PARTIE 3 / Chapitre XII
Publié : 21 déc. 2010 23:24
Au nord du continent estharien se trouvait une petite île enneigée, isolée du reste du monde. Seuls Léo et Syd avaient tenu à s’aventurer à travers les contrées de Shumi. Pour Leeve et Stella, le climat de ces landes abandonnées paraissait un peu trop rude. Marshall quant à lui, prétexta une forte fatigue, mais tous savaient que le jeune homme ne tenait tout simplement pas à s’immiscer entre les deux amis, qui depuis leur visite à l’orphelinat se sentaient plus proches que jamais. Hermès, lui, décida de les accompagner, affirmant qu’après ce lourd coma, un peu d’exercice lui ferait le plus grand bien. Même si Syd et Léo auraient préféré partager ce moment seuls à seuls, ils ne purent refuser à leur ami de se joindre à eux. C’est les deux pieds dans la neige que les trois compagnons débutèrent donc leur expédition. Au loin se distinguait une étonnante bâtisse, aux faux airs de tortues, ou d’araignée peut être. Un édifice novateur et ultramoderne, qui attira l’attention de la petite équipe, bien décidée à aller inspecter cet endroit inédit. Pourtant, après quelques minutes de marches, qui parurent d’ailleurs des heures, Syd, Hermés et Léo, pénétrèrent enfin dans l’enceinte de l’espèce de carapace géante. S’attendant à découvrir une ville dédiée à la haute technologie et à l’architecture surprenante, ils furent stupéfaits de ne trouver que de la roche brute.
«- C’est bizarre ! », déclara Hermés. Sa voix résonna au quatre coins de la pièce, vide et spacieuse.
« - Edea a dû se tromper d’endroit. Il n’y a rien ici… », continua Léo qui tournoyait sur lui-même,en inspectant les environs. « Venez, on s’en va. »
Sydélia s’apprêtait à suivre les instructions de son meilleur ami, mais Hermés, lui, ne l’entendait pas de cette oreille.
« - Hermés ! Allez ! Nous n’avons pas de temps à perdre !
- Une minute, Zalmander. Mon intuition me dit que partir maintenant serait passer à côté de quelque chose.
- Et… Passer à côté de quoi ? », ironisa la jeune femme, qui avait beau cherché, mais ne voyait toujours que de vulgaire blocs de pierre.
« - Passer à côté de… ça. », dit le blondinet du clan Venturi, alors qu’une porte venait de s’ouvrir comme par magie.
« - Qu’est ce que c’est que ça ! », s’exclama Léo, ébahi par cette nouvelle trouvaille.
« - Ca ressemble à un ascenseur… Il y peut être un étage quelque part. De toute façon, on ne saura jamais si l’on ne s’y aventure pas… »
Les deux Seeds restaient tout de même perplexes. Cette mine, désertée et perdue en milieu hostile ne leur disait rien qui vaille. L’un comme l’autre, n’avait guère envie de se trouver nés à nés avec un monstre centenaire ou une Guardian force. Sans compter que cette fois, Leeve n’était pas là pour les tirer d’affaire en cas de besoin…
« - Pfff… Mercenaires ? Fillettes oui… Moi, en tout cas, j’y vais. Et qui m’aime me suive ! »
A ces mots, Hermés s’engouffra dans l’ascenseur, et disparut dans un vacarme fracassant, qui n’encouragea pas les deux amis.
« - Alors ? Qu’en dis-tu ?
- Je n’ai jamais été curieux de savoir d’où je venais ; mais, puisque l’occasion se présente, je pense que cela serait idiot de laisser passer ma chance.
- Je suis de ton avis. Et Edea est une personne de confiance, elle nous aurait prévenu s’il nous étions susceptible d’affronter le moindre danger.
- C’est certain, oui. »
Léo prit alors la main de Sydélia. Ce geste inattendu la fit sursauter, et l’image de Stella lui vint tout de suite à l’esprit. Pourtant elle ne dit mot, et se laissa faire. La vie de Léo allait peut être basculer ; il devait être anxieux, ou impatient. Cela n’avait rien de déplacé ou de sous-entendant. Du moins, c’est ce qu’elle espérait. Elle appréciait. Et puis, il y avait Marshall et… Et toutes ces réflexions n’avaient de toute façon aucun sens puisque sa relation avec Léo était claire. Ils étaient amis, un point c’est tout. Toujours main dans la main, ils firent un premier pas à l’intérieur de la cage d’ascenseur, dont la porte se referma derrière eux. Une voix émanant d’un haut parleur leur demanda poliment de s’asseoir, et leur souhaita un agréable voyage. Les deux soldats obéirent, et s’installèrent sur le joli sofa qui se trouvait face à eux. Aucun d’entre eux ne parlait, faisant mine d’écouter la petite musique d’ambiance qui venait de débuter. De son pouce, Léo caressa alors délicatement la petite main de la jolie brune. Gênée, et contrariée de pourtant trouver cela agréable, celle-ci ne broncha toujours pas. Pour se changer les idées, elle s’amusait à observer les moindres recoins de cette petite pièce, fort bien aménagée. Un vase, une télévision, un tapis… A côté de la porte, elle remarqua un petit écran digital qui indiquait ‘’-158m’’. Plus les secondes passaient, plus les chiffres défilaient. Quand ceux-ci eurent atteint ‘’-323m’’, un petit bip, se fit entendre, comme pour indiquer que les passagers étaient arriver à destination. A ce moment précis, Léo serra la main de Syd un peu plus fort et plongea son regard empli d’angoisse dans le sien. D’abord déboussolée, la jeune femme se contenta de sourire.
« - Ne t’inquiète pas. Je suis là. » Le rouquin hocha la tête en guise de réponse, et esquissa à son tour un sourire, toujours nerveux. En se levant, il lâcha la main de son amie, comme si de rien n’était et sortit le premier de l’ascenseur.
« - Vous avez vu ça ! Incroyable, hein ! Et en plus, on est sous terre ! », s’extasia Hermés en voyant débarquer ses compagnons. En effet, aucun d’entre eux ne regrettait avoir oser descendre dans les entrailles de la terre. Le paysage n’avait à voir avec ce qu’on avait pu s’imaginer : c’était un charmant village, entouré par de gigantesques montagnes grises et argentées, dont les habitations ressemblaient, elles aussi à de grosses carapaces dorées. Un lieu envahi de verdure, où coulait aussi un ruisseau à l’eau cristalline, parsemés de ci et là par quelques nénuphars en fleurs. Un calme absolu, parfois troublé par le chant d’un insecte, régnait en maître sur ce havre de sérénité. Une nuée de Moombas accourut soudain autour de Léo.
« - Laguna ! Laguna ! Laguna ! Laguna !
- Oh non ! Bon sang ça recommence… Quelqu’un sait parler Moomba ? Ils m’oppressent quand ils font ça ! », s’exclama Léo en levant les bras pour ne pas toucher les petits félins, totalement excités.
« - Cessez je vous prie. Ne voyez-vous pas que notre invité est embarrassé par votre accueil ? », déclara paisiblement une étrange créature jaunâtre, aux mains colossales, armées de longs doigts fins, en surgissant d’une des maisonnettes. «Bienvenue à Shumi Village, chers hôtes. Je vais prévenir l’Elu de votre visite. En attendant, je vous conseille de visiter notre humble seigneurie.
- Merci Monsieur. », déclarèrent sagement les trois humains, ouvrant de grands yeux, comme de petits écoliers devant leur maîtresse. Le Shumi s’éclipsa alors, laissant les nouveaux arrivants livrés à eux même, libres d’explorer ce lieu irréel à leur guise.
« - Et si nous faisions une petite pose ? Chacun fait ce que bon lui semble, et nous nous donnons rendez-vous ici dans une trentaine de minutes ? Un peu de solitude fera du bien à chacun d’entre nous…
- Cela me semble une idée en or Hermès. », déclara Sydélia, ravie de s’éloigner un peu de Léo, dont le comportement était quelque peu ambigu. Dire que cela lui déplaisait serait mentir, mais si les choses venaient à aller plus loin, elle se le pardonnerait jamais. Stella avait prouvé son amitié en reniant l’armée, et sa propre famille. Elle ne pouvait saboter sa relation avec Léo.
« - Euh… Seul ? Parlez pour vous ! », se lamenta ce dernier, alors que les Moombas, après s’être retourné pour s’assurer que leur chef avait bien quitté les lieux, se remirent à sautiller joyeusement en psalmodiant en cœur, le nom de Laguna. La scène ravit Syd et Hermés qui ne tardèrent pas à pouffer de rire, avant de d’éloigner de part et d’autre du village.
***
Hermés, en bon pirate, décida de visiter chacune des petites demeures, pour y découvrir les coutumes locales et pourquoi pas, dérober quelques fascinants trésors. A son grand désespoir, les Shumis semblaient vivre modestement, sans s’encombrer de biens matériels, et le jumeau Venturi ne tarda pas à s’ennuyer ferme, regrettant déjà son idée de génie…
***
Léo décida d’occuper son temps libre avec une pause bien méritée. Il s’allongea alors sur l’une des marches de l’escalier menant à la petite mare, qui s'étendait au pied des maisons. Après avoir caler ses bras derrière sa tête, en guise d’oreiller, le rouquin soupira profondément. Mais hélas, à peine eut-il fermé les paupières que sa troupe d’admirateur en folie vint troublé son repos en répétant, encore et toujours, le même mot. Léo ne pouvait plus supporter ces jacassements.
« - Ca suffit ! J’en ai plus qu’assez, vous entendez ? Vous m’exaspérez ! Allez traîner vos crinières pleines de puces ailleurs, compris ? », hurla t-il en chassant ses fans, avec mécontentement. Tous se turent, et dévisagèrent leur idole avec un air abattu. L’un d’entre eux se mit alors à sangloter. Grave erreur. Bientôt, ce fut alors une dizaine de Moombas dévastés qui pleurnichaient en cœur avec désespoir, et aucun ne semblait décidé à stopper cette crise larmoyante.
« - Non ! Non ! Ne pleurez pas ! Je suis désolé, d’accord ? », paniqua le jeune mercenaire qui se sentait désormais coupable. Il attira alors vers lui une des petites créatures, avant de lui octroyer un tendre câlin. Jaloux, les autres, qui avaient cessé de geindre, réclamaient, eux aussi, leur câlin. C’est pourquoi tous se jetèrent sur le pauvre Léo qui, croulant sous les peluches rousses, ne pût pourtant s’empêcher de succomber à un incontrôlable fou rire.
***
Sydélia flânait dans le vaste atelier, où quelques Shumis s’adonnaient à la sculpture. L’une de leur œuvre attira particulièrement son attention.
« - Savez-vous qui est représenté sur cette statue ? », demanda la jeune fille.
« - Il y longtemps, nous avons soigner un humain gravement blessé. C’était un homme au grand cœur. Il a même tenté d’apprendre aux Moombas à parler, mais, la seule chose qu’ils sont parvenus à prononcer, c’est son prénom. », répondit l’un des artiste. Sydélia comprit alors qu’il s’agissait de son grand-père, Laguna Loire. En revanche, ce qui restait un mystère, c’était l’engouement des Moombas pour son ami Léo. Il ne ressemblait pourtant en rien à Laguna ! Le sculpteur raconta alors à la jeune visiteuse, que rares avaient été les humains à pénétrer dans cet atelier. Sydélia fit instinctivement le rapprochement avec ses parents, qui avaient probablement du se rendre ici durant leur périple à travers le monde. Toutes ces coïncidences la confortait dans son intime conviction : bientôt, elle parviendrait à éclaircir les zones d’ombres de son histoire.
***
Fatigué de tourner désespérément en rond, Hermès réutilisa l’ascenseur et se rendit dans le grand hall, servant aussi de mines. Ainsi, il pouvait s’adonner tranquillement à l’une de ses activités favorite : fouiner. Il était certain que ce lieu, trop vide, trop inutile en apparence, renfermé un secret croustillant. C’est alors qu’au fin fond de la pièce, Hermés remarqua deux Shumis silencieux, qui ne bougeaient point.
« - Bien le bonjour ! Auriez-vous l’amabilité de me dire ce que vous faites ici ? », questionna t’il en s’approchant d’eux.
« - Nous gardons une puissante arme, à la valeur inestimable.
- Vraiment ? Serait-il possible d’y jeter un bref coup d’œil.
- Bien sur… », répondirent les créatures. Le vaillant croupier s’avança donc, bien heureux de sa nouvelle découverte, mais fut aussitôt stopper par l’un des deux Shumis qui tendit son bras, en l’empêcha d’aller plus loin.
« - Une petite donation serait la bienvenue.
- Oh… Oui… Naturellement ! », répondit Hermès en sortant 10 gils de sa poche.
« - C’est 5000 gils. », déclara soudainement le second Shumi, sous les yeux ébahis du jeune humain.
« - 5000 gils ! Vous plaisantez ! Je n’ai pas 5000 gils…
- Alors malheureusement, je crains que nous allons devoir garder pour nous ce petit trésor. » La curiosité prit alors le pas sur la raison, et Hermès piocha la somme exigée dans les économies communes du groupe, essayant de se convaincre qu’ils n’y verraient tous que du feu.
« - La seigneurie de Shumi vous remercie grandement noble étranger. », s’exclama le premier Shumi en s’écartant afin de laisser le passage libre. Le jumeau Venturi se trouva alors face à une pure merveille : une source d’Ultima, l’une des plus puissantes magies au monde, censée avoir disparue depuis prés d’une vingtaine d’année…
« - Hum Hum… Voila qui est intéressant… », marmonna le jeune homme, en se frottant le menton, un petit sourire au coin des lèvres.
***
Les Moombas partis, Léo pût enfin bénéficier d’une sieste réparatrice. Il ne dormait pas vraiment, mais tentait tout au moins de vider son esprit, et de surtout, ne plus penser à la position délicate dans laquelle il se trouvait, déchiré entre ses sentiments certains pour la pulpeuse Stella, et son attirance magnétique pour la mystérieuse Sydélia. Il aurait tellement voulu que les choses soient simples…
« - Devine qui c’est ? », déclara une voix enjouée, alors que deux paumes douces venaient de se poser sur ses yeux clos.
« - Trop difficile… hum… Hermés ? », plaisanta le jeune homme, qui avait bien entendu reconnu Syd.
« - Idiot ! », s’exclama la brunette en tapant gentiment sur la tête de son ami.
« - Aieuh ! », exagéra Léo, en s’asseyant convenablement afin de laisser une place à Sydélia, qui se tarda pas à s’installer. Cette dernière lui fit alors part de la légende au sujet de Laguna et des Moombas. Le jeune Seed trouva l’histoire mignonnette, mais ne comprenait toujours pas pourquoi ces infatigables félins lui vouaient un tel culte.
« - C’est bête mais… Les moments où tu es loin… Je ne les apprécie pas vraiment », déclara t’il soudain.
« - Tu as vraiment changé… Où est passé le soldat suffisant et prétentieux qui passait son temps à me descendre? », répondit Syd, en faisant mine de ne pas avoir entendu.
« Tu exagères ! Je n’étais pas si horrible… Si ?
- Non. C’est juste que parfois… J’ai l’impression d’avoir perdu mon meilleur ami, et ça fait drôle, c’est tout…
- Tu veux dire que tu me préférais méchant ?
- Hum… Ca te donnait un charme certain »,taquina la jeune femme.
« - Tu es laide, inutile et jamais tu ne m’arriveras à la cheville en terme de combat. Vous plais-je mieux ainsi, mademoiselle Leonheart ? », déclara Léo sur un ton à la fois placide et méprisant. Les deux amis se regardèrent et laissèrent échapper un petit rire. Ainsi, les yeux dans les yeux, au milieu de ce décor irréel, ils ressentirent alors dans leurs ventres, une sorte de crispation si singulière, et pourtant agréable. Tout deux se sentaient pousser des ailes, s’élever au delà des cieux et du temps. Ils avaient quitté la terre, rejoins le vide sidéral. Ils flottaient dans l’air et se laissaient tomber, sans redouter la chute. Pris d’une incontrôlable pulsion, Léo pris le visage de Sydélia entre ses mains et l’embrassa avec passion. De voluptueux frissons parcoururent le corps tout entier de la belle brune. Elle sentait le désir grimper en elle, comme jamais auparavant. Savourant avec délectation chaque seconde de ce moment de bonheur intense, elle ouvrait finalement les yeux pour se plonger dans les siens, encore tremblante, le souffle court, ne sachant que dire ni que faire.
« - Je t’aime. », murmura le jeune homme.
« - Ne dis pas ça. Tu aimes Stella. C’est mal ce qu’on vient de faire…
- Tu m’aimes, toi ? Dis-moi que tu m’aimes et je renierai tout ce que j’ai, il n’y aura plus que toi et moi. Ou bien affirme que je me trompe, et je te jure que plus jamais une telle chose ne se produira. » Bouleversée, dévastée, perdue, la jeune femme ne savait que répondre. Elle ne pouvait briser le cœur de Stella et compromettre son histoire avec Marsh, mais pourtant, garantir à Léo qu’elle n’éprouvait rien pour lui, et le perdre à jamais lui semblait insurmontable. L’honneur l’emporta pourtant sur la passion et Sydélia se résigna alors, consciente qu’à cet instant elle franchirait un point de non-retour.
« - Je ne t’aime pas, Léo. » A ces mots, ce dernier resta sans voix, et finit par baisser la tête, comme accablé par ces paroles douloureuses.
« - J’ai comprit. », déclara t’il simplement. Mais cette phrase succincte en disait long. Syd connaissait Léo : il avait combattu son orgueil légendaire pour lui offrir enfin son cœur. Elle l’avait refusé. C’était son unique chance, et Sydélia le savait. Jamais plus, elle ne sentirait son parfum, la douceur de sa peau, son corps en osmose parfaite avec le sien.
« - Ne m’en veux pas… S’il te plait… Je…
- Tu n’as pas à te justifier. On a vécu une belle histoire toi et moi. Je ne sais d’ailleurs même plus pourquoi on a finit par se séparer… Toujours est-il qu’aujourd’hui, c’est du passé. Tu vas retrouver Marsh, moi Stella, et tout reprendra son court normal. », déclara calmement le beau soldat qui fixait toujours le sol. Elle avait envie de lui sauter au cou, de l’embrasser à nouveau, de lui demander pardon, de lui dire que jamais elle n’avait aimé autant, mais…
« - Hâtez-vous ! L’élu va nous recevoir ! », s’écria Hermés qui arriva en courant derrière eux.
«- C’est bizarre ! », déclara Hermés. Sa voix résonna au quatre coins de la pièce, vide et spacieuse.
« - Edea a dû se tromper d’endroit. Il n’y a rien ici… », continua Léo qui tournoyait sur lui-même,en inspectant les environs. « Venez, on s’en va. »
Sydélia s’apprêtait à suivre les instructions de son meilleur ami, mais Hermés, lui, ne l’entendait pas de cette oreille.
« - Hermés ! Allez ! Nous n’avons pas de temps à perdre !
- Une minute, Zalmander. Mon intuition me dit que partir maintenant serait passer à côté de quelque chose.
- Et… Passer à côté de quoi ? », ironisa la jeune femme, qui avait beau cherché, mais ne voyait toujours que de vulgaire blocs de pierre.
« - Passer à côté de… ça. », dit le blondinet du clan Venturi, alors qu’une porte venait de s’ouvrir comme par magie.
« - Qu’est ce que c’est que ça ! », s’exclama Léo, ébahi par cette nouvelle trouvaille.
« - Ca ressemble à un ascenseur… Il y peut être un étage quelque part. De toute façon, on ne saura jamais si l’on ne s’y aventure pas… »
Les deux Seeds restaient tout de même perplexes. Cette mine, désertée et perdue en milieu hostile ne leur disait rien qui vaille. L’un comme l’autre, n’avait guère envie de se trouver nés à nés avec un monstre centenaire ou une Guardian force. Sans compter que cette fois, Leeve n’était pas là pour les tirer d’affaire en cas de besoin…
« - Pfff… Mercenaires ? Fillettes oui… Moi, en tout cas, j’y vais. Et qui m’aime me suive ! »
A ces mots, Hermés s’engouffra dans l’ascenseur, et disparut dans un vacarme fracassant, qui n’encouragea pas les deux amis.
« - Alors ? Qu’en dis-tu ?
- Je n’ai jamais été curieux de savoir d’où je venais ; mais, puisque l’occasion se présente, je pense que cela serait idiot de laisser passer ma chance.
- Je suis de ton avis. Et Edea est une personne de confiance, elle nous aurait prévenu s’il nous étions susceptible d’affronter le moindre danger.
- C’est certain, oui. »
Léo prit alors la main de Sydélia. Ce geste inattendu la fit sursauter, et l’image de Stella lui vint tout de suite à l’esprit. Pourtant elle ne dit mot, et se laissa faire. La vie de Léo allait peut être basculer ; il devait être anxieux, ou impatient. Cela n’avait rien de déplacé ou de sous-entendant. Du moins, c’est ce qu’elle espérait. Elle appréciait. Et puis, il y avait Marshall et… Et toutes ces réflexions n’avaient de toute façon aucun sens puisque sa relation avec Léo était claire. Ils étaient amis, un point c’est tout. Toujours main dans la main, ils firent un premier pas à l’intérieur de la cage d’ascenseur, dont la porte se referma derrière eux. Une voix émanant d’un haut parleur leur demanda poliment de s’asseoir, et leur souhaita un agréable voyage. Les deux soldats obéirent, et s’installèrent sur le joli sofa qui se trouvait face à eux. Aucun d’entre eux ne parlait, faisant mine d’écouter la petite musique d’ambiance qui venait de débuter. De son pouce, Léo caressa alors délicatement la petite main de la jolie brune. Gênée, et contrariée de pourtant trouver cela agréable, celle-ci ne broncha toujours pas. Pour se changer les idées, elle s’amusait à observer les moindres recoins de cette petite pièce, fort bien aménagée. Un vase, une télévision, un tapis… A côté de la porte, elle remarqua un petit écran digital qui indiquait ‘’-158m’’. Plus les secondes passaient, plus les chiffres défilaient. Quand ceux-ci eurent atteint ‘’-323m’’, un petit bip, se fit entendre, comme pour indiquer que les passagers étaient arriver à destination. A ce moment précis, Léo serra la main de Syd un peu plus fort et plongea son regard empli d’angoisse dans le sien. D’abord déboussolée, la jeune femme se contenta de sourire.
« - Ne t’inquiète pas. Je suis là. » Le rouquin hocha la tête en guise de réponse, et esquissa à son tour un sourire, toujours nerveux. En se levant, il lâcha la main de son amie, comme si de rien n’était et sortit le premier de l’ascenseur.
« - Vous avez vu ça ! Incroyable, hein ! Et en plus, on est sous terre ! », s’extasia Hermés en voyant débarquer ses compagnons. En effet, aucun d’entre eux ne regrettait avoir oser descendre dans les entrailles de la terre. Le paysage n’avait à voir avec ce qu’on avait pu s’imaginer : c’était un charmant village, entouré par de gigantesques montagnes grises et argentées, dont les habitations ressemblaient, elles aussi à de grosses carapaces dorées. Un lieu envahi de verdure, où coulait aussi un ruisseau à l’eau cristalline, parsemés de ci et là par quelques nénuphars en fleurs. Un calme absolu, parfois troublé par le chant d’un insecte, régnait en maître sur ce havre de sérénité. Une nuée de Moombas accourut soudain autour de Léo.
« - Laguna ! Laguna ! Laguna ! Laguna !
- Oh non ! Bon sang ça recommence… Quelqu’un sait parler Moomba ? Ils m’oppressent quand ils font ça ! », s’exclama Léo en levant les bras pour ne pas toucher les petits félins, totalement excités.
« - Cessez je vous prie. Ne voyez-vous pas que notre invité est embarrassé par votre accueil ? », déclara paisiblement une étrange créature jaunâtre, aux mains colossales, armées de longs doigts fins, en surgissant d’une des maisonnettes. «Bienvenue à Shumi Village, chers hôtes. Je vais prévenir l’Elu de votre visite. En attendant, je vous conseille de visiter notre humble seigneurie.
- Merci Monsieur. », déclarèrent sagement les trois humains, ouvrant de grands yeux, comme de petits écoliers devant leur maîtresse. Le Shumi s’éclipsa alors, laissant les nouveaux arrivants livrés à eux même, libres d’explorer ce lieu irréel à leur guise.
« - Et si nous faisions une petite pose ? Chacun fait ce que bon lui semble, et nous nous donnons rendez-vous ici dans une trentaine de minutes ? Un peu de solitude fera du bien à chacun d’entre nous…
- Cela me semble une idée en or Hermès. », déclara Sydélia, ravie de s’éloigner un peu de Léo, dont le comportement était quelque peu ambigu. Dire que cela lui déplaisait serait mentir, mais si les choses venaient à aller plus loin, elle se le pardonnerait jamais. Stella avait prouvé son amitié en reniant l’armée, et sa propre famille. Elle ne pouvait saboter sa relation avec Léo.
« - Euh… Seul ? Parlez pour vous ! », se lamenta ce dernier, alors que les Moombas, après s’être retourné pour s’assurer que leur chef avait bien quitté les lieux, se remirent à sautiller joyeusement en psalmodiant en cœur, le nom de Laguna. La scène ravit Syd et Hermés qui ne tardèrent pas à pouffer de rire, avant de d’éloigner de part et d’autre du village.
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Hermés, en bon pirate, décida de visiter chacune des petites demeures, pour y découvrir les coutumes locales et pourquoi pas, dérober quelques fascinants trésors. A son grand désespoir, les Shumis semblaient vivre modestement, sans s’encombrer de biens matériels, et le jumeau Venturi ne tarda pas à s’ennuyer ferme, regrettant déjà son idée de génie…
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Léo décida d’occuper son temps libre avec une pause bien méritée. Il s’allongea alors sur l’une des marches de l’escalier menant à la petite mare, qui s'étendait au pied des maisons. Après avoir caler ses bras derrière sa tête, en guise d’oreiller, le rouquin soupira profondément. Mais hélas, à peine eut-il fermé les paupières que sa troupe d’admirateur en folie vint troublé son repos en répétant, encore et toujours, le même mot. Léo ne pouvait plus supporter ces jacassements.
« - Ca suffit ! J’en ai plus qu’assez, vous entendez ? Vous m’exaspérez ! Allez traîner vos crinières pleines de puces ailleurs, compris ? », hurla t-il en chassant ses fans, avec mécontentement. Tous se turent, et dévisagèrent leur idole avec un air abattu. L’un d’entre eux se mit alors à sangloter. Grave erreur. Bientôt, ce fut alors une dizaine de Moombas dévastés qui pleurnichaient en cœur avec désespoir, et aucun ne semblait décidé à stopper cette crise larmoyante.
« - Non ! Non ! Ne pleurez pas ! Je suis désolé, d’accord ? », paniqua le jeune mercenaire qui se sentait désormais coupable. Il attira alors vers lui une des petites créatures, avant de lui octroyer un tendre câlin. Jaloux, les autres, qui avaient cessé de geindre, réclamaient, eux aussi, leur câlin. C’est pourquoi tous se jetèrent sur le pauvre Léo qui, croulant sous les peluches rousses, ne pût pourtant s’empêcher de succomber à un incontrôlable fou rire.
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Sydélia flânait dans le vaste atelier, où quelques Shumis s’adonnaient à la sculpture. L’une de leur œuvre attira particulièrement son attention.
« - Savez-vous qui est représenté sur cette statue ? », demanda la jeune fille.
« - Il y longtemps, nous avons soigner un humain gravement blessé. C’était un homme au grand cœur. Il a même tenté d’apprendre aux Moombas à parler, mais, la seule chose qu’ils sont parvenus à prononcer, c’est son prénom. », répondit l’un des artiste. Sydélia comprit alors qu’il s’agissait de son grand-père, Laguna Loire. En revanche, ce qui restait un mystère, c’était l’engouement des Moombas pour son ami Léo. Il ne ressemblait pourtant en rien à Laguna ! Le sculpteur raconta alors à la jeune visiteuse, que rares avaient été les humains à pénétrer dans cet atelier. Sydélia fit instinctivement le rapprochement avec ses parents, qui avaient probablement du se rendre ici durant leur périple à travers le monde. Toutes ces coïncidences la confortait dans son intime conviction : bientôt, elle parviendrait à éclaircir les zones d’ombres de son histoire.
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Fatigué de tourner désespérément en rond, Hermès réutilisa l’ascenseur et se rendit dans le grand hall, servant aussi de mines. Ainsi, il pouvait s’adonner tranquillement à l’une de ses activités favorite : fouiner. Il était certain que ce lieu, trop vide, trop inutile en apparence, renfermé un secret croustillant. C’est alors qu’au fin fond de la pièce, Hermés remarqua deux Shumis silencieux, qui ne bougeaient point.
« - Bien le bonjour ! Auriez-vous l’amabilité de me dire ce que vous faites ici ? », questionna t’il en s’approchant d’eux.
« - Nous gardons une puissante arme, à la valeur inestimable.
- Vraiment ? Serait-il possible d’y jeter un bref coup d’œil.
- Bien sur… », répondirent les créatures. Le vaillant croupier s’avança donc, bien heureux de sa nouvelle découverte, mais fut aussitôt stopper par l’un des deux Shumis qui tendit son bras, en l’empêcha d’aller plus loin.
« - Une petite donation serait la bienvenue.
- Oh… Oui… Naturellement ! », répondit Hermès en sortant 10 gils de sa poche.
« - C’est 5000 gils. », déclara soudainement le second Shumi, sous les yeux ébahis du jeune humain.
« - 5000 gils ! Vous plaisantez ! Je n’ai pas 5000 gils…
- Alors malheureusement, je crains que nous allons devoir garder pour nous ce petit trésor. » La curiosité prit alors le pas sur la raison, et Hermès piocha la somme exigée dans les économies communes du groupe, essayant de se convaincre qu’ils n’y verraient tous que du feu.
« - La seigneurie de Shumi vous remercie grandement noble étranger. », s’exclama le premier Shumi en s’écartant afin de laisser le passage libre. Le jumeau Venturi se trouva alors face à une pure merveille : une source d’Ultima, l’une des plus puissantes magies au monde, censée avoir disparue depuis prés d’une vingtaine d’année…
« - Hum Hum… Voila qui est intéressant… », marmonna le jeune homme, en se frottant le menton, un petit sourire au coin des lèvres.
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Les Moombas partis, Léo pût enfin bénéficier d’une sieste réparatrice. Il ne dormait pas vraiment, mais tentait tout au moins de vider son esprit, et de surtout, ne plus penser à la position délicate dans laquelle il se trouvait, déchiré entre ses sentiments certains pour la pulpeuse Stella, et son attirance magnétique pour la mystérieuse Sydélia. Il aurait tellement voulu que les choses soient simples…
« - Devine qui c’est ? », déclara une voix enjouée, alors que deux paumes douces venaient de se poser sur ses yeux clos.
« - Trop difficile… hum… Hermés ? », plaisanta le jeune homme, qui avait bien entendu reconnu Syd.
« - Idiot ! », s’exclama la brunette en tapant gentiment sur la tête de son ami.
« - Aieuh ! », exagéra Léo, en s’asseyant convenablement afin de laisser une place à Sydélia, qui se tarda pas à s’installer. Cette dernière lui fit alors part de la légende au sujet de Laguna et des Moombas. Le jeune Seed trouva l’histoire mignonnette, mais ne comprenait toujours pas pourquoi ces infatigables félins lui vouaient un tel culte.
« - C’est bête mais… Les moments où tu es loin… Je ne les apprécie pas vraiment », déclara t’il soudain.
« - Tu as vraiment changé… Où est passé le soldat suffisant et prétentieux qui passait son temps à me descendre? », répondit Syd, en faisant mine de ne pas avoir entendu.
« Tu exagères ! Je n’étais pas si horrible… Si ?
- Non. C’est juste que parfois… J’ai l’impression d’avoir perdu mon meilleur ami, et ça fait drôle, c’est tout…
- Tu veux dire que tu me préférais méchant ?
- Hum… Ca te donnait un charme certain »,taquina la jeune femme.
« - Tu es laide, inutile et jamais tu ne m’arriveras à la cheville en terme de combat. Vous plais-je mieux ainsi, mademoiselle Leonheart ? », déclara Léo sur un ton à la fois placide et méprisant. Les deux amis se regardèrent et laissèrent échapper un petit rire. Ainsi, les yeux dans les yeux, au milieu de ce décor irréel, ils ressentirent alors dans leurs ventres, une sorte de crispation si singulière, et pourtant agréable. Tout deux se sentaient pousser des ailes, s’élever au delà des cieux et du temps. Ils avaient quitté la terre, rejoins le vide sidéral. Ils flottaient dans l’air et se laissaient tomber, sans redouter la chute. Pris d’une incontrôlable pulsion, Léo pris le visage de Sydélia entre ses mains et l’embrassa avec passion. De voluptueux frissons parcoururent le corps tout entier de la belle brune. Elle sentait le désir grimper en elle, comme jamais auparavant. Savourant avec délectation chaque seconde de ce moment de bonheur intense, elle ouvrait finalement les yeux pour se plonger dans les siens, encore tremblante, le souffle court, ne sachant que dire ni que faire.
« - Je t’aime. », murmura le jeune homme.
« - Ne dis pas ça. Tu aimes Stella. C’est mal ce qu’on vient de faire…
- Tu m’aimes, toi ? Dis-moi que tu m’aimes et je renierai tout ce que j’ai, il n’y aura plus que toi et moi. Ou bien affirme que je me trompe, et je te jure que plus jamais une telle chose ne se produira. » Bouleversée, dévastée, perdue, la jeune femme ne savait que répondre. Elle ne pouvait briser le cœur de Stella et compromettre son histoire avec Marsh, mais pourtant, garantir à Léo qu’elle n’éprouvait rien pour lui, et le perdre à jamais lui semblait insurmontable. L’honneur l’emporta pourtant sur la passion et Sydélia se résigna alors, consciente qu’à cet instant elle franchirait un point de non-retour.
« - Je ne t’aime pas, Léo. » A ces mots, ce dernier resta sans voix, et finit par baisser la tête, comme accablé par ces paroles douloureuses.
« - J’ai comprit. », déclara t’il simplement. Mais cette phrase succincte en disait long. Syd connaissait Léo : il avait combattu son orgueil légendaire pour lui offrir enfin son cœur. Elle l’avait refusé. C’était son unique chance, et Sydélia le savait. Jamais plus, elle ne sentirait son parfum, la douceur de sa peau, son corps en osmose parfaite avec le sien.
« - Ne m’en veux pas… S’il te plait… Je…
- Tu n’as pas à te justifier. On a vécu une belle histoire toi et moi. Je ne sais d’ailleurs même plus pourquoi on a finit par se séparer… Toujours est-il qu’aujourd’hui, c’est du passé. Tu vas retrouver Marsh, moi Stella, et tout reprendra son court normal. », déclara calmement le beau soldat qui fixait toujours le sol. Elle avait envie de lui sauter au cou, de l’embrasser à nouveau, de lui demander pardon, de lui dire que jamais elle n’avait aimé autant, mais…
« - Hâtez-vous ! L’élu va nous recevoir ! », s’écria Hermés qui arriva en courant derrière eux.