lance l’ arme à Zack : il en aura plus besoin que moi. Je jette un glacier, fais une prise à un autre ennemi dont je parviens à récupérer le sabre. Maintenant, on peut raisonnablement commencer à espérer avoir une chance de s’ en sortir.
Je peux enfin parer les tirs des blasters en les faisant rebondir sur la lame du sabre, ce qui me permet de m’ approcher plus facilement des soldats. J’ en abats un autre dont je prends également le sabre et je me dresse, une arme dans chaque main, prête à contrer toute attaque. Nous nous démenons, mais je me rends vite compte que nous avons été totalement encadré. Nous nous battons à présent au milieu d' une véritable petite foule, et les coups pleuvent de tous côtés.tous trois dos à dos, nous nous défendons de manière plus efficace, mais nous sommes tout de même conscients qu' entourés comme nous le sommes, une retraite nous sera extrêmement difficile. Etant nous même au milieu de cette foule, impossible d' invoquer Sheba, nous serions également touchés.
Mais, à nouveau, des tirs dans notre dos se font entendre. Rentrant ma tête entre mes épaules, je pivote, pour voir les Esthariens s' éparpiller en hâte, certains en me bousculant pour s' enfuir plus vite. Ebahie, je vois alors une troupe de Seeds approcher au loin, fusils à la main. Ces abrutis tirent dans le tas, ne nous ayant visiblement pas encore repérés et reconnus. Nous voilà encore dans de beaux draps...
Je me sens violemment tirée par le bras. C' est Etan qui me traine en courant à la suite de Zack qui s' éloigne aussi vite qu' il le peut, vérifiant que nous le suivons sans difficulté. Quand je reprends enfin mes esprits – après avoir manqué de m' étaler en glissant sur des galets - je dégage mon bras et je suis les garçons dans la course effrenée pour nous éloigner de là.
Un coup d' oeil en arrière me permet de voir que les Seeds ont rejoint rapidement l’ ennemi et ouvrent à nouveau le feu avec acharnement, sans nous avoir repérés. Les soldats esthariens, trop occupés à faire face à un ennemi nettement supérieur à trois adolescents, semblent nous avoir totalement oubliés. Nous ne nous en plaignons pas!
Dans un tel moment, ceux qui seraient en temps normal nos alliés – nos amis! - sont probablement prêts à tirer à vue ; comment pourraient-ils savoir qu’ il n’ y a pas que des ennemis sur cette île ?
J’ ose à peine y croire quand nous nous apercevons que nous nous dirigeons droit vers la fac, et c’ est un bonheur indicible de zigzaguer à travers les tirs des vaisseaux ennemis pour entrer dans le hall en ruine et incendié de notre université adorée.
La BGU n’ est pas épargnée par les combats, loin de là. Ca se bat dans tous les coins, ici; les esthariens ont dû larguer des soldats depuis les vaisseaux, et ils ont investi les lieux, répandant la panique parmi les élèves qui ne devaient pas avoir été préparés à une attaque aussi rapide et massive dans l' enceinte même de l' université. Les échos des cris et des bruits des armes qui s’ entrechoquent emplissent l’ immense hall. Fébrile, j’ essaie de repérer un visage, une silhouette familière. Mais comment trouver qui que ce soit dans ce souk ?
Cependant, il y a plus urgent. J’ aperçois un groupe de filles en difficulté dans l’ entrée de la cafétéria et je cours les aider pendant que les garçons vont au secours de plusieurs autres jeunes à quelques mètres de là. L’ impatience décuple mon énergie et je me débarrasse avec rage des ennemis, tout en essayant de reconnaître des visages parmi les combattants qui nous entourent. Mais où peuvent bien être mes parents ? je dois me baisser pour esquiver le corps d’ un soldat estharien balancé de je ne sais où et j’ en abats un autre qui voulait m’ attaquer par derrière. Les élèves, en uniforme, se battent avec énergie dans chaque recoin du grand hall. Mais ils ne sont pas assez nombreux, ça crève les yeux. Si seuls les volontaires les plus doués ont dû être gardés pour le combat, la plupart n' est même pas Seed... Je suis percutée par l' un d' eux alors que je me battais contre un soldat, et il recule précipitamment en se mettant en garde, me prenant visiblement sur le coup pour un ennemi.
- Eva !! couine Kern,ahuri, en me reconnaissant. Mais, mais…
- Contente de te voir aussi ( et pour une fois c’ est presque vrai). Est-ce que tu sais où sont mes parents ?
- Mais quand es-tu … ?
- Kern, MES PARENTS ?? je crie, presque hystérique, en le secouant comme un prunier.
- En haut, je crois, avec son équipe. En tout cas, ils y étaient tout à l’ heure, je sais pas si…
Je n’ écoute pas la fin de la phrase et je le lâche si soudainement qu’ il bascule en arrière; puis je pars en courant à la recherche des garçons.
- Etan ! Zack !!
- Ici !crie le second.
Je fouille les lieux des yeux pour repérer la provenance de la voix et je les rejoins au moment où ils aident un groupe d’ élèves à se réfugier dans la bibliothèque.
- Tu as trouvé tes parents ? demande Etan, essoufflé.
- Apparemment ils seraient à l’ étage.
- Ok, on y va alors. Ça ira, vous ? demande-t-il en se tournant vers les étudiants.
- Je vais m’ occuper d’ eux, intervient une élève qui doit avoir à peu près notre âge.
Nous nous ruons vers l’ ascenseur en zigzagant entre les combattants. Cette satanée machine n’ a jamais mis aussi longtemps à arriver, malgré mes pressions frénétiques sur le bouton d’ appel. Une fois à l’ étage, nous nous précipitons hors de la cage mais pilons immédiatement sur place. La passerelle est entièrement couverte de monstres au pelage d’ un rouge sombre et aux griffes d’ une longueur impressionnante ; jamais vu des trucs pareils. Ils ont stoppé les combats en entendant la porte s’ ouvrir et se tournent vers nous comme un seul homme, dans un silence on ne peut plus hostile. Nous nous retrouvons à faire face à – au bas mot – une vingtaine d’ entre eux, et celui le plus proche fait un pas dans notre direction en émettant un petit grognement ressemblant à un rire.
Merde.
Paralysée par cette vision, je sens un des garçons me tapoter nerveusement le bras pour me réveiller, puis, en désespoir de cause, m’ agripper et me tirer en arrière dans l’ ascenseur. Zack, blanc comme un linge, enfonce presque le panneau de commande en jurant et priant pour que ça se referme avant que les monstres n’ arrivent jusqu’ à nous.
- Les soldats, ok… marmonne-t-il, le front en sueur, une fois que la cage repart vers l' étage supérieur. Les chocobos, ça va aussi. Mais ça… ça, je vais avoir du mal à m’ y faire ! y’ en a encore beaucoup des trucs de ce genre ?
Le pauvre, s' il savait...
Deuxième étage. Je sors la première, prudemment cette fois, dans le couloir silencieux. Nous courons alors jusqu’ au bureau de mon père où je déclenche l’ ouverture du passage secret qui mène à l’ appartement de ma famille. Là aussi, c’ est le calme plat. Personne n’ est venu jusqu’ ici, semble-t-il. Les garçons me suivent à travers l’ appartement ; je me dirige vers la petite salle qui sert d'armurerie à mes parents pour y prendre deux dagues en argent, moins légères mais plus maniables que les sabres esthariens. Puis nous descendons l' escalier, traversons la cuisine et je mène les garçons vers l’ autre entrée. Je tape le code pour ouvrir la porte blindée. Ca débouche sur le 1er étage, où se trouvaient les monstres de tout à l’ heure ; mais ici nous sommes au bout du long couloir qui ouvre sur les salles de classes. La passerelle où se trouvent les monstres est tout au bout, espérons que nous sommes assez loin. Je pousse doucement la porte et passe ma tête par l’ entrebâillement. Personne ici, mais je distingue le bruit de déflagrations un peu plus loin. Etan décide de passer devant, et nous nous faufilons le long du mur, accroupis, pour nous rapprocher le plus possible des combats, jusqu’ à distinguer des silhouettes à travers la fumée. Je repère immédiatement les couleurs d’ Esthar; ils nous tournent le dos, probablement face à des Seeds qui doivent se trouver pris entre les monstres et les soldats.
Levant les bras, j’ invoque Sheba dans un murmure et la dirige sur eux. L’ effet de surprise facilite l’ élimination des soldats et ils disparaissent tous au milieu des éclats de glace. Je m’ avance précautionneusement, en longeant le mur et les sabres toujours à la main, pour tomber sur une troupe de Seeds éberlués par la soudaine disparition des ennemis, qui, vue de leur côté, a en effet dû être surprenante. En me voyant émerger du léger brouillard provoqué par l’ attaque de Sheba, ils laissent échapper un hoquet de surprise. Et pour ma part, je ne suis pas en reste : c’ est l’ équipe de mon père !
Je reste comme statufiée, à le fixer. Il est juste là, debout au milieu de son équipe, sa gunblade baissée depuis qu’ il m’ a reconnue ; les yeux agrandis par la stupeur sur son visage que je n’ avais jamais vu aussi… aussi vivant, comme si pour la première fois que je le voyais, il laissait transparaître ce qu’ il ressentait, ce qu’ il était au fond. La lassitude, l’ abattement, la joie intense, le soulagement, la stupéfaction, la force, l’ incrédulité défilent sur son visage. Les larmes me montent aux yeux de le voir là, sain et sauf, et j’ en reste pétrifiée. Quand à lui, sans qu’ il s’ en rende compte sans doute, sa gunblade lui glisse des mains et il s’ approche de moi en me dévisageant avant de me prendre dans ses bras. J’ ai presque l’ impression de sentir quelque chose se briser en lui tandis qu’ il me serre, me serre de toute ses forces comme s’ il voulait s’ assurer que j’ étais bien là, en vie, devant lui. Pour la première fois depuis des années je le serre à mon tour et j’ éclate en sanglots en m' accrochant à lui. Nous restons là plusieurs minutes sous le regard muet des Seeds. Puis il desserre son étreinte et prend mon visage entre ses mains.
- Tu ne sais pas à quel point… murmure-t-il, la voix brisée. Nous avons tellement… Enfin, les questions vont devoir attendre je suppose…
- Et Maman? Léna? Je demande, la voix enrouée.
- Ta mère est dans les sous sols, elle défend le hangar avec Quistis. Nous avons laissé Léna et tous les enfants en sécurité à Timber.
La suite n' est qu'un long moment flou d' embrassades, d' accolades, de larmes et de main serrées, où j' ai l'impression de presque étouffer de bonheur avec les autres Seeds présent.
Puis je sens qu’ on me tapote l’ épaule et j’ ai juste le temps de reconnaître Casey avant que ma vue ne se retrouve à nouveau brouillée par les larmes et que ses bras ne se resserrent fermement sur moi. Un million de phrases, de questions se bousculent dans ma tête ; une envie de pleurer, de rire, de crier, de danser, de faire un triple salto dans le couloir, je ne sais plus… tout à son enthousiasme, Casey me soulève du sol et me fait tournoyer, et je resserre avec plaisir mes bras autour de son cou, avec l’ impression d’ être revenue des années en arrière. Mais Papa a raison. Ce n’ est pas le moment ; pas alors que tant de gens se battent encore. Casey me repose doucement, me presse une nouvelle fois contre lui, passe une main derrière ma tête pour rapprocher mon visage et il m’ embrasse doucement sur le front avant de se placer à côté de moi et de me prendre la main.
Papa a également donné l' accolade Etan, à la grande gêne de celui-ci qui avait seulement tendu sa main, un peu embarrassé et ému tout de même. Si ce geste mettait également mals à l' aise les autres Seeds – pour d' autres raisons - ils ont le bon goût de ne faire aucune remarque. Une tel geste de la part de mon père, c' est presque une reconnaissance, pour Etan. Je crois avoir appris tout ce que ça pouvait signifier pour lui, à travers notre voyage. Et pour la première fois, c' est un sentiment de fierté qui m' envahit à l' égard d' Etan. Pas de jalousie. Plus de colère. Mon père a eu l’ air un moment stupéfait de voir Etan – lui et moi à moins de 10 mètres l' un de l' autre sans la moindre dispute, c' est une première pour lui - et ému ; la présence de Zack à nos côté ne soulève aucun commentaire, soit qu’ il pense avoir à faire à un élève dont il ne se souviendrait pas, soit qu’ il s’ attende à obtenir des explications plus tard. Mais ces retrouvailles n’ ont pas lieu dans un cadre idéal, comme nous le rappelle une soudaine déflagration pas si éloignée. Il nous faut nous reprendre rapidement et rejoindre la troupe s’ occupant des monstres sur la passerelle auxquels nous avons dû faire face tout à l’ heure.
Deux Seeds blessés sont allongés sur le côté pendant que les autres, visiblement à bout de force, font face aux quatre monstres restants. Nous leur venons en aide, et une demi heure et deux blessés graves plus tard, la passerelle est dégagée. Nous laissons là quatre Seeds pour garder la passerelle, et prenons les blessés avec nous pour les emmener dans une des salles de classe de l’ étage, visiblement transformée en infirmerie pour l’ occasion. Mon père ouvre la porte, entre à l’ intérieur, imités par les autres ; je m’ apprête à les suivre quand je sens qu’ on me retient par le bras.
C’ est Casey, la mine grave, qui me fait signe qu' il veut me parler. Avec un regard qui me donne l' impression de me carbonsier sur place sur la main de Casey sur mon bras, Etan, le visage fermé, suit Zack à l' intérieur et referme la porte un peu trop fort. Casey m’ attire à lui et me serre dans ses bras.
- Je suis tellement soulagé soupire-t-il. Pas facile de parler devant tout le monde...
La gorge serrée, je le serre à nouveau contre moi. Ca a l’ air de remonter à si loin, la dernière fois qu’ on s’ est vus...
- On a essayé de vous attendre, Eva, je jure… on était dans la forêt, mais les vaisseaux avançaient… commence-t-il, la gorge serrée.
- Casey, tu étais blessé! C' était ce que je voulais, que vous vous mettiez à l' abri!
- S' il t' était arrivé quelque chose...
- On a eu quelques ennuis ensuite, mais tout va bien maintenant, je finis en souriant.
- J’ aurais vraiment voulu être là… on est revenus vous chercher mais on a pas trouvé la moindre trace… alors on a continué… mais on a vraiment cru…
Il s’ écarte de moi pour m’ observer, mon visage dans ses mains. Puis il se penche sur moi, dépose un baiser léger sur mes lèvres qui me donne l’ impression de me liquéfier sur place, et il s’ engouffre dans la salle de classe sans un mot. Un peu sonnée, je finis par le suivre dans la pièce bondée.
A l’ intérieur, les tables ont été poussées contre les murs pour libérer le centre de la pièce où sont allongés une dizaine de Seeds salement amochés, des infirmiers affairés à leur chevet. Je reconnais immédiatement une masse de boucles blondes au fond de la salle tandis que tout le monde se tourne vers nous à notre entrée. Un bruit de métal résonne dans la pièce quand Bess laisse échapper une soucoupe, et elle traverse la salle comme d’ un seul bond pour me sauter au cou sans pouvoir retenir un cri de joie. Nous pleurons et rions en même temps, manquant de tomber sur une des couchettes où est étendu un malade qui gémit quand nous le bousculons. Rien de plus inapproprié au milieu de tous ces blessés, mais je suis tellement heureuse de voir qu’ elle va bien que je pourrais hurler de joie.
Souriant au milieu de ses larmes, elle passe une main légère sur les écorchures de mon visage et soupire. Je ne sais pas exactement de quoi je peux bien avoir l’air, mais je ne crois pas avoir jamais vu un air aussi exténué à Bess. Nous restons de longues minutes ainsi l’ une près de l’ autre avant qu’ elle ne propose que nous nous asseyions pour lui permettre de me soigner. Tandis que nous nous asseyons à l’ écart et que mon infirmière personnelle m' aide à enlever ma veste raidie par la crasse, je croise le regard d' Etan en train de se faire soigner dans un coin de la salle. La mine sombre, il détourne son regard quand je tente un petit sourire.
Ca y est on y est arrivés. On a réussi à rentrer chez nous. Mais ce serait oublier tellement de choses... Mon coeur se serre en repensant à tous ces derniers jours... à tout ce que j'ai appris. Sur moi-même, sur ce qui m'entoure... sur lui.
En tournant la tête à l'opposé de la salle, je vois Casey qui s’ est éloigné pour aider un infirmier, non sans garder un œil sur nous, comme s’ il craignait que nous ne disparaissions. Je soupire sous le regard compatissant de Bess qui est à mille lieux de s' imaginer ce qui a pu se passer jusqu'à il y a encore quelques minutes. Je crois que la situation s' est encore compliquée...
Les questions se bousculent dans ma tête pendant que Bess prépare de quoi désinfecter mes plaies. Par quoi commencer après tant d’ évènements horribles ? Elle, qu’a-t-elle pu bien vivre ? Le visage baissé, elle s’affaire à force de petits gestes précis et rapides pour nettoyer mon bras. Je ne peux que fermer les yeux en essayant de toutes mes forces de croire que nous sommes revenus à il y a quelques semaines, quand Bess me soignait quand je faisais des bêtises.
- Ivackas, je fais en sursautant, saisie par une pensée soudaine pour notre médecin que je n'ai pas encore aperçu. Où est-ce qu’il est ?
Bess relève brusquement la tête pour me regarder dans les yeux, déglutit et reprend sa tache.
- Lève un peu le bras, s' il te plait...
- Bess... ? Je murmure, avec un mauvais pressentiment.
- Il est mort… fait-elle, la voix enrouée.
J’ ai la sensation de me prendre un coup de marteau sur le crane.
- Ce… ce n’ est pas possible… je proteste stupidement, en me redressant pour la dévisager, les yeux écarquillés.
Je la vois cligner des yeux et se pencher un peu plus vers ma blessure.
- C’ était le jour de l’ attaque de la BGU. Il y avait des soldats partout… c’ était tellement affreux... On ne s’ y attendait pas. ils abattaient même les enfants. Ivackas a juste voulu…
Elle inspire profondément, semblant refouler dans un effort douloureux des larmes qui ont du souvent couler depuis mon départ.
- Il est mort, répète-t-elle, le menton tremblant.
- Oh, Bess...
Je sens mon cœur se briser pour elle. Comment a-t-elle fait pour tenir le coup ? Je m' écarte pour me mettre face à elle et la prendre dans les bras. Au même moment, la porte s'ouvre violemment. Toutes les têtes se tournent vers le nouvel arrivant, un de nos professeurs, le visage maculé de sang et à bout de souffle.
- L' ennemi... a réussi... à prendre... la salle de commande...de la BGU... halète-t-il, s'appuyant sur le mur pour tenir sur ses jambes.
Toute l' assistance se tourne vers mon père qui est devenu livide.
- Shu... murmure-t-il, et je sens mon sang se glacer.
Je vois le visage de mon père se fermer et je sais qu' il réfléchit à toute vitesse sur la démarche à adopter. Si les Esthariens ont réussi à investir la salle de commande de la fac, ils peuvent en prendre le contrôle total et nous prendre au piège. Papa et les quelques professeurs présents se sont rapprochés pour discuter à voix basse. Mon père expédie ensuite quelques ordres par talkies walkie, puis ramasse ses affaires avant de se diriger vers la porte, les professeurs sur ses talons. Je me suis également dressée, mais il se tourne vers moi :
- Nous devons aller voir ce qui se passe là-bas...
- Je veux v...
- Vas retrouver ta mère, m' interrompt-il d' un ton ferme. Je t' en prie. Je l' ai prévenue, elle t' attend. Elle et Zell se trouvent dans le hangar. Elle voudra te voir. Emmène qui tu pourras avec toi et va l' aider à repousser les soldats. C' est là que ton aide sera la plus nécessaire.
Mon envie de protester et de l' accompagner au combat n'est retenue que par celle de revoir ma mère. J' acquiesce en silence et je le regarde sortir, accompagné des trois professeurs. Je me tourne vers Bess, droite à côté de moi et les yeux brillants de détermination.
- Je viens.
- Moi aussi, fait Casey que je n' avais pas entendu se rapprocher.
Je cherche des yeux Etan et Zack que je vois se diriger vers nous.
- Zack, est-ce que tu nous accompagnes?
- Je vais rester ici aider si je peux, répond-t-il avec un sourire fatigué. Je gènerais plus qu' autre chose si je venais...
- Tu te trompes, Zack... je l' interromps, sincère. Tu nous as énormément aidés depuis le début, tu sais...
- Merci, mais voyons les choses en face, je suis loin d' être à la hauteur pour ce qui se prépare. Vous vous en sortiriez mieux sans avoir à vous faire du souci pour moi en plus... Mieux vaut que je reste là où je peux réellement être utile.
Difficile de le contredire. Même s'il a fait de gros efforts et que je suis sincère quand je lui dis que son aide a été précieuse.
- Très bien, dans ce cas...
Je lève les yeux vers Etan.
- Si tu oses même me poser la question... prévient-il en remettant la gunblade sur son épaule. Je vous attends dehors.
Devant mon air, Bess fronce légèrement les sourcils et s' apprête visiblement à dire quelque chose. Je fais semblant de ne pas la voir et je récupère en hâte mes affaires avant de sortir à mon tour, mes deux meilleurs amis à ma suite. Je commence à sentir mes jouer chauffer quand je les entends se mettre à chuchoter pendant qu' Etan et moi ouvrons la marche dans l'escalier.
Nous croisons plusieurs escouades ennemies qui tentent de progresser vers les étages, mais nous les repoussons sans la moindre difficulté. Casey est passé devant moi, sa main refermée sur son katana, et nous parcourons silencieusement le couloir gris, à l' affut du moindre bruit. Le plus simple et le plus rapide aurait sans doute été d'emprunter les passages et escaliers secrets où les soldats esthariens n' ont certainement pas pu pénétrer, mais nos amis auraient à les combattre, alors autant les éliminer nous même. Dans le hall, cependant, nous ne nous attardons pas. D' autres Seeds se battent et ne semblent pas en difficulté. Et puis, on nous attend.
Lorsque nous arrivons devant l' entrée intérieure du hangar, la porte s' ouvre à la volée. Ma mère se tient dans l' encadrement, ses longs cheveux ébène retombant sur ses épaules. Et la seconde d' après je me retrouve dans ses bras, serrée contre sa poitrine secouée de sanglots. Elle m' embrasse sur le front après avoir replacé des mèches de mes cheveux avec tendresse. Puis elle nous fait entrer dans le hangar non sans avoir salué les autres, avec un regard un peu hésitant sur Etan.
Bess, Casey et lui me suivent dans la salle où nous retrouvons Zell. Il me fait tournoyer avec une telle force qu' il m' aurait envoyée en orbite s' il avait relaché son étreinte ne serait-ce qu' un peu. Encore une fois, il nous faut combattre notre propre émotion pour nous remettre au travail : il reste énormément d' Esthariens à repousser hors de la BGU, même si le groupe de Maman a réussi à les contenir dans le hangar qui se trouve derrière la porte du fond.
Après un court briefing et une distribution de fusils à ceux qui, comme moi, ne possèdent que des armes de combat de corps a corps, nous nous répartissons en deux groupes. Le but est, dans un premier temps, d'encadrer le hangar et encercler l' ennemi pour le repousser par là où il est entré. Ensuite, nous essaierons d'emprisonner le maximum de soldats possible, qui seront ensuite détenus dans une des prisons des Seeds.
Le groupe de Zell se dirige vers le côté gauche du hangar, tandis que celui de ma mère – dont Bess et moi faisons partie - se faufile à l' opposé. Ainsi dissimulés derrière les quelques vaisseaux,voitures et bus stationnés là, nous avons le temps de nous mettre en place et de lancer les tirs avant que les soldats ennemis ne nous remarquent. Dès lors, il n' est pas bien difficile de les repousser : à partir du moment où ils comprennent que nous les entourons de toutes parts, ils battent en retraite sans demander leur reste. Une fois le hangar débarrassé, nous les suivons à l'extérieur en courant, non sans avoir refermé la grande porte.
Le soleil est à présent bien haut dans le ciel, et un vent violent balaie la plage où nous nous trouvons à nouveau. Le groupe de Zell nous rejoint sans avoir reçu la moindre perte, et nous nous précipitons à la suite de la troupe de soldats ennemis qui remonte la plage en courant. Nous parvenons à les rattrapper au sommet et nous les éliminons avant de poursuivre en direction du navire ennemi où doit déjà se trouver le gros des troupes Seed. Mais des bruits d'explosions plus proches sur notre gauche nous arrêtent. Nous nous approchons avec prudence en nous dissimulant derrière les rochers qui surplombent la scène. En contrebas, des combats impressionnants ont lieux. On aperçoit ici et là des G-Force se battant dans les airs contre de massifs monstres volants, ou surgissant du sol dans un grand fracas pour prendre les ennemis par dessous ; pendant que Zell et ma mère discutent à voix basse je parviens à reconnaître ceux d' Irvine, de Selphie et, bien plus loin, de Quistis.
Où est ton père? chuchote Bess à ma droite.
Aucune idée, je réponds sur le même ton en balayant la plaine du regard à la recherche de son G-Force.
C' est le directeur de l' université, il est censé rester la défendre. Il est toujours sur place, ne t' en fais pas. Il manque aussi les G-Forces de Maura, Trent... et Enton... ajoute-t-il après s' être penché d' un peu plus près par dessus mon épaule pour observer les combats.
Moui... A moins qu' ils ne soient...
Etan s' aperçoit bien que je ne suis pas rassurée pour autant et pose une main apaisante sur mon épaule. Il s' apprête à ajouter quelque chose quand Bess me pince légèrement le bras pour attirer mon attention. Rouge comme une tomate, je crains pendant un moment qu'elle ne fasse une remarque, mais ce n' est que pour me prévenir : ma mère et Zell semblent s' être décidés et nous demandent de nous rapprocher. Nous allons à nouveau nous diviser en deux groupes et encadrer le lieu. En étant assez rapides et silencieux, nous pouvons les prendre par surprise, ce qui serait un sérieux atout, sachant qu' à vue d' oeil, leurs effectifs doivent bien se monter à, au bas mot, dix fois le notre.
Maman fait un signe de la tête à son équipe et nous la suivons avec empressement, nos mains fermement ressérées sur nos armes, tandis que l' équipe de Zell part une nouvelle fois dans le sens opposé. Je jette un dernier regard à Casey et Etan qui me fait un petit signe de la tête avant de suivre Bess. Nous nous faufilons dans une petite tranchée terreuse, pour nous éloigner légèrement de la scène de combat et prendre les ennemis à revers. Tapi derrière une butte, chacun repère et évalue sa proie. Puis c' est le combat. Bess et moi partons chacune de notre côté au fur et à mesure de nos combats qui nous éloignent peu à peu.
Je me retrouve bientôt isolée, adossée à un mur de pierre blanc, faisant face à pas moins de quatre esthariens, et la panique me prend. Je suis à bout de forces. Sheba se trouve déjà à côté à repousser la dizaine de soldats qui essaie encore de m'atteindre. C' est pas bon du tout. Ils ont réussi à m'éloigner, et il me devient bientôt évident que c'était leur objectif. J'arrive à me débarrasser de l' un de mes assaillants, qui est aussitôt remplacé par deux autres, m'obligeant à contourner le mur et à gravir à reculons une petite colline pour maintenir un minimum de distance entre nous – et par là-même, à m' éloigner encore davantage du reste de mon équipe. Et mince...
La fatigue s'accumule depuis trop longtemps, je sens les ennemis prendre peu à peu le dessus. J arrive à parer deux coups en stoppant de justesse deux sabres au dessus de ma tête grâce à mes dagues. Rassemblant toute mon énergie, je les repousse à terre mais d' autres prennent illico le relais, m' obligeant à reculer de nouveau. Sheba se rapproche et lance une salve de glaciers autour de moi. Ce n'est malheureusement pas efficace très longtemps, et je suis à nouveau attaquée de toutes part. Sheba, s'il te plait...
La nouvelle attaque que je commande à mon G-Force me paraît anormalement puissante et je suis moi-même repoussée violemment sur le côté, à l' abri derrière un gros rocher. Je comprends vite pourquoi : lorsque la poussière se dissipe, ce n' est pas un mais deux G-force que je vois flotter dans les airs au dessus de moi. À travers les débris de terre et de glace qui retombent doucement, je distingue Shiva aux côtés de Sheba, et je me rends compte que c' est ma mère qui m' a trainée jusque là pour me mettre à l' écart. Accroupie derrière moi, une main sur mon épaule, elle darde sur l' ennemi un regard flamboyant, comme je n' en ai jamais vu chez elle. D' un geste léger de la main, elle renvoit à l' attaque Shiva, qui pulvérise les soldats.
Est-ce que tout va bien ? chuchote ma mère.
Je hoche la tête, trop essoufflée et hébétée pour parler. Elle prend mon menton dans sa main, le regard trop brillant.
Mon petit bébé qui se bat déjà si fort, sourit-elle en souriant, émue.
Maman... Je suis plus un bébé, je grogne d' un ton puéril.
Elle a un petit rire, puis son regard redevient sérieux lorsqu'il se tourne vers les combats qui ont lieu un peu plus loin. Elle baisse un instant les yeux dans l' ombre du rocher, puis se retourne à nouveau vers moi.
- Tiens, prend-la ! dit-elle en prenant ma main pour la refermer sur un objet rond et brillant.
- Quoi ? je m’ exclame, en ouvrant ma main. Mais… mais c’ est la bague que papa t’a…
- Je veux que tu la gardes. Je me sentirai mieux si tu la portes. Je t’ en prie, prend-la.
J’ ai toujours adoréé cette bague. Cronos. Maman ne m’ avait jamais laissée l’ essayer. Comme toute petite fille sans doute, j'aimais beaucoup, petite, emprunter les affaires de ma mère pour jouer aux grandes. Mais aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été pleinement consciente qu'il s' agissait là de plus qu’un bijou. Le pouvoir de cette bague, c’ est son côté immensément symbolique. Le symbole de l'histoire du monde. Leur histoire. Et la fierté, le courage, la puissance. Le symbole de tout ce que je voudrais être et connaître.
- M… merci beaucoup, je balbutie, les larmes aux yeux. C' est...
Une grande explosion retentit, faisant trembler la terre. Nous nous recroquevillons contre le sol, les bras sur la tête pour nous protéger des débris. Du coin de l'oeil j'aperçois un dernier vaisseau s’éloigner, probablement pour retourner au bateau sur la plage, avec Nosfératu, le G-Force de Quistis, à ses trousses.
D'un regard, nous nous décidons à nous relever pour retourner au combat. Shiva et Sheba s'élancent et libèrent le passage en balayant toute une troupe ennemie d' une tornade. Avec la bague de mon père au doigt, une énergie nouvelle m'habite, et j' ai presque l'impression de voler.
Alors que nous arrivons, la réalité nous frappe de plein fouet. Nous contemplons avec horreur la scène de combats qui se trouve à nos pieds. Il y a beaucoup de Seeds à terre, beaucoup trop. Ceux qui se battent encore semblent démesurément trop peu nombreux face aux Esthariens et aux monstres qui leur sont alliés. Les lieux sont en ruines, de véritables cratères déforment le paysage si harmonieux lors de notre arrivée.
Je sens ma gorge se serrer. Où sont mes amis ? Une explosion suivie de hurlements retentit au loin. Je sursaute tandis que, paniquée, ma mère cherche Papa du regard dans le paysage dévasté. Nous l' apercevons à travers un filet de fumée à environ trois cents mètres à notre gauche, la gunblade volant entre ses mains, et se battant toujours avec fureur contre des ennemis de toute évidence trop nombreux, même pour lui.
- Je dois y aller, maintenant, murmure Maman en me pressant le bras. Fais attention à toi, je t’ en supplie.
A deux, ils ne risquent rien, il vaut mieux que j' aille retrouver mes amis. Je parviens à reconnaître Tullalu, le G-Force de Bess, au milieu des combats qui ont lieu au dessus de nos têtes. Ma meilleure amie ne peut donc pas être très loin. Tout en courant au milieu des combats je fouille les environs du regard, et je parviens enfin à la localiser ; je reconnais même Greg à quelques pas de là. Ils sont un peu à l’ écart des profs, là où les collines rocheuses forment une vaste arène. Eux et une dizaine d’ élèves, plus un professeur se battent contre des ennemis pratiquement trois fois plus nombreux. Les monstres se sont joints à eux et commencent à les mettre en difficulté, malgré les quelques G-Force que je parviens à distinguer dans tout ce désordre. La fumée, s’ élevant des points d’ impact des missiles tirés par les vaisseaux, forme de grands murs opaques et masque à moitié les combattants.
Mais ce n’ est pas le moment de rêvasser ; un des soldats se rue sur moi à une vitesse impressionnante, une arme dans chaque main. Je mets un moment à m’ en débarrasser puis je cours rejoindre mes amis, avant de me faire à nouveau stopper par un monstre. Celui-là me donne plus de fil à retordre. Pendant que je tente d’ esquiver les attaques, Sheba, de son côté, repousse de son mieux les monstres ailés avec les autres G-Forces. Quant à moi, je parviens à me glisser entre les pattes du monstre, et me retrouve dans son dos. Sa taille et son poids imposant l'empêchent de se tourner assez vite et d'un coup de lame le long de son dos, je l' envoie voler en poussière.
- Les vaisseaux sont de retour ! hurle soudainement un élève. Attention !!
Je ne lève la tête que brièvement, pour les localiser, mais trop longtemps tout de même : un nouveau monstre me charge, tête la première, et m’ envoie percuter de plein fouet un soldat d’ Esthar qui s’ écroule sous le choc. Alors qu’ il est encore à moitié sonné, j’ en profite pour lui régler son compte en une seconde, et je me relève, le dos douloureux. En revenche, mon premier assaillant a disparu de ma vue. J’ en profite pour aller secourir une élève en difficulté contre deux soldats, puis, obligée par moments de sauter par dessus des corps parmi lesquels je reconnais des élèves, je parviens à rejoindre Bess.
- Ca va mal, souffle-t-elle, en nage, alors que nous nous mettons dos à dos. Il faut qu’ on trouve une solution, tout le monde est épuisé. On ne tiendra pas, Eva.
Il y a une angoisse indicible dans sa voix, et je sens mon sang se glacer. Je le vois bien, tout ça. Est-ce que ça veut dire que le combat est déjà perdu ? Mais qu’ est-ce qu’ on peut bien faire d’ autre ? S’ enfuir ?? Ils sont partout !
Les élèves autour de nous peinent de plus en plus. Certains s’ écroulent de fatigue, et leurs camarades tentent de les relever pour les mettre à l’ abri, mais font ainsi eux-mêmes des victimes encore plus vulnérables. Avec le retour des vaisseaux, même les G-Forces ne suffisent plus à nous protéger, et plusieurs disparaissent, épuisés. Morte d' angoisse à l' idée qu'elle s' évanouisse dans les airs à son tour, je profite de chaque seconde de répit pour observer Sheba. Mais même son acharnement au combat ne parvient pas à me masquer sa lassitude. A ses côtés, Tullalu, légère comme un papillon, se bat également comme une furie, répendant ses ondes dévastatrices en direction des vaisseaux.
Papa se bat à présent plus haut, près des ruines, aux côtés de Quistis ; Maman a été éloignée d’eux par un groupe de soldats, et j’aperçois Zell aux prises avec trois esthariens un peu plus loin. D’ une prise, il les envoie s’ abattre contre un monstre qui attaquait un Seed.
Mon inattention me vaut de me faire percuter de plein fouet par un élève qui avait été balancé par un des monstres visiblement à la recherche d’ un nouveau record de lancer de poids - qu'il aurait remporté. Pas le temps pour les politesses, nous bondissons sur nos pieds et nous nous écartons l’ un de l’ autre pour reprendre le combat. Bess et moi avons été à nouveau éloignées sans que je m’ en rende compte. Elle se trouve à présent à une trentaine de mètres, se défendant de son mieux. Toute une rangée de monstres nous sépare, impossible de la rejoindre. Nous échangeons un long regard. Je ne peux qu'espérer qu'elle s'en sorte.
Sheba virevolte toujours dans les airs, au dessus de moi, défendant farouchement l'espace qui m'entoure.
J'observe mes mains. Elles sont écorchées et brulées par l'usage intensif de la magie et la manipulation intensive d' armes. Je ne sens quasiment plus de magie en moi. Et je sens que dans ce combat, les armes ne suffiront pas.
Sheba, je vais devoir compter encore un peu sur toi...
Sans que je sache ce qui m'y pousse, ou pourquoi une telle chose fonctionnerait, c'est comme si mon corps réagissait seul à un appel muet, plus fort que moi. Comme s'il savait quoi faire, malgré moi. Je vérifie qu'aucun ennemi ne se trouve à proximité, puis, les yeux fermés et les bras tendus vers le ciel je me concentre. Sur le vent qui souffle sur nous ; sur chaque molécule d'eau présente dans l'air, dans la mer tout autour de nous. L'air semble devenir plus frais et je sens un léger picotement au niveau de mes mains qui va en s'intensifiant. Lorsqu'elles commencent à me chauffer agréablement, j'ai le sentiment que c'est fini, sans savoir comment je sais. J'ouvre les yeux, et baisse le regard sur mes paumes ouvertes : elles brillent légèrement et semblent en meilleur état. Cronos brille comme jamais à mon doigt. Je sens à nouveau la magie affluer en moi.
Plus déterminée à me battre que jamais, je tends les mains vers les ennemis qui arrivent, et lache sur eux une salve de glaciers. Sheba profite de mon regain d'énergie pour voler aider les G-Force à combattre un vaisseau qui ne tarde pas à aller s' écraser dans la mer. Je fais volte face. Personne ici ne semble en grande difficulté et l'inquiétude pour mes amis et ma famille me ronge, il faut que je les retrouve. Je passe en courant devant Greg qui ne semble pas avoir besoin d'aide malgré une blessure. J'arrive à retrouver Casey qui se bat, aidé de son G-Force qui bondit frénétiquement pour atteindre le monstre qui volette quelques mètres au-dessus. Il a l'air soulagé en me voyant mais ne peut se permettre de relacher son attention. Des soldats se pressent autour de lui, et je me poste à ses côtés pour l'aider. Dos à dos, nous manions chacun notre arme pour nous défendre alors que les ennemis affluent à une vitesse impressionnnante.
Et tout à coup, c'est comme si une grosse bulle éclatait dans ma poitrine. Effarée, j'ai juste le temps de lever les yeux au ciel pour voir Sheba disparaître dans un léger nuage brumeux. Le cri meurt dans ma gorge, et je n'aperçois pas le coup qui vient me frapper à la machoire. Sonnée, j'aterris durement contre le sol ; à quatre pattes dans le sable, je tente de me redresser quand un nouveau pressentiment serre mon coeur comme un étau, me coupant le souffle un moment. Dans un sursaut, je lève la tête vers la colline la plus éloignée où ma mère se bat contre des soldats, alors que Shiva lutte de toutes ses forces contre un vaisseau, loin de son invoqueur. Trop loin. Shiva et moi avons tourné la tête vers ma mère en même temps, et je suis sure que nous partageons le même regard paniqué. Comme au ralenti, je vois un second vaisseau se diriger vers la colline et tirer une salve de lasers en direction de ma mère. Et je sais que nous réalisons la même chose : Shiva est beaucoup trop loin pour la protéger... les mains comme enracinées au sol, je ne peux que réaliser ma propre impuissance. Je n'arriverai jamais à la protéger... et Sheba n'est même plus là... mon regard affolé croise celui alors d'Etan qui se trouve entre la colline et moi. Il se retourne vers l'endroit qu'il m'a vue fixer, où ma mère se bat toujours sans voir ce qui l'attend. Et quand je le vois s'y diriger en courant, je sais au fond de moi ce qu'il va faire. Et qu'il ne le doit pas. D'un bon, je me relève en hurlant, comme si toute la scène se déroulait maintenant à une vitesse beaucoup trop rapide, et je me rue vers Etan, espérant, contre toute attente, arriver à temps. Mais à temps pour quoi ? pour protéger qui ? Je vois le G-Force incandescent s'élever dans les airs au dessus d'Etan, en direction de la colline au moment où le vaisseau lache ses lasers sur ma mère.
Le G-Force n'a pas pu arriver assez vite.
Le premier tir qui la touche me cloue sur place ; et chacun de ceux qui suivent me secouent d'autant de violents tremblements... le temps a à nouveau ralenti et je la vois tomber dans le sable avec lenteur. Et en même temps, un autre corps entre nous s'effondre, tandis que le G-Force élimine le vaisseau et disparaît en même temps que lui dans une explosion effroyable.
- NOOOOON !
***
Le hurlement avait retentit sur toute l’île, dans chaque tête, dans chaque poitrine, et un même frisson avait parcouru également chacun des combattants, allié ou ennemi. Quelque chose d’ indéfinissable, comme un souffle chaud et pesant semblant s’élever de la terre, s’échapper de chaque corps encore debout, et chacun, avec comme un étau autour du cœur, semblait poussé à regarder vers la provenance du cri, cette jeune fille qui ne devait pas tout à fait être ce qu’ elle semblait au départ. Quelque chose de puissant, une sorte d’ aura effroyable émanant d’ elle les pétrifiait.
Le regard enflammé, les cheveux rejetés en arrière par un vent violent qui semblait ne toucher qu’ elle - ou peut-être qui s’ échappait d’ elle -, elle se tenait haute et droite devant le corps de Linoa. Son visage, qui n’avait jamais paru si frappant de beauté, d’une beauté dure et glaciale, brillait de larmes. Alors qu'elle écartait les bras, le corps sans vie de Linoa s'éleva lentement du sol, entouré d'une vive lumière bleutée.
Les combats avaient cessé. Chacun se tournait vers la scène. C'était comme si l'énergie du corps de Linoa s'échappait et se transmettait à sa fille. Ceux qui avaient connu la dernière guerre savaient ce qu'il se passait. La sorcière que tous avaient voulu ignorer en Linoa transmettait ses pouvoirs à la nouvelle sorcière. Et Squall Leonheart, le coeur détruit, ne pouvait qu'observer ce qu'il avait toujours craint arriver : il avait perdu sa femme... et il voyait à présent sa fille devenue sorcière. La Dernière Sorcière née. Une sorcière folle de douleur, dont le regard flamboyant le cloua sur place. Au fond, il avait toujours su que c'était ce qui arriverait, et il s'était tellement battu pour l'empêcher...mais il aurait du savoir que le passé et le futur étaient inextricablement liés. Et quand celle qui s'appelerait Ultimécia laissa le corps de Linoa retomber lentement sur le sol pour se diriger vers celui d'Etan devant lequel elle s'agenouilla, tous l'entendirent alors qu'elle chuchotait...
- Je referai l'histoire... j'en ai le pouvoir maintenant... Le temps n'est plus rien. Je reviendrai dans le passé, et je changerai tout...tout sera différent... Je reviendrai...
Tous la virent prendre une poignée de sable fin et la faire doucement s'écouler sur la poitrine du jeune homme. Squall n'eut pas le temps de prononcer un mot. La sorcière se redressa soudain, puis leva la main qu'ornait Cronos et disparut dans un éclair. Et Squall, comme tous ceux présents surent que le combat ne faisait que commencer...
... Et comment livrer un tel combat ?
~~ THE END ~~
note de l'auteur :
OH MY GOD.
J’ en reviens pas.
THE END.
Ca y est.
Fini.
Fini fini fini fini !
Eh oui, c’ était le dernier chapitre de ma fic et vous pouvez pas imaginer à quel point ça me fait bizarre ! Des années que je suis dessus, et ça y est, plus rien !! Rien que ce chapitre m' a pris à peu près un an et demi, me direz vous. J'en suis mortifiée quand j'y pense, surtout avec tous ces commentaires adorables que j'ai reçus. Le fait est que j'ai tout ce temps continué à l'écrire, à le travailler, à le reretravailler... Mais une succession de problèmes personnels et matériels, sans parler du manque de motivation, de temps, de la difficulté à écrire.. Bref, ce ne sont pas des excuses, alors je tiens à m' excuser pour tout ce... bon à ce stade le mot « retard » n'est pas exactement le plus approprié... Pour cette longue absence, je dirai donc! Merci pour votre patience – forcée, certes, mais tout le monde a été incroyablement gentil malgré tout – et votre soutien indéfectible.
Olala. Fini. Bah quand même hein... snif... Oui, je sais, j’ ai pas grand chose à dire, vu que c’ est moi qui écris la fic et qui ai décidé qu’ elle finirait à ce moment-là… Mais ça fait un choc, quand même. Si si.
Je sais, c’ est une fin qui ne voudra peut-être pas dire grand chose pour certaines personnes. N'hésitez surtout pas s'il y a des détails qui vous échappent, des choses qui ne sont pas tout à fait clairs. Ça ne pourra que m'aider à améliorer le chapitre dont je dois avouer que je ne suis pas tout à fait satisfaite ( encore une raison du délai pour le poster ! XD )
Dès le début, je savais comment ça finirait ; le début, la fin et quelques éléments entre, c’ est tout ce que j’ avais, à vrai dire, quand j'ai commencé. Et cette fin, c’ est pas la première idée que j’ ai eu, j’ avoue. Pendant environ 15 secondes, je reconnais avoir envisagé de faire finir Eva et Etan ensemble. Et puis j’ ai retrouvé ma lucidité. J’ ai impitoyablement, irrémédiablement, définitivement balayé cette idée idiote. Déjà parce que ça aurait été ce que tout le monde attendait niark niark niark. J’ aime pas les histoires dont on sait dès le début comment elles vont finir- même si certains se sont doutés que je ferais mourir Etan ; mais bon... mon esprit de contradiction n'est pas allé jusqu'à changer ça aussi ; et j’ étais fermement décidée à jouer les sadiques jusqu’ au bout. Comme si moi, je pouvais faire un happy end ! Et puis… après tous les efforts que j’ avais fait, terminer de manière aussi peu surprenante, aussi banale, ça m’ aurait paru complètement fade et ça m’ aurait déçu de n’ importe quel autre auteur.
Quand j’ ai commencé à faire des petites recherches sur Ultimécia, pour avoir des éléments qui m’ aideraient à amorcer la transformation d’ Eva, quelle n’ a pas été ma surprise de lire un peu partout ( partout le même texte, en fait… ) que tout le monde suspectait Linoa d’ être Ultimécia. J'avais jamais pensé à ça, personnellement. Mais bon… donc voilà, Eva est Ultimécia, pour moi. J'ai fait en sorte qu'elle ait la bague de Squall, ce qui explique qu'Ultimécia la connaisse dans le jeu. Il me semble aussi qu'elle a créé un G-Force ; c'est un pouvoir qu'avait Linoa pour moi ; on le voit quand elle réussit à créer le G-Force pour Eva. Et cette dernière a hérité de cette faculté. Elle veut changer la vie d'Etan, lui en faire une meilleure en revenant dans le passé, c'est pour ça que toutes les sorcières tourneront autour de Seifer, pour essayer de lui donner une part importante, tout en conservant cette part de mépris qu'Eva a envers lui pour ce qu'il a fait...elle ne se rend pas compte qu'elle deviendra cette sorcière tant redoutée ; c'est au fur et à mesure que sa conscience va se perdre, que la sorcière va prendre le dessus sur Eva, et qu'elle va petit à petit oublier son autre vie...
Bref je ne sais pas si la fin est bien écrite... si ces petits éléments sont trop implicites...
Je compte reprendre le début, le corriger, peut-etre ajouter des scènes pour qu'on voit plus la personnalité d'Eva, et le fait que ce n'est pas seulement une peste raleuse ! Ça va être dur ! lol
Voilà, encore une fois un énooooorme merci à vous !
n'hésitez pas à me dire ce qui ne va pas surtout!
Je traverse la maison à toute allure en sens inverse, m’engouffrant par les ouvertures béantes des murs, enjambant meubles brisés et pierres écroulées, pour me diriger à nouveau vers la plage. Je ralentis en passant ce qui devait être la porte d’ entrée pour arriver sur le seuil qui surplombe la plage ; puis j’ avance, accroupie, jusqu’ au muret de pierre délimitant le chemin d’accès au bâtiment, pour observer discrètement où en sont les intrus.
Leurs canots quittent tout juste l' immense bateau noir, et des vaisseaux- mouches décollent lentement des étages supérieurs, sans doute pour se diriger vers l’endroit où la BGU s’ apprête à accoster; j’ai peut-être une chance d’arriver à la plage avant les canots, et les vaisseaux auront certainement – espérons! - plus important à s’ occuper que moi, mais ce sera serré. La plage est environ trois mètres plus bas de l’ endroit où je me trouve ; quinze si j' emprunte le chemin de pierre qui oblige à faire le tour. Alors maintenant, elle est où sa foutue gunblade?
Merde. Cent mètres plus loin, au beau milieu de la plage. Impossible que les soldats ne me voient pas si j’ y vais. Je ferme les yeux et inspire un bon coup pour contenir mon exaspération. Mais bon sang pourquoi est-ce que cet abruti n’a pas pensé à la prendre avant??
Ce n’est pas exactement comme si je pouvais me permettre de prendre le temps de la réflexion. Je saute rapidement le muret et descends en rampant parmi les herbes desséchées. J’ atteins la plage avec du sable plein les yeux et le nez, mais sans m’ être encore fait repérer. Encore un coup d’ œil vers le bateau. Les canots approchent dangereusement de la plage.
Je bondis alors en direction de l’ arme et, aussitôt, cris et tirs de blasters se mettent à pleuvoir depuis les embarcations. La bulle protectrice de Sheba apparaît et les repousse sans problème, me permettant de continuer ma course dans le sable. Les soldats débarquent en hurlant et se ruent vers moi alors que j’ atteins enfin la gunblade. Mince, ça pèse une tonne! je voyais pas ça aussi lourd, mais je me rends compte qu’ il me faut forcer au maximum sur mon dos pour ne serait-ce que la soulever… j’ arrive néanmoins à pivoter et à la soulever au moment où l’ un des soldats abat sa lame sur moi ; je pare le coup de justesse, mais la gunblade retombe vite dans le sable et s’ y enfonce lourdement. J’ arriverai jamais à me battre avec ce truc! j’ envoie un glacier pour réduire en poussière mon assaillant le plus proche, et les autres reculent un moment, sur leurs gardes. Mais soyons réalistes, ce n’ est pas comme ça que je réussirai à les retenir, surtout avec un tel handicap sur les bras. Je fais un nouvel essai pour me servir de la gunblade, et, dans un magnifique mouvement de rotation hélicoïdal totalement aléatoire, je finis tout de même par envoyer deux Esthariens à cinq mètres. Puis je lance deux nouveaux glaciers, et, décidant que mon stupide acte d’ héroïsme digne des plus grandes missions-suicides jamais élaborées s’ arrêtera là pour le moment - de nouvelles barques viennent de toucher terre. Je passe ma tête dans la lanière pour porter la gunblade en bandoulière dans son fourreau, et je me carapate direction l’ orphelinat.
La course dans le sable n’ a jamais été mon sport favori ; ça se confirme quand je me retrouve à pédaler dans la semoule avec sur le dos la gunblade qui doit bien faire la moitié de mon poids – en exagérant un tantinet, je vous l' accorde. Je manque de déraper à plusieurs reprises en tentant d’ accélérer, et les soldats commencent à gagner du terrain. Sheba, qui s’ occupait d’ éloigner les vaisseaux, redescend à ce moment pour venir à mon aide et lance une mini tornade dévastatrice dans leur direction. Certains soldats se retrouvent à aterrir à des centaines de mètres de là, dans la mer.
J’ arrive complètement à bout de souffle au chemin de pierre que je gravis avec grande peine et je saute dans la maison ; un petit coup d’ œil en arrière me permet de voir que les soldats sont en train de se dépêtrer dans le sable devenu mouvant avec les trombes d’ eau que Sheba a déversées. Je décide de la rappeler : inutile qu’ elle continue à s’ épuiser pour le moment, je risque d’ avoir grand besoin d’ elle plus tard.
Quand j’ atteins l’ autre bout de la maison pour rejoindre les garçons où je les avais laissés, je me trouve au milieu d’ un cirque inimaginable. Atterrée, je réalise que, tout à notre terreur en reconnaissant le bateau ennemi qui fonçait sur nous, nous n’ avions pas imaginé une seconde qu’ il pouvait y en avoir un autre arrivant par un autre côté : j’ aperçois, à travers les arbres qui avaient d’ abord du nous masquer sa présence, un bateau d’ à peu près les même dimensions que le premier que nous avons vu sur la plage sud. Et les soldats esthariens qui me font face, ne pouvant certainement pas provenir du bateau que j’ ai laissé derrière moi, ne peuvent venir que de là.
Un sursaut de panique me prend. Où sont les garçons ? impossible de repérer contre qui se battent exactement les soldats esthariens dans cette pagaille, et pas sûr qu’ eux-mêmes ne soient pas en train de s’entretuer. Je reste stupidement sur le pas de la porte pour essayer de repérer Etan et Zack au milieu des tirs, des cris et des scènes de combat. Est-ce qu’ ils ont été attrapés ? Tués… ?
Au moment où je commence à réaliser qu’ on va quand même finir par remarquer ma présence si je ne me bouge pas, une masse énorme vient violemment me percuter sur le côté. Atterrissant sur le dos, le souffle coupé par la violence de l’ impact et le poids du corps – et de surcroît gênée par celui de la gunblade contre laquelle je me trouve écrabouillée - je me débats avec énergie pour me débarrasser de mon assaillant, quand je réalise qu’il y a en réalité deux : Etan qui vient de m’ atterrir dessus et, sur son dos, avec un bras passé autour de son cou - vraisemblablement dans le but de l’ étouffer - un soldat d’ Esthar. Etan a déjà le visage rougi par la lutte, ses mains sur l’ avant bras de son adversaire pour tenter de se dégager, et il écarquille les yeux en reconnaissant mon visage à cinq centimètres du sien. Il tente de me dire quelque chose, mais l’ ennemi profite de sa déconcentration pour resserrer son étreinte. Frappée d’ épouvante, et à moitié suffoquée moi-même par le poids des deux hommes, je m’ agrippe également au bras du soldat pour lui faire relâcher sa prise, mais sans grand succès. En désespoir de cause, je laisse mes bras retomber sur le sol et me mets à tâtonner frénétiquement à la recherche d’ un objet solide ; ma main se referme sur une pierre lisse; sans plus réfléchir, je la saisis et m’ en sers pour cogner contre la tête casquée de l’ agresseur - en faisant de mon mieux pour éviter celle d’ Etan. Mais évidemment, protégé comme il l’ est, ma riposte le dérange à peu près autant que l’ attaque effrénée d’ un moucheron mal luné. Frustrée de ne pas être plus efficace, et effrayée par le ton violacé que prend le visage d’ Ethan à quelques centimètres du mien, j’ agrippe fortement le casque de l’ ennemi et entreprend de le détacher - chose malaisée étant donnée ma position inconfortable - mais cela suffit à faire réagir le soldat : il comprend à mon tâtonnement aux endroits stratégiques du casque que je sais où se trouvent les attaches et les sécurités ; et que même si elles ne sont pas évidentes à défaire dans une pareille situation, il n’ en faudra pas beaucoup plus pour que j’y parvienne.
Dans un sursaut de rage désespérée, mes mains descendent sous le casque et arrachent la gaine protégeant le cou du soldat – une des rares faiblesses de l’ uniforme que je ne me féliciterai jamais assez de bien connaître - et je me mets à l’ y frapper en réunissant toute l’ énergie qu’ il me reste. Et bientôt, pour se protéger de mes coups - certes lancés à l’ aveuglette, étant gênée par Ethan entre nous deux, mais tout de même dangereux - il se voit obligé de s’ effacer jusqu’ où mes mains ne l’ atteindront pas, et donc de desserrer son emprise sur Ethan. Celui-ci, juste le temps de reprendre son souffle, se redresse et fait basculer son assaillant sur le côté, me libérant enfin.
Je peux à mon tour respirer normalement, mais j’ ai l’ impression d’ avoir été piétinée par un troupeau de T-Rex et la poussière me fait tousser. Au même moment, Zack, le visage couvert de sang, arrive et aide Etan à venir à bout du soldat, non sans mal. Puis en soutenant Etan qui éprouve quelques difficultés à se déplacer, il le ramène de mon côté, à l’ intérieur de la maison. Ils se laissent tomber sur le sol, Etan à quatre pattes à côté de moi. Son cou porte les marques de strangulation ; ça doit lui faire un mal de chien. Nous restons stupidement à nous regarder, lui haletant à quatre pattes dans la poussière, Zack assis et la tête dans les mains, et moi allongée, la respiration reprenant lentement son rythme normal après ce sursaut d’ adrénaline, encore à moitié sonnée et couverte de terre.
- Tu…t… t’ en as mis du temps ! souffle Etan d’ un ton qu’ il essaie de rendre ridiculement détaché mais où perce du soulagement.
Je lui envoie un regard noir pour la forme et tente de me redresser, sans succès. J’ avais presque oublié la gunblade. Je passe la lanière par-dessus ma tête, et Zack, qui s’ est remis sur ses pieds d’ un bond me tend sa main pour m’ aider à me relever. Etan se redresse et s’ appuie contre un des murs.
- Désolé… pour tout à l’ heure là avec le… je… il m’ a sauté dessus, j’ ai pas pu t’ éviter, fait-il.
Je me contente de ramasser sa gunblade pour la lui lancer, et elle atterrit sans douceur contre son torse.
- Je…je sais pas comment te remercier… balbutie Etan en refermant ses bras sur le fourreau.
- Ne la perd plus jamais !
Je me penche prudemment vers l’ extérieur de la maison pour observer l’ ennemi. Vu d’ ici, ils sont peut être une bonne soixantaine à venir du vaisseau ; sans doute bien davantage en admettant que d’ autres soient en train de nous attendre près du point d’ atterrissage de la BGU. Il serait peut-être temps d’ établir une tactique un peu plus élaborée que celle - ma préférée, mais sans doute pas la plus fiable - consistant à foncer dans le tas, qui, soyons réalistes, aurait peu de chance de fonctionner face à un ennemi en tel surnombre ; surtout que, maintenant que j’ y songe, il y a encore ceux qui me poursuivaient sur la plage sud qui ne vont pas tarder à arriver. Ayant convenu dès lors que rester sur place n’ était définitivement pas une bonne idée, nous décidons de sortir de la maison par l’ est, nous éloignant ainsi des deux navires ennemis à la fois. Il nous sera plus facile d’ atteindre la BGU en contournant l’ ennemi plutôt que de passer au travers... Assis contre le mur extérieur de la maison, les voix des soldats nous atteignant de manière plus diffuse. Nous vérifions que nous sommes prêts à nous élancer.
- Est-ce que ça a été difficile ? demande Zack, l’ air inquiet, en désignant du menton la gunblade, après avoir fixé un moment mes blessures plus impressionnantes que sérieuses.
Une vraie promenade de santé! Il a de ces questions, je vous jure…
- J’ ai dit que je ramènerais la gunblade, la voilà, je me contente de marmonner en haussant les épaules avant de finir d’ essuyer le sang sur ma jambe.
Et comment est-ce que la situation se présente ? Demande-t-il encore, à mon avis plus par nervosité que parce qu' il tient réellement à savoir.
Mal, je réponds, peut-être trop abruptement. Les soldats ont débarqué, ils ne vont plus tarder; et ils ont des vaisseaux, au cas où tu ne les aurais pas aperçus ; Sheba n’ en est pas venue à bout, ils sont probablement du côté de la BGU maintenant, mais ils peuvent revenir n’ importe quand. Alors avec ceux là en plus, je finis en montrant d’ un signe de la tête les soldats auxquels nous venons d’ échapper, je pense que globalement, on peut dire que ça se présente mal.
- Combien, les soldats ? demande-t-il en se passant la main sur son visage blême.
- Je suis pas restée pour compter, je fais, agacée par ses questions à répétition dont les réponses douloureusement évidentes me rendent nerveuse. Beaucoup.
Qu’ il y en ai dix ou dix mille, ce sera toujours trop, dans notre état de fatigue. Tout ce qu’ on peut se permettre comme objectif à peu près réalisable, c’ est d’ atteindre la BGU en un morceau ; on va laisser les combats aux Seeds dans la mesure du possible, car de nous trois, seul Etan est correctement armé et nous sommes déjà épuisés.
- On ne peut tout de même pas rester là indéfiniment, dit Etan, comme s’ il pensait apporter là une révélation transcendante.
- Toute suggestion sera accueillie avec plaisir, je grogne.
C’ est navrant, c’ est pitoyable, et ça tombe vraiment mal pour nous, mais j’ ai beau réfléchir, mon cerveau embrouillé par la nervosité, la peur et l’ excitation des combats se trouve totalement incapable de mettre au point un plan un tant soit peu élaboré ; impossible d’ aller au-delà de l’ idée de courir comme des dératés jusqu’ au bout de la plage pour rejoindre la BGU. En priant très fort pour réussir à éviter et les soldats, et les vaisseaux ennemis. Niveau stratégie, on a vu mieux ; mais voyons les choses en face : à nous trois contre deux bateaux ennemis avec leurs soldats et vaisseaux armés, il ne reste pas tellement de solutions... Difficile à partir d’ ici de trouver un chemin sûr jusqu’ à la BGU – à supposer qu’ il y en ait, d’ ailleurs, car avec leur vaisseaux planant au dessus de la plage, pas un centimètre carré ne leur échappera. Zack finit de nettoyer en vitesse les blessures au visage d’ Ethan et nous décidons de reprendre la route direction la BGU.
Mais nous avons perdu trop de temps. Au moment même où nous nous levons, des Esthariens bondissent de la maison et se jettent sur nous, leurs sabres brandis, sans que nous les ayons entendus arriver. Nous reculons précipitamment pour les esquiver et les empêcher de nous encercler contre le mur. Zack et moi repoussons à l’ intérieur la première vague grâce à des Glaciers pendant qu’ Etan s’ occupe de ceux qui ont réussi à se faufiler sur le côté, pour nous assurer une ouverture. Mais ils sont tout de même trop nombreux pour nous trois, je dois vite faire appel à Sheba. Etan a réussi à désarmer plusieurs soldats pour que nous puissions finir de nous en occuper à main nues pendant qu’ il se charge des autres. La magie n’ est pas inépuisable, et sans arme je me sens complètement handicapée. Ces soldats n’ ont apparemment pas la moindre notion de combat à la loyale; utiliser leurs fusils ou leurs sabres face à des adversaires désarmés ne leur pose pas de problème de conscience. Sheba ne peut pas non plus être partout à la fois pour nous protéger, et Zack est vite dépassé. Il est maintenant capable d’ envoyer correctement des sorts, certes, mais il n’ a jamais eu à se battre et aurait été vite réduit en miettes si Etan ne le protégeait pas
- Eva, derrière toi ! crie Zack.
J’ ai tout juste le temps de me retourner et de sauter sur le côté pour esquiver un tir. Je roule sur le sol et, toujours accroupie, en m’ appuyant sur mes mains pour garder l’ équilibre, je lance ma jambe dans les cheville du soldat qui tombe en arrière en laissant son blaster retomber. Je m’ empresse de le récupérer pour me débarrasser de mon adversaire, puis je lance l’ arme à Zack : il en aura plus besoin que moi. Je jette un glacier, fais une prise à un autre ennemi dont je parviens à récupérer le sabre. Maintenant, on peut raisonnablement commencer à espérer avoir une chance de s’ en sortir.
Je peux enfin parer les tirs des blasters en les faisant rebondir sur la lame du sabre, ce qui me permet de m’ approcher plus facilement des soldats. J’ en abats un autre dont je prends également le sabre et je me dresse, une arme dans chaque main, prête à contrer toute attaque. Nous nous démenons, mais je me rends vite compte que nous avons été totalement encadré. Nous nous battons à présent au milieu d' une véritable petite foule, et les coups pleuvent de tous côtés.tous trois dos à dos, nous nous défendons de manière plus efficace, mais nous sommes tout de même conscients qu' entourés comme nous le sommes, une retraite nous sera extrêmement difficile. Etant nous même au milieu de cette foule, impossible d' invoquer Sheba, nous serions également touchés.
Mais, à nouveau, des tirs dans notre dos se font entendre. Rentrant ma tête entre mes épaules, je pivote, pour voir les Esthariens s' éparpiller en hâte, certains en me bousculant pour s' enfuir plus vite. Ebahie, je vois alors une troupe de Seeds approcher au loin, fusils à la main. Ces abrutis tirent dans le tas, ne nous ayant visiblement pas encore repérés et reconnus. Nous voilà encore dans de beaux draps...
Je me sens violemment tirée par le bras. C' est Etan qui me traine en courant à la suite de Zack qui s' éloigne aussi vite qu' il le peut, vérifiant que nous le suivons sans difficulté. Quand je reprends enfin mes esprits – après avoir manqué de m' étaler en glissant sur des galets - je dégage mon bras et je suis les garçons dans la course effrenée pour nous éloigner de là.
Un coup d' oeil en arrière me permet de voir que les Seeds ont rejoint rapidement l’ ennemi et ouvrent à nouveau le feu avec acharnement, sans nous avoir repérés. Les soldats esthariens, trop occupés à faire face à un ennemi nettement supérieur à trois adolescents, semblent nous avoir totalement oubliés. Nous ne nous en plaignons pas!
Dans un tel moment, ceux qui seraient en temps normal nos alliés – nos amis! - sont probablement prêts à tirer à vue ; comment pourraient-ils savoir qu’ il n’ y a pas que des ennemis sur cette île ?
J’ ose à peine y croire quand nous nous apercevons que nous nous dirigeons droit vers la fac, et c’ est un bonheur indicible de zigzaguer à travers les tirs des vaisseaux ennemis pour entrer dans le hall en ruine et incendié de notre université adorée.
La BGU n’ est pas épargnée par les combats, loin de là. Ca se bat dans tous les coins, ici; les esthariens ont dû larguer des soldats depuis les vaisseaux, et ils ont investi les lieux, répandant la panique parmi les élèves qui ne devaient pas avoir été préparés à une attaque aussi rapide et massive dans l' enceinte même de l' université. Les échos des cris et des bruits des armes qui s’ entrechoquent emplissent l’ immense hall. Fébrile, j’ essaie de repérer un visage, une silhouette familière. Mais comment trouver qui que ce soit dans ce souk ?
Cependant, il y a plus urgent. J’ aperçois un groupe de filles en difficulté dans l’ entrée de la cafétéria et je cours les aider pendant que les garçons vont au secours de plusieurs autres jeunes à quelques mètres de là. L’ impatience décuple mon énergie et je me débarrasse avec rage des ennemis, tout en essayant de reconnaître des visages parmi les combattants qui nous entourent. Mais où peuvent bien être mes parents ? je dois me baisser pour esquiver le corps d’ un soldat estharien balancé de je ne sais où et j’ en abats un autre qui voulait m’ attaquer par derrière. Les élèves, en uniforme, se battent avec énergie dans chaque recoin du grand hall. Mais ils ne sont pas assez nombreux, ça crève les yeux. Si seuls les volontaires les plus doués ont dû être gardés pour le combat, la plupart n' est même pas Seed... Je suis percutée par l' un d' eux alors que je me battais contre un soldat, et il recule précipitamment en se mettant en garde, me prenant visiblement sur le coup pour un ennemi.
- Eva !! couine Kern,ahuri, en me reconnaissant. Mais, mais…
- Contente de te voir aussi ( et pour une fois c’ est presque vrai). Est-ce que tu sais où sont mes parents ?
- Mais quand es-tu … ?
- Kern, MES PARENTS ?? je crie, presque hystérique, en le secouant comme un prunier.
- En haut, je crois, avec son équipe. En tout cas, ils y étaient tout à l’ heure, je sais pas si…
Je n’ écoute pas la fin de la phrase et je le lâche si soudainement qu’ il bascule en arrière; puis je pars en courant à la recherche des garçons.
- Etan ! Zack !!
- Ici !crie le second.
Je fouille les lieux des yeux pour repérer la provenance de la voix et je les rejoins au moment où ils aident un groupe d’ élèves à se réfugier dans la bibliothèque.
- Tu as trouvé tes parents ? demande Etan, essoufflé.
- Apparemment ils seraient à l’ étage.
- Ok, on y va alors. Ça ira, vous ? demande-t-il en se tournant vers les étudiants.
- Je vais m’ occuper d’ eux, intervient une élève qui doit avoir à peu près notre âge.
Nous nous ruons vers l’ ascenseur en zigzagant entre les combattants. Cette satanée machine n’ a jamais mis aussi longtemps à arriver, malgré mes pressions frénétiques sur le bouton d’ appel. Une fois à l’ étage, nous nous précipitons hors de la cage mais pilons immédiatement sur place. La passerelle est entièrement couverte de monstres au pelage d’ un rouge sombre et aux griffes d’ une longueur impressionnante ; jamais vu des trucs pareils. Ils ont stoppé les combats en entendant la porte s’ ouvrir et se tournent vers nous comme un seul homme, dans un silence on ne peut plus hostile. Nous nous retrouvons à faire face à – au bas mot – une vingtaine d’ entre eux, et celui le plus proche fait un pas dans notre direction en émettant un petit grognement ressemblant à un rire.
Merde.
Paralysée par cette vision, je sens un des garçons me tapoter nerveusement le bras pour me réveiller, puis, en désespoir de cause, m’ agripper et me tirer en arrière dans l’ ascenseur. Zack, blanc comme un linge, enfonce presque le panneau de commande en jurant et priant pour que ça se referme avant que les monstres n’ arrivent jusqu’ à nous.
- Les soldats, ok… marmonne-t-il, le front en sueur, une fois que la cage repart vers l' étage supérieur. Les chocobos, ça va aussi. Mais ça… ça, je vais avoir du mal à m’ y faire ! y’ en a encore beaucoup des trucs de ce genre ?
Le pauvre, s' il savait...
Deuxième étage. Je sors la première, prudemment cette fois, dans le couloir silencieux. Nous courons alors jusqu’ au bureau de mon père où je déclenche l’ ouverture du passage secret qui mène à l’ appartement de ma famille. Là aussi, c’ est le calme plat. Personne n’ est venu jusqu’ ici, semble-t-il. Les garçons me suivent à travers l’ appartement ; je me dirige vers la petite salle qui sert d'armurerie à mes parents pour y prendre deux dagues en argent, moins légères mais plus maniables que les sabres esthariens. Puis nous descendons l' escalier, traversons la cuisine et je mène les garçons vers l’ autre entrée. Je tape le code pour ouvrir la porte blindée. Ca débouche sur le 1er étage, où se trouvaient les monstres de tout à l’ heure ; mais ici nous sommes au bout du long couloir qui ouvre sur les salles de classes. La passerelle où se trouvent les monstres est tout au bout, espérons que nous sommes assez loin. Je pousse doucement la porte et passe ma tête par l’ entrebâillement. Personne ici, mais je distingue le bruit de déflagrations un peu plus loin. Etan décide de passer devant, et nous nous faufilons le long du mur, accroupis, pour nous rapprocher le plus possible des combats, jusqu’ à distinguer des silhouettes à travers la fumée. Je repère immédiatement les couleurs d’ Esthar; ils nous tournent le dos, probablement face à des Seeds qui doivent se trouver pris entre les monstres et les soldats.
Levant les bras, j’ invoque Sheba dans un murmure et la dirige sur eux. L’ effet de surprise facilite l’ élimination des soldats et ils disparaissent tous au milieu des éclats de glace. Je m’ avance précautionneusement, en longeant le mur et les sabres toujours à la main, pour tomber sur une troupe de Seeds éberlués par la soudaine disparition des ennemis, qui, vue de leur côté, a en effet dû être surprenante. En me voyant émerger du léger brouillard provoqué par l’ attaque de Sheba, ils laissent échapper un hoquet de surprise. Et pour ma part, je ne suis pas en reste : c’ est l’ équipe de mon père !
Je reste comme statufiée, à le fixer. Il est juste là, debout au milieu de son équipe, sa gunblade baissée depuis qu’ il m’ a reconnue ; les yeux agrandis par la stupeur sur son visage que je n’ avais jamais vu aussi… aussi vivant, comme si pour la première fois que je le voyais, il laissait transparaître ce qu’ il ressentait, ce qu’ il était au fond. La lassitude, l’ abattement, la joie intense, le soulagement, la stupéfaction, la force, l’ incrédulité défilent sur son visage. Les larmes me montent aux yeux de le voir là, sain et sauf, et j’ en reste pétrifiée. Quand à lui, sans qu’ il s’ en rende compte sans doute, sa gunblade lui glisse des mains et il s’ approche de moi en me dévisageant avant de me prendre dans ses bras. J’ ai presque l’ impression de sentir quelque chose se briser en lui tandis qu’ il me serre, me serre de toute ses forces comme s’ il voulait s’ assurer que j’ étais bien là, en vie, devant lui. Pour la première fois depuis des années je le serre à mon tour et j’ éclate en sanglots en m' accrochant à lui. Nous restons là plusieurs minutes sous le regard muet des Seeds. Puis il desserre son étreinte et prend mon visage entre ses mains.
- Tu ne sais pas à quel point… murmure-t-il, la voix brisée. Nous avons tellement… Enfin, les questions vont devoir attendre je suppose…
- Et Maman? Léna? Je demande, la voix enrouée.
- Ta mère est dans les sous sols, elle défend le hangar avec Quistis. Nous avons laissé Léna et tous les enfants en sécurité à Timber.
La suite n' est qu'un long moment flou d' embrassades, d' accolades, de larmes et de main serrées, où j' ai l'impression de presque étouffer de bonheur avec les autres Seeds présent.
Puis je sens qu’ on me tapote l’ épaule et j’ ai juste le temps de reconnaître Casey avant que ma vue ne se retrouve à nouveau brouillée par les larmes et que ses bras ne se resserrent fermement sur moi. Un million de phrases, de questions se bousculent dans ma tête ; une envie de pleurer, de rire, de crier, de danser, de faire un triple salto dans le couloir, je ne sais plus… tout à son enthousiasme, Casey me soulève du sol et me fait tournoyer, et je resserre avec plaisir mes bras autour de son cou, avec l’ impression d’ être revenue des années en arrière. Mais Papa a raison. Ce n’ est pas le moment ; pas alors que tant de gens se battent encore. Casey me repose doucement, me presse une nouvelle fois contre lui, passe une main derrière ma tête pour rapprocher mon visage et il m’ embrasse doucement sur le front avant de se placer à côté de moi et de me prendre la main.
Papa a également donné l' accolade Etan, à la grande gêne de celui-ci qui avait seulement tendu sa main, un peu embarrassé et ému tout de même. Si ce geste mettait également mals à l' aise les autres Seeds – pour d' autres raisons - ils ont le bon goût de ne faire aucune remarque. Une tel geste de la part de mon père, c' est presque une reconnaissance, pour Etan. Je crois avoir appris tout ce que ça pouvait signifier pour lui, à travers notre voyage. Et pour la première fois, c' est un sentiment de fierté qui m' envahit à l' égard d' Etan. Pas de jalousie. Plus de colère. Mon père a eu l’ air un moment stupéfait de voir Etan – lui et moi à moins de 10 mètres l' un de l' autre sans la moindre dispute, c' est une première pour lui - et ému ; la présence de Zack à nos côté ne soulève aucun commentaire, soit qu’ il pense avoir à faire à un élève dont il ne se souviendrait pas, soit qu’ il s’ attende à obtenir des explications plus tard. Mais ces retrouvailles n’ ont pas lieu dans un cadre idéal, comme nous le rappelle une soudaine déflagration pas si éloignée. Il nous faut nous reprendre rapidement et rejoindre la troupe s’ occupant des monstres sur la passerelle auxquels nous avons dû faire face tout à l’ heure.
Deux Seeds blessés sont allongés sur le côté pendant que les autres, visiblement à bout de force, font face aux quatre monstres restants. Nous leur venons en aide, et une demi heure et deux blessés graves plus tard, la passerelle est dégagée. Nous laissons là quatre Seeds pour garder la passerelle, et prenons les blessés avec nous pour les emmener dans une des salles de classe de l’ étage, visiblement transformée en infirmerie pour l’ occasion. Mon père ouvre la porte, entre à l’ intérieur, imités par les autres ; je m’ apprête à les suivre quand je sens qu’ on me retient par le bras.
C’ est Casey, la mine grave, qui me fait signe qu' il veut me parler. Avec un regard qui me donne l' impression de me carbonsier sur place sur la main de Casey sur mon bras, Etan, le visage fermé, suit Zack à l' intérieur et referme la porte un peu trop fort. Casey m’ attire à lui et me serre dans ses bras.
- Je suis tellement soulagé soupire-t-il. Pas facile de parler devant tout le monde...
La gorge serrée, je le serre à nouveau contre moi. Ca a l’ air de remonter à si loin, la dernière fois qu’ on s’ est vus...
- On a essayé de vous attendre, Eva, je jure… on était dans la forêt, mais les vaisseaux avançaient… commence-t-il, la gorge serrée.
- Casey, tu étais blessé! C' était ce que je voulais, que vous vous mettiez à l' abri!
- S' il t' était arrivé quelque chose...
- On a eu quelques ennuis ensuite, mais tout va bien maintenant, je finis en souriant.
- J’ aurais vraiment voulu être là… on est revenus vous chercher mais on a pas trouvé la moindre trace… alors on a continué… mais on a vraiment cru…
Il s’ écarte de moi pour m’ observer, mon visage dans ses mains. Puis il se penche sur moi, dépose un baiser léger sur mes lèvres qui me donne l’ impression de me liquéfier sur place, et il s’ engouffre dans la salle de classe sans un mot. Un peu sonnée, je finis par le suivre dans la pièce bondée.
A l’ intérieur, les tables ont été poussées contre les murs pour libérer le centre de la pièce où sont allongés une dizaine de Seeds salement amochés, des infirmiers affairés à leur chevet. Je reconnais immédiatement une masse de boucles blondes au fond de la salle tandis que tout le monde se tourne vers nous à notre entrée. Un bruit de métal résonne dans la pièce quand Bess laisse échapper une soucoupe, et elle traverse la salle comme d’ un seul bond pour me sauter au cou sans pouvoir retenir un cri de joie. Nous pleurons et rions en même temps, manquant de tomber sur une des couchettes où est étendu un malade qui gémit quand nous le bousculons. Rien de plus inapproprié au milieu de tous ces blessés, mais je suis tellement heureuse de voir qu’ elle va bien que je pourrais hurler de joie.
Souriant au milieu de ses larmes, elle passe une main légère sur les écorchures de mon visage et soupire. Je ne sais pas exactement de quoi je peux bien avoir l’air, mais je ne crois pas avoir jamais vu un air aussi exténué à Bess. Nous restons de longues minutes ainsi l’ une près de l’ autre avant qu’ elle ne propose que nous nous asseyions pour lui permettre de me soigner. Tandis que nous nous asseyons à l’ écart et que mon infirmière personnelle m' aide à enlever ma veste raidie par la crasse, je croise le regard d' Etan en train de se faire soigner dans un coin de la salle. La mine sombre, il détourne son regard quand je tente un petit sourire.
Ca y est on y est arrivés. On a réussi à rentrer chez nous. Mais ce serait oublier tellement de choses... Mon coeur se serre en repensant à tous ces derniers jours... à tout ce que j'ai appris. Sur moi-même, sur ce qui m'entoure... sur lui.
En tournant la tête à l'opposé de la salle, je vois Casey qui s’ est éloigné pour aider un infirmier, non sans garder un œil sur nous, comme s’ il craignait que nous ne disparaissions. Je soupire sous le regard compatissant de Bess qui est à mille lieux de s' imaginer ce qui a pu se passer jusqu'à il y a encore quelques minutes. Je crois que la situation s' est encore compliquée...
Les questions se bousculent dans ma tête pendant que Bess prépare de quoi désinfecter mes plaies. Par quoi commencer après tant d’ évènements horribles ? Elle, qu’a-t-elle pu bien vivre ? Le visage baissé, elle s’affaire à force de petits gestes précis et rapides pour nettoyer mon bras. Je ne peux que fermer les yeux en essayant de toutes mes forces de croire que nous sommes revenus à il y a quelques semaines, quand Bess me soignait quand je faisais des bêtises.
- Ivackas, je fais en sursautant, saisie par une pensée soudaine pour notre médecin que je n'ai pas encore aperçu. Où est-ce qu’il est ?
Bess relève brusquement la tête pour me regarder dans les yeux, déglutit et reprend sa tache.
- Lève un peu le bras, s' il te plait...
- Bess... ? Je murmure, avec un mauvais pressentiment.
- Il est mort… fait-elle, la voix enrouée.
J’ ai la sensation de me prendre un coup de marteau sur le crane.
- Ce… ce n’ est pas possible… je proteste stupidement, en me redressant pour la dévisager, les yeux écarquillés.
Je la vois cligner des yeux et se pencher un peu plus vers ma blessure.
- C’ était le jour de l’ attaque de la BGU. Il y avait des soldats partout… c’ était tellement affreux... On ne s’ y attendait pas. ils abattaient même les enfants. Ivackas a juste voulu…
Elle inspire profondément, semblant refouler dans un effort douloureux des larmes qui ont du souvent couler depuis mon départ.
- Il est mort, répète-t-elle, le menton tremblant.
- Oh, Bess...
Je sens mon cœur se briser pour elle. Comment a-t-elle fait pour tenir le coup ? Je m' écarte pour me mettre face à elle et la prendre dans les bras. Au même moment, la porte s'ouvre violemment. Toutes les têtes se tournent vers le nouvel arrivant, un de nos professeurs, le visage maculé de sang et à bout de souffle.
- L' ennemi... a réussi... à prendre... la salle de commande...de la BGU... halète-t-il, s'appuyant sur le mur pour tenir sur ses jambes.
Toute l' assistance se tourne vers mon père qui est devenu livide.
- Shu... murmure-t-il, et je sens mon sang se glacer.
Je vois le visage de mon père se fermer et je sais qu' il réfléchit à toute vitesse sur la démarche à adopter. Si les Esthariens ont réussi à investir la salle de commande de la fac, ils peuvent en prendre le contrôle total et nous prendre au piège. Papa et les quelques professeurs présents se sont rapprochés pour discuter à voix basse. Mon père expédie ensuite quelques ordres par talkies walkie, puis ramasse ses affaires avant de se diriger vers la porte, les professeurs sur ses talons. Je me suis également dressée, mais il se tourne vers moi :
- Nous devons aller voir ce qui se passe là-bas...
- Je veux v...
- Vas retrouver ta mère, m' interrompt-il d' un ton ferme. Je t' en prie. Je l' ai prévenue, elle t' attend. Elle et Zell se trouvent dans le hangar. Elle voudra te voir. Emmène qui tu pourras avec toi et va l' aider à repousser les soldats. C' est là que ton aide sera la plus nécessaire.
Mon envie de protester et de l' accompagner au combat n'est retenue que par celle de revoir ma mère. J' acquiesce en silence et je le regarde sortir, accompagné des trois professeurs. Je me tourne vers Bess, droite à côté de moi et les yeux brillants de détermination.
- Je viens.
- Moi aussi, fait Casey que je n' avais pas entendu se rapprocher.
Je cherche des yeux Etan et Zack que je vois se diriger vers nous.
- Zack, est-ce que tu nous accompagnes?
- Je vais rester ici aider si je peux, répond-t-il avec un sourire fatigué. Je gènerais plus qu' autre chose si je venais...
- Tu te trompes, Zack... je l' interromps, sincère. Tu nous as énormément aidés depuis le début, tu sais...
- Merci, mais voyons les choses en face, je suis loin d' être à la hauteur pour ce qui se prépare. Vous vous en sortiriez mieux sans avoir à vous faire du souci pour moi en plus... Mieux vaut que je reste là où je peux réellement être utile.
Difficile de le contredire. Même s'il a fait de gros efforts et que je suis sincère quand je lui dis que son aide a été précieuse.
- Très bien, dans ce cas...
Je lève les yeux vers Etan.
- Si tu oses même me poser la question... prévient-il en remettant la gunblade sur son épaule. Je vous attends dehors.
Devant mon air, Bess fronce légèrement les sourcils et s' apprête visiblement à dire quelque chose. Je fais semblant de ne pas la voir et je récupère en hâte mes affaires avant de sortir à mon tour, mes deux meilleurs amis à ma suite. Je commence à sentir mes jouer chauffer quand je les entends se mettre à chuchoter pendant qu' Etan et moi ouvrons la marche dans l'escalier.
Nous croisons plusieurs escouades ennemies qui tentent de progresser vers les étages, mais nous les repoussons sans la moindre difficulté. Casey est passé devant moi, sa main refermée sur son katana, et nous parcourons silencieusement le couloir gris, à l' affut du moindre bruit. Le plus simple et le plus rapide aurait sans doute été d'emprunter les passages et escaliers secrets où les soldats esthariens n' ont certainement pas pu pénétrer, mais nos amis auraient à les combattre, alors autant les éliminer nous même. Dans le hall, cependant, nous ne nous attardons pas. D' autres Seeds se battent et ne semblent pas en difficulté. Et puis, on nous attend.
Lorsque nous arrivons devant l' entrée intérieure du hangar, la porte s' ouvre à la volée. Ma mère se tient dans l' encadrement, ses longs cheveux ébène retombant sur ses épaules. Et la seconde d' après je me retrouve dans ses bras, serrée contre sa poitrine secouée de sanglots. Elle m' embrasse sur le front après avoir replacé des mèches de mes cheveux avec tendresse. Puis elle nous fait entrer dans le hangar non sans avoir salué les autres, avec un regard un peu hésitant sur Etan.
Bess, Casey et lui me suivent dans la salle où nous retrouvons Zell. Il me fait tournoyer avec une telle force qu' il m' aurait envoyée en orbite s' il avait relaché son étreinte ne serait-ce qu' un peu. Encore une fois, il nous faut combattre notre propre émotion pour nous remettre au travail : il reste énormément d' Esthariens à repousser hors de la BGU, même si le groupe de Maman a réussi à les contenir dans le hangar qui se trouve derrière la porte du fond.
Après un court briefing et une distribution de fusils à ceux qui, comme moi, ne possèdent que des armes de combat de corps a corps, nous nous répartissons en deux groupes. Le but est, dans un premier temps, d'encadrer le hangar et encercler l' ennemi pour le repousser par là où il est entré. Ensuite, nous essaierons d'emprisonner le maximum de soldats possible, qui seront ensuite détenus dans une des prisons des Seeds.
Le groupe de Zell se dirige vers le côté gauche du hangar, tandis que celui de ma mère – dont Bess et moi faisons partie - se faufile à l' opposé. Ainsi dissimulés derrière les quelques vaisseaux,voitures et bus stationnés là, nous avons le temps de nous mettre en place et de lancer les tirs avant que les soldats ennemis ne nous remarquent. Dès lors, il n' est pas bien difficile de les repousser : à partir du moment où ils comprennent que nous les entourons de toutes parts, ils battent en retraite sans demander leur reste. Une fois le hangar débarrassé, nous les suivons à l'extérieur en courant, non sans avoir refermé la grande porte.
Le soleil est à présent bien haut dans le ciel, et un vent violent balaie la plage où nous nous trouvons à nouveau. Le groupe de Zell nous rejoint sans avoir reçu la moindre perte, et nous nous précipitons à la suite de la troupe de soldats ennemis qui remonte la plage en courant. Nous parvenons à les rattrapper au sommet et nous les éliminons avant de poursuivre en direction du navire ennemi où doit déjà se trouver le gros des troupes Seed. Mais des bruits d'explosions plus proches sur notre gauche nous arrêtent. Nous nous approchons avec prudence en nous dissimulant derrière les rochers qui surplombent la scène. En contrebas, des combats impressionnants ont lieux. On aperçoit ici et là des G-Force se battant dans les airs contre de massifs monstres volants, ou surgissant du sol dans un grand fracas pour prendre les ennemis par dessous ; pendant que Zell et ma mère discutent à voix basse je parviens à reconnaître ceux d' Irvine, de Selphie et, bien plus loin, de Quistis.
Où est ton père? chuchote Bess à ma droite.
Aucune idée, je réponds sur le même ton en balayant la plaine du regard à la recherche de son G-Force.
C' est le directeur de l' université, il est censé rester la défendre. Il est toujours sur place, ne t' en fais pas. Il manque aussi les G-Forces de Maura, Trent... et Enton... ajoute-t-il après s' être penché d' un peu plus près par dessus mon épaule pour observer les combats.
Moui... A moins qu' ils ne soient...
Etan s' aperçoit bien que je ne suis pas rassurée pour autant et pose une main apaisante sur mon épaule. Il s' apprête à ajouter quelque chose quand Bess me pince légèrement le bras pour attirer mon attention. Rouge comme une tomate, je crains pendant un moment qu'elle ne fasse une remarque, mais ce n' est que pour me prévenir : ma mère et Zell semblent s' être décidés et nous demandent de nous rapprocher. Nous allons à nouveau nous diviser en deux groupes et encadrer le lieu. En étant assez rapides et silencieux, nous pouvons les prendre par surprise, ce qui serait un sérieux atout, sachant qu' à vue d' oeil, leurs effectifs doivent bien se monter à, au bas mot, dix fois le notre.
Maman fait un signe de la tête à son équipe et nous la suivons avec empressement, nos mains fermement ressérées sur nos armes, tandis que l' équipe de Zell part une nouvelle fois dans le sens opposé. Je jette un dernier regard à Casey et Etan qui me fait un petit signe de la tête avant de suivre Bess. Nous nous faufilons dans une petite tranchée terreuse, pour nous éloigner légèrement de la scène de combat et prendre les ennemis à revers. Tapi derrière une butte, chacun repère et évalue sa proie. Puis c' est le combat. Bess et moi partons chacune de notre côté au fur et à mesure de nos combats qui nous éloignent peu à peu.
Je me retrouve bientôt isolée, adossée à un mur de pierre blanc, faisant face à pas moins de quatre esthariens, et la panique me prend. Je suis à bout de forces. Sheba se trouve déjà à côté à repousser la dizaine de soldats qui essaie encore de m'atteindre. C' est pas bon du tout. Ils ont réussi à m'éloigner, et il me devient bientôt évident que c'était leur objectif. J'arrive à me débarrasser de l' un de mes assaillants, qui est aussitôt remplacé par deux autres, m'obligeant à contourner le mur et à gravir à reculons une petite colline pour maintenir un minimum de distance entre nous – et par là-même, à m' éloigner encore davantage du reste de mon équipe. Et mince...
La fatigue s'accumule depuis trop longtemps, je sens les ennemis prendre peu à peu le dessus. J arrive à parer deux coups en stoppant de justesse deux sabres au dessus de ma tête grâce à mes dagues. Rassemblant toute mon énergie, je les repousse à terre mais d' autres prennent illico le relais, m' obligeant à reculer de nouveau. Sheba se rapproche et lance une salve de glaciers autour de moi. Ce n'est malheureusement pas efficace très longtemps, et je suis à nouveau attaquée de toutes part. Sheba, s'il te plait...
La nouvelle attaque que je commande à mon G-Force me paraît anormalement puissante et je suis moi-même repoussée violemment sur le côté, à l' abri derrière un gros rocher. Je comprends vite pourquoi : lorsque la poussière se dissipe, ce n' est pas un mais deux G-force que je vois flotter dans les airs au dessus de moi. À travers les débris de terre et de glace qui retombent doucement, je distingue Shiva aux côtés de Sheba, et je me rends compte que c' est ma mère qui m' a trainée jusque là pour me mettre à l' écart. Accroupie derrière moi, une main sur mon épaule, elle darde sur l' ennemi un regard flamboyant, comme je n' en ai jamais vu chez elle. D' un geste léger de la main, elle renvoit à l' attaque Shiva, qui pulvérise les soldats.
Est-ce que tout va bien ? chuchote ma mère.
Je hoche la tête, trop essoufflée et hébétée pour parler. Elle prend mon menton dans sa main, le regard trop brillant.
Mon petit bébé qui se bat déjà si fort, sourit-elle en souriant, émue.
Maman... Je suis plus un bébé, je grogne d' un ton puéril.
Elle a un petit rire, puis son regard redevient sérieux lorsqu'il se tourne vers les combats qui ont lieu un peu plus loin. Elle baisse un instant les yeux dans l' ombre du rocher, puis se retourne à nouveau vers moi.
- Tiens, prend-la ! dit-elle en prenant ma main pour la refermer sur un objet rond et brillant.
- Quoi ? je m’ exclame, en ouvrant ma main. Mais… mais c’ est la bague que papa t’a…
- Je veux que tu la gardes. Je me sentirai mieux si tu la portes. Je t’ en prie, prend-la.
J’ ai toujours adoréé cette bague. Cronos. Maman ne m’ avait jamais laissée l’ essayer. Comme toute petite fille sans doute, j'aimais beaucoup, petite, emprunter les affaires de ma mère pour jouer aux grandes. Mais aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été pleinement consciente qu'il s' agissait là de plus qu’un bijou. Le pouvoir de cette bague, c’ est son côté immensément symbolique. Le symbole de l'histoire du monde. Leur histoire. Et la fierté, le courage, la puissance. Le symbole de tout ce que je voudrais être et connaître.
- M… merci beaucoup, je balbutie, les larmes aux yeux. C' est...
Une grande explosion retentit, faisant trembler la terre. Nous nous recroquevillons contre le sol, les bras sur la tête pour nous protéger des débris. Du coin de l'oeil j'aperçois un dernier vaisseau s’éloigner, probablement pour retourner au bateau sur la plage, avec Nosfératu, le G-Force de Quistis, à ses trousses.
D'un regard, nous nous décidons à nous relever pour retourner au combat. Shiva et Sheba s'élancent et libèrent le passage en balayant toute une troupe ennemie d' une tornade. Avec la bague de mon père au doigt, une énergie nouvelle m'habite, et j' ai presque l'impression de voler.
Alors que nous arrivons, la réalité nous frappe de plein fouet. Nous contemplons avec horreur la scène de combats qui se trouve à nos pieds. Il y a beaucoup de Seeds à terre, beaucoup trop. Ceux qui se battent encore semblent démesurément trop peu nombreux face aux Esthariens et aux monstres qui leur sont alliés. Les lieux sont en ruines, de véritables cratères déforment le paysage si harmonieux lors de notre arrivée.
Je sens ma gorge se serrer. Où sont mes amis ? Une explosion suivie de hurlements retentit au loin. Je sursaute tandis que, paniquée, ma mère cherche Papa du regard dans le paysage dévasté. Nous l' apercevons à travers un filet de fumée à environ trois cents mètres à notre gauche, la gunblade volant entre ses mains, et se battant toujours avec fureur contre des ennemis de toute évidence trop nombreux, même pour lui.
- Je dois y aller, maintenant, murmure Maman en me pressant le bras. Fais attention à toi, je t’ en supplie.
A deux, ils ne risquent rien, il vaut mieux que j' aille retrouver mes amis. Je parviens à reconnaître Tullalu, le G-Force de Bess, au milieu des combats qui ont lieu au dessus de nos têtes. Ma meilleure amie ne peut donc pas être très loin. Tout en courant au milieu des combats je fouille les environs du regard, et je parviens enfin à la localiser ; je reconnais même Greg à quelques pas de là. Ils sont un peu à l’ écart des profs, là où les collines rocheuses forment une vaste arène. Eux et une dizaine d’ élèves, plus un professeur se battent contre des ennemis pratiquement trois fois plus nombreux. Les monstres se sont joints à eux et commencent à les mettre en difficulté, malgré les quelques G-Force que je parviens à distinguer dans tout ce désordre. La fumée, s’ élevant des points d’ impact des missiles tirés par les vaisseaux, forme de grands murs opaques et masque à moitié les combattants.
Mais ce n’ est pas le moment de rêvasser ; un des soldats se rue sur moi à une vitesse impressionnante, une arme dans chaque main. Je mets un moment à m’ en débarrasser puis je cours rejoindre mes amis, avant de me faire à nouveau stopper par un monstre. Celui-là me donne plus de fil à retordre. Pendant que je tente d’ esquiver les attaques, Sheba, de son côté, repousse de son mieux les monstres ailés avec les autres G-Forces. Quant à moi, je parviens à me glisser entre les pattes du monstre, et me retrouve dans son dos. Sa taille et son poids imposant l'empêchent de se tourner assez vite et d'un coup de lame le long de son dos, je l' envoie voler en poussière.
- Les vaisseaux sont de retour ! hurle soudainement un élève. Attention !!
Je ne lève la tête que brièvement, pour les localiser, mais trop longtemps tout de même : un nouveau monstre me charge, tête la première, et m’ envoie percuter de plein fouet un soldat d’ Esthar qui s’ écroule sous le choc. Alors qu’ il est encore à moitié sonné, j’ en profite pour lui régler son compte en une seconde, et je me relève, le dos douloureux. En revenche, mon premier assaillant a disparu de ma vue. J’ en profite pour aller secourir une élève en difficulté contre deux soldats, puis, obligée par moments de sauter par dessus des corps parmi lesquels je reconnais des élèves, je parviens à rejoindre Bess.
- Ca va mal, souffle-t-elle, en nage, alors que nous nous mettons dos à dos. Il faut qu’ on trouve une solution, tout le monde est épuisé. On ne tiendra pas, Eva.
Il y a une angoisse indicible dans sa voix, et je sens mon sang se glacer. Je le vois bien, tout ça. Est-ce que ça veut dire que le combat est déjà perdu ? Mais qu’ est-ce qu’ on peut bien faire d’ autre ? S’ enfuir ?? Ils sont partout !
Les élèves autour de nous peinent de plus en plus. Certains s’ écroulent de fatigue, et leurs camarades tentent de les relever pour les mettre à l’ abri, mais font ainsi eux-mêmes des victimes encore plus vulnérables. Avec le retour des vaisseaux, même les G-Forces ne suffisent plus à nous protéger, et plusieurs disparaissent, épuisés. Morte d' angoisse à l' idée qu'elle s' évanouisse dans les airs à son tour, je profite de chaque seconde de répit pour observer Sheba. Mais même son acharnement au combat ne parvient pas à me masquer sa lassitude. A ses côtés, Tullalu, légère comme un papillon, se bat également comme une furie, répendant ses ondes dévastatrices en direction des vaisseaux.
Papa se bat à présent plus haut, près des ruines, aux côtés de Quistis ; Maman a été éloignée d’eux par un groupe de soldats, et j’aperçois Zell aux prises avec trois esthariens un peu plus loin. D’ une prise, il les envoie s’ abattre contre un monstre qui attaquait un Seed.
Mon inattention me vaut de me faire percuter de plein fouet par un élève qui avait été balancé par un des monstres visiblement à la recherche d’ un nouveau record de lancer de poids - qu'il aurait remporté. Pas le temps pour les politesses, nous bondissons sur nos pieds et nous nous écartons l’ un de l’ autre pour reprendre le combat. Bess et moi avons été à nouveau éloignées sans que je m’ en rende compte. Elle se trouve à présent à une trentaine de mètres, se défendant de son mieux. Toute une rangée de monstres nous sépare, impossible de la rejoindre. Nous échangeons un long regard. Je ne peux qu'espérer qu'elle s'en sorte.
Sheba virevolte toujours dans les airs, au dessus de moi, défendant farouchement l'espace qui m'entoure.
J'observe mes mains. Elles sont écorchées et brulées par l'usage intensif de la magie et la manipulation intensive d' armes. Je ne sens quasiment plus de magie en moi. Et je sens que dans ce combat, les armes ne suffiront pas.
Sheba, je vais devoir compter encore un peu sur toi...
Sans que je sache ce qui m'y pousse, ou pourquoi une telle chose fonctionnerait, c'est comme si mon corps réagissait seul à un appel muet, plus fort que moi. Comme s'il savait quoi faire, malgré moi. Je vérifie qu'aucun ennemi ne se trouve à proximité, puis, les yeux fermés et les bras tendus vers le ciel je me concentre. Sur le vent qui souffle sur nous ; sur chaque molécule d'eau présente dans l'air, dans la mer tout autour de nous. L'air semble devenir plus frais et je sens un léger picotement au niveau de mes mains qui va en s'intensifiant. Lorsqu'elles commencent à me chauffer agréablement, j'ai le sentiment que c'est fini, sans savoir comment je sais. J'ouvre les yeux, et baisse le regard sur mes paumes ouvertes : elles brillent légèrement et semblent en meilleur état. Cronos brille comme jamais à mon doigt. Je sens à nouveau la magie affluer en moi.
Plus déterminée à me battre que jamais, je tends les mains vers les ennemis qui arrivent, et lache sur eux une salve de glaciers. Sheba profite de mon regain d'énergie pour voler aider les G-Force à combattre un vaisseau qui ne tarde pas à aller s' écraser dans la mer. Je fais volte face. Personne ici ne semble en grande difficulté et l'inquiétude pour mes amis et ma famille me ronge, il faut que je les retrouve. Je passe en courant devant Greg qui ne semble pas avoir besoin d'aide malgré une blessure. J'arrive à retrouver Casey qui se bat, aidé de son G-Force qui bondit frénétiquement pour atteindre le monstre qui volette quelques mètres au-dessus. Il a l'air soulagé en me voyant mais ne peut se permettre de relacher son attention. Des soldats se pressent autour de lui, et je me poste à ses côtés pour l'aider. Dos à dos, nous manions chacun notre arme pour nous défendre alors que les ennemis affluent à une vitesse impressionnnante.
Et tout à coup, c'est comme si une grosse bulle éclatait dans ma poitrine. Effarée, j'ai juste le temps de lever les yeux au ciel pour voir Sheba disparaître dans un léger nuage brumeux. Le cri meurt dans ma gorge, et je n'aperçois pas le coup qui vient me frapper à la machoire. Sonnée, j'aterris durement contre le sol ; à quatre pattes dans le sable, je tente de me redresser quand un nouveau pressentiment serre mon coeur comme un étau, me coupant le souffle un moment. Dans un sursaut, je lève la tête vers la colline la plus éloignée où ma mère se bat contre des soldats, alors que Shiva lutte de toutes ses forces contre un vaisseau, loin de son invoqueur. Trop loin. Shiva et moi avons tourné la tête vers ma mère en même temps, et je suis sure que nous partageons le même regard paniqué. Comme au ralenti, je vois un second vaisseau se diriger vers la colline et tirer une salve de lasers en direction de ma mère. Et je sais que nous réalisons la même chose : Shiva est beaucoup trop loin pour la protéger... les mains comme enracinées au sol, je ne peux que réaliser ma propre impuissance. Je n'arriverai jamais à la protéger... et Sheba n'est même plus là... mon regard affolé croise celui alors d'Etan qui se trouve entre la colline et moi. Il se retourne vers l'endroit qu'il m'a vue fixer, où ma mère se bat toujours sans voir ce qui l'attend. Et quand je le vois s'y diriger en courant, je sais au fond de moi ce qu'il va faire. Et qu'il ne le doit pas. D'un bon, je me relève en hurlant, comme si toute la scène se déroulait maintenant à une vitesse beaucoup trop rapide, et je me rue vers Etan, espérant, contre toute attente, arriver à temps. Mais à temps pour quoi ? pour protéger qui ? Je vois le G-Force incandescent s'élever dans les airs au dessus d'Etan, en direction de la colline au moment où le vaisseau lache ses lasers sur ma mère.
Le G-Force n'a pas pu arriver assez vite.
Le premier tir qui la touche me cloue sur place ; et chacun de ceux qui suivent me secouent d'autant de violents tremblements... le temps a à nouveau ralenti et je la vois tomber dans le sable avec lenteur. Et en même temps, un autre corps entre nous s'effondre, tandis que le G-Force élimine le vaisseau et disparaît en même temps que lui dans une explosion effroyable.
- NOOOOON !
***
Le hurlement avait retentit sur toute l’île, dans chaque tête, dans chaque poitrine, et un même frisson avait parcouru également chacun des combattants, allié ou ennemi. Quelque chose d’ indéfinissable, comme un souffle chaud et pesant semblant s’élever de la terre, s’échapper de chaque corps encore debout, et chacun, avec comme un étau autour du cœur, semblait poussé à regarder vers la provenance du cri, cette jeune fille qui ne devait pas tout à fait être ce qu’ elle semblait au départ. Quelque chose de puissant, une sorte d’ aura effroyable émanant d’ elle les pétrifiait.
Le regard enflammé, les cheveux rejetés en arrière par un vent violent qui semblait ne toucher qu’ elle - ou peut-être qui s’ échappait d’ elle -, elle se tenait haute et droite devant le corps de Linoa. Son visage, qui n’avait jamais paru si frappant de beauté, d’une beauté dure et glaciale, brillait de larmes. Alors qu'elle écartait les bras, le corps sans vie de Linoa s'éleva lentement du sol, entouré d'une vive lumière bleutée.
Les combats avaient cessé. Chacun se tournait vers la scène. C'était comme si l'énergie du corps de Linoa s'échappait et se transmettait à sa fille. Ceux qui avaient connu la dernière guerre savaient ce qu'il se passait. La sorcière que tous avaient voulu ignorer en Linoa transmettait ses pouvoirs à la nouvelle sorcière. Et Squall Leonheart, le coeur détruit, ne pouvait qu'observer ce qu'il avait toujours craint arriver : il avait perdu sa femme... et il voyait à présent sa fille devenue sorcière. La Dernière Sorcière née. Une sorcière folle de douleur, dont le regard flamboyant le cloua sur place. Au fond, il avait toujours su que c'était ce qui arriverait, et il s'était tellement battu pour l'empêcher...mais il aurait du savoir que le passé et le futur étaient inextricablement liés. Et quand celle qui s'appelerait Ultimécia laissa le corps de Linoa retomber lentement sur le sol pour se diriger vers celui d'Etan devant lequel elle s'agenouilla, tous l'entendirent alors qu'elle chuchotait...
- Je referai l'histoire... j'en ai le pouvoir maintenant... Le temps n'est plus rien. Je reviendrai dans le passé, et je changerai tout...tout sera différent... Je reviendrai...
Tous la virent prendre une poignée de sable fin et la faire doucement s'écouler sur la poitrine du jeune homme. Squall n'eut pas le temps de prononcer un mot. La sorcière se redressa soudain, puis leva la main qu'ornait Cronos et disparut dans un éclair. Et Squall, comme tous ceux présents surent que le combat ne faisait que commencer...
... Et comment livrer un tel combat ?
~~ THE END ~~
note de l'auteur :
OH MY GOD.
J’ en reviens pas.
THE END.
Ca y est.
Fini.
Fini fini fini fini !
Eh oui, c’ était le dernier chapitre de ma fic et vous pouvez pas imaginer à quel point ça me fait bizarre ! Des années que je suis dessus, et ça y est, plus rien !! Rien que ce chapitre m' a pris à peu près un an et demi, me direz vous. J'en suis mortifiée quand j'y pense, surtout avec tous ces commentaires adorables que j'ai reçus. Le fait est que j'ai tout ce temps continué à l'écrire, à le travailler, à le reretravailler... Mais une succession de problèmes personnels et matériels, sans parler du manque de motivation, de temps, de la difficulté à écrire.. Bref, ce ne sont pas des excuses, alors je tiens à m' excuser pour tout ce... bon à ce stade le mot « retard » n'est pas exactement le plus approprié... Pour cette longue absence, je dirai donc! Merci pour votre patience – forcée, certes, mais tout le monde a été incroyablement gentil malgré tout – et votre soutien indéfectible.
Olala. Fini. Bah quand même hein... snif... Oui, je sais, j’ ai pas grand chose à dire, vu que c’ est moi qui écris la fic et qui ai décidé qu’ elle finirait à ce moment-là… Mais ça fait un choc, quand même. Si si.
Je sais, c’ est une fin qui ne voudra peut-être pas dire grand chose pour certaines personnes. N'hésitez surtout pas s'il y a des détails qui vous échappent, des choses qui ne sont pas tout à fait clairs. Ça ne pourra que m'aider à améliorer le chapitre dont je dois avouer que je ne suis pas tout à fait satisfaite ( encore une raison du délai pour le poster ! XD )
Dès le début, je savais comment ça finirait ; le début, la fin et quelques éléments entre, c’ est tout ce que j’ avais, à vrai dire, quand j'ai commencé. Et cette fin, c’ est pas la première idée que j’ ai eu, j’ avoue. Pendant environ 15 secondes, je reconnais avoir envisagé de faire finir Eva et Etan ensemble. Et puis j’ ai retrouvé ma lucidité. J’ ai impitoyablement, irrémédiablement, définitivement balayé cette idée idiote. Déjà parce que ça aurait été ce que tout le monde attendait niark niark niark. J’ aime pas les histoires dont on sait dès le début comment elles vont finir- même si certains se sont doutés que je ferais mourir Etan ; mais bon... mon esprit de contradiction n'est pas allé jusqu'à changer ça aussi ; et j’ étais fermement décidée à jouer les sadiques jusqu’ au bout. Comme si moi, je pouvais faire un happy end ! Et puis… après tous les efforts que j’ avais fait, terminer de manière aussi peu surprenante, aussi banale, ça m’ aurait paru complètement fade et ça m’ aurait déçu de n’ importe quel autre auteur.
Quand j’ ai commencé à faire des petites recherches sur Ultimécia, pour avoir des éléments qui m’ aideraient à amorcer la transformation d’ Eva, quelle n’ a pas été ma surprise de lire un peu partout ( partout le même texte, en fait… ) que tout le monde suspectait Linoa d’ être Ultimécia. J'avais jamais pensé à ça, personnellement. Mais bon… donc voilà, Eva est Ultimécia, pour moi. J'ai fait en sorte qu'elle ait la bague de Squall, ce qui explique qu'Ultimécia la connaisse dans le jeu. Il me semble aussi qu'elle a créé un G-Force ; c'est un pouvoir qu'avait Linoa pour moi ; on le voit quand elle réussit à créer le G-Force pour Eva. Et cette dernière a hérité de cette faculté. Elle veut changer la vie d'Etan, lui en faire une meilleure en revenant dans le passé, c'est pour ça que toutes les sorcières tourneront autour de Seifer, pour essayer de lui donner une part importante, tout en conservant cette part de mépris qu'Eva a envers lui pour ce qu'il a fait...elle ne se rend pas compte qu'elle deviendra cette sorcière tant redoutée ; c'est au fur et à mesure que sa conscience va se perdre, que la sorcière va prendre le dessus sur Eva, et qu'elle va petit à petit oublier son autre vie...
Bref je ne sais pas si la fin est bien écrite... si ces petits éléments sont trop implicites...
Je compte reprendre le début, le corriger, peut-etre ajouter des scènes pour qu'on voit plus la personnalité d'Eva, et le fait que ce n'est pas seulement une peste raleuse ! Ça va être dur ! lol
Voilà, encore une fois un énooooorme merci à vous !
n'hésitez pas à me dire ce qui ne va pas surtout!
Mon Fic sur FF8 : http://forum.finaland.com/viewtopic.php?t=901
histoire ACHEVEE
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